deux directeurs d’école du département de l’Isère sanctionnés pour leur refus du fichier “base élèves”


article de la rubrique Big Brother > base élèves, non !
date de publication : lundi 12 avril 2010
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L’Inspectrice d’Académie de l’Isère a décidé lors de la commission paritaire (CAPD), mardi 30 mars, de retirer leurs fonctions de directeur à deux chefs d’établissements, Claude Didier (école de Prunières) et Rémi Riallan (école de Séchilienne), qui refusent de remplir le fichier de données informatiques "Base élèves premier degré".

La fédération de l’Isère de la Ligue des droits de l’Homme leur a apporté son soutien et a appelé à participer au rassemblement, devant l’Inspection académique de l’Isère, mercredi 31 mars.

[Mise en ligne le 26 mars 2010, mise à jour le 12 avril]



De quels droits ?
Monique, l’ONU et les directeurs

par Christine Tréguier, Politis.fr, 8 avril 2010


Claude Didier et Rémi Riallan, directeurs d’école primaire en Isère viennent de subir le même sort que Jean Yves Le Gall qui s’était vu retirer sa fonction de directeur en mai 2009, puis muter d’office en septembre par la très intransigeante inspectrice d’Académie d’Isère, Monique Lesko. Au niveau national ils sont douze rétrogradés ou en passe de l’être pour avoir refusé de renseigner le fichier Base Elèves (BE), et des dizaines d’autres subissent des retraits de salaires. Ils sont tous membres du Collectif national de résistance à Base Elèves (CNRBE) et dénoncent les dangers de ce fichier tentaculaire : élèves immatriculés dès l’âge de 3 ans et pour 35 ans, absence de légalité de cette base d’immatriculation, crainte d’interconnexions avec d’autres fichiers contenant les données sensibles dont BE a été expurgé (fichiers de la prévention de la délinquance, de l’absentéisme, nouveau « livret de compétence » etc). Ils s’opposent surtout à l’utilisation illégale de BE pour « loger » les enfants de sans papier, et offrir aux familles un charter retour. Les IA font en effet complaisamment circuler des demandes de « recherche d’enfant » émanant du ministère de l’éducation voire de celui de l’immigration.

Un rapport du Comité des droits de l’enfant de l’ONU (juin 2009) exprimait les mêmes craintes et recommandait un contrôle vigilant. Le ministère faisant la sourde oreille, le CNRBE, la LDH et le SNUIPP/FSU Isère ont alors saisi la Rapporteuse spéciale des droits de l’homme à l’ONU, Mme Sekaggya. Laquelle a jugé l’affaire assez grave pour appeler à la rescousse les rapporteurs spéciaux sur le droit à l’éducation et sur les droits des migrants. Dans une lettre du 10 décembre, ils se disent préoccupés que « les mesures disciplinaires prises à l’encontre de ces directeurs d’école […] soient liées à leurs activités non violentes de promotion et de protection des droits de l’homme ». Une résolution de 1999 de l’ONU stipule en effet que « nul ne peut être châtié ou inquiété pour avoir refusé de porter atteinte aux droits de l’homme », a fortiori dans l’exercice de sa fonction.

Les directeurs « défenseurs des droits » se pensent sauvés. Mais rien ne change et Monique Lesko accentue la pression. Pour gagner du temps, elle ajoute par mail une question diverse à l’ordre du jour de la CAPD (Commission administrative paritaire départementale consultée sur les carrières des fonctionnaires) du 26 mars : le retrait d’emploi de Claude Didier et Rémi Riallan. Les syndicats boycottent et la CAPD est reportée au 30 mars. Problème, ses membres n’ont pas été informés dans les délais légaux des motifs du retrait, et la moitié refusent de voter. L’inspectrice, qui semble en faire une affaire personnelle, passe en force et obtient gain de cause. Les accusés redeviennent simples enseignants pour « non-application d’une consigne ». Personne n’a encore réclamé le retrait de poste de Monique Lesko, mais les motifs ne manquent pas : non respect des droits de l’homme, des droits de l’enfant, de la résolution de 1999, des avis de l’ONU et de non application des règles de sa propre administration.

Christine Tréguier


(Photo Le Dauphiné libéré)

Grenoble – Manifestation contre le fichier base élèves

[Le Dauphiné libéré, 1er avril 2010]


« Ni sanction ni fichier ! » criaient, hier, une centaine de personnes sous les fenêtres de l’Inspection académique à Grenoble. Le groupe, composé d’enseignants, de syndicalistes, d’élus et de parents d’élèves, protestait contre la mise en place du fichier base élèves.

Le fichier base élèves, rassemble des informations diverses sur les enfants, à partir de 3 ans : parcours scolaire, coordonnées et activités périscolaires. Ce fichier vise à faciliter la gestion et le suivi des élèves, ainsi que les statistiques.

Ils refusent de remplir le fichier base élève

Les manifestants redoutent notamment une utilisation détournée du fichier base élèves.

Pour Gabrielle Beyler, secrétaire départementale SNUIPP (Syndicat national unitaire des instituteurs, professeurs des écoles et PEGC), « c’est encore une attaque frontale contre l’École. Les mesures sont mises en place par la menace et la pression, et non par le débat et la communication ».

Au milieu de la manifestation, une petite cérémonie a été improvisée : Claude Didier et Rémi Riallon, directeurs des écoles de la Prunières et de Séchilienne, ont reçu une paire de palmes. Un clin d’œil aux palmes académiques, haute distinction pour un enseignant...

Ayant refusé de remplir la base élève, les deux directeurs ont été démis de leurs fonctions, pour redevenir enseignants à temps complet, mardi, par l’Inspection d’académie. Une décision validée en commission paritaire (les dix délégués du personnel refusant de prendre part au vote).

Rémi Riallan est directeur depuis 15 ans, dont quatre à Séchilienne. « On a eu plusieurs dates pour leur porter l’information », raconte-t-il. « On a refusé de le faire, en justifiant de notre déontologie. On a reçu plusieurs lettres, jusqu’à celle qui nous a appris que l’on ne pourrait plus exercer notre fonction. On va porter l’affaire devant le tribunal administratif. »

Contactée, Monique Lesko, l’inspectrice d’académie de l’Isère, tient à souligner qu’ils « manifestent contre le fichage, pas contre base élèves ».

Elle explique qu’à la rentrée 2009, date à laquelle la base élèves devait être installée dans toutes les écoles, « cinq directeurs le refusaient, sur 287 écoles en Isère ». Monique Lesko a donc organisé une rencontre au mois d’octobre avec les directeurs en question. « On a écouté et entendu leurs craintes, leurs arguments. On a apporté des réponses, on leur a proposé des solutions, des pistes... »

Deux d’entre eux ont donc maintenu leur refus. « Or, un directeur d’école, comme tout fonctionnaire, a des responsabilités et des tâches à accomplir. Il ne peut pas choisir ! ».

Fichier Base élèves : deux directeurs d’école menacés de sanction

[LEMONDE.FR, 26.03.10 13h34]


Base élèves 1er degré, le fichier informatisé qui stocke et centralise les informations recueillies lors de l’inscription de chaque enfant dès 3 ans, rencontre une opposition farouche au sein du Collectif national de résistance à Base élèves, composé de parents d’élèves et d’enseignants, relayés par la Ligue des droits de l’homme. Selon le collectif, le retrait de fonction dans l’Isère de deux directeurs, qui refusent de ficher les enfants de leurs écoles dans Base élèves, a été inscrit à l’ordre du jour de la commission administrative paritaire, qui doit avoir lieu vendredi, par l’inspectrice de l’académie de l’Isère.

Le collectif rappelle qu’après les recommandations du Comité des droits de l’enfant des Nations unies de juin, un récent rapport du Conseil des droits de l’homme des Nations unies [1] a donné raison aux directeurs qui refusent de remplir Base élèves. Ce rapport confère le statut de défenseurs des droits de l’homme aux cinq directeurs d’école isérois qui refusent de remplir ce fichier.

Le 3 février 2009, un directeur d’une école primaire de l’Isère qui refusait d’enregistrer des informations dans Base élèves avait été démis par l’inspection académique de ce département, une première du genre en France. Jean-Yves Le Gall, démis de son titre de directeur de l’école primaire de Notre-Dame-de-Vaulx, en Isère, a conservé toutefois sa fonction d’instituteur. Selon l’inspectrice d’académie, "il ne s’agit pas d’une sanction mais d’une mesure administrative de retrait d’emploi".

Le fichier Base élèves, destiné à la gestion et au suivi du parcours scolaire des enfants, est expérimenté depuis 2005 et a été généralisé à partir de 2009. Selon la Ligue des droits de l’homme, près de deux cents directeurs d’école se sont déclarés opposés à ce logiciel.

Dans un texte diffusé au cours de la matinée du 29 mars 2010, la fédération de l’Isère de la Ligue des droits de l’Homme apporte son

SOUTIEN AUX DEFENSEURS DES DROITS DES ENFANTS

et appelle à participer au rassemblement,
devant l’Inspection académique de Grenoble (rue Joseph Chanrion), mercredi 31 mars à 17 h.

Le tract appelant à cette manifestation : http://retraitbaseeleves.wordpress.....


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