nouvelle purge de données personnelles pour base élèves 1er degré


article de la rubrique Big Brother > base élèves, non !
date de publication : vendredi 13 juin 2008
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Xavier Darcos décide de ne garder que le minimum.

Ce n’est pas à la Cnil — dont cela aurait été le rôle — mais c’est à l’obstination et à la pugnacité des militants et des collectifs Non à base élèves ! que nous devons cette victoire. Restons vigilants !

Les réactions à la décision du ministre ont été regroupées dans cette autre page. Mais, afin de mettre en perspective son nouveau recul, nous faisons suivre le communiqué du ministère par la transcription d’une note adressée aux directeurs d’écoles par l’Inspecteur d’académie de l’Aveyron, quelques jours avant la déclaration du ministre.

[Mise en ligne le 12 juin, complétée le 13 juin 2008]

Communiqué de presse - Xavier Darcos

Xavier Darcos modifie le périmètre des données collectées dans le logiciel « base élèves » [1]

Dans une lettre adressée à Mme Anne Kerkhove, présidente de la Fédération des Parents d’Elèves de l’Enseignement Public (PEEP), Xavier Darcos, ministre de l’Education nationale, indique qu’il a décidé que la profession et la catégorie sociale des parents, la situation familiale de l’élève, l’absentéisme signalé, ainsi que les données relatives aux besoins éducatifs particuliers, ne feront plus partie du périmètre des données collectées dans le logiciel « base élèves » dans le Premier degré.

Xavier Darcos rappelle qu’il a lui-même demandé, début 2008, le retrait de la liste des données saisies dans le logiciel « base élèves » de tout ce qui n’était pas strictement nécessaire à la gestion des effectifs des élèves du premier degré par les services de l’Education nationale : la nationalité ou l’origine ethnique des élèves, de leurs parents ou de leurs responsables légaux.

Seules seront dorénavant recensées les informations concernant les coordonnées de l’élève ainsi que celles du ou des responsables légaux de l’enfant.

Les données liées à la scolarité de l’élève ne porteront que sur des champs restreints : classe, date d’inscription, d’admission et de radiation.

Les activités périscolaires mentionnées ne figureront qu’aux seules fins de bonne gestion de ces services par les mairies concernées : garderie, études surveillées et accompagnement scolaire, restaurant et transport scolaires.

Par ailleurs, la durée de conservation des données sera limitée à la scolarité de l’élève dans le premier degré.

Xavier Darcos attache une attention personnelle à la mise en place effective et rapide de ces décisions.

Paris, le 13 juin 2008

On notera [2] que la lettre de Xavier Darcos à la présidente de la Peep comportait une annonce qui n’a pas été reprise dans le communiqué précédent :

« Un arrêté précisera ces évolutions ainsi que l’interdiction de collecter une quelconque donnée relative à la nationalité et l’origine raciale ou ethnique des élèves et de leurs parents ou responsables. »

L’évocation d’un “arrêté” figurait d’ailleurs également dans cette dépêche AFP datant de la veille :

La "base élèves" du primaire à nouveau expurgée de données personnelles

[Référence : AFP 12 juin 2008 - 19h23 - 20h27]

Le ministre de l’Education Xavier Darcos a décidé jeudi d’expurger la "base élèves", une base de données informatiques de l’école primaire fortement contestée, de certaines données à caractère social, familial et scolaire, après avoir déjà fait supprimer les critères ethniques.

Dans un courrier de jeudi adressé à la fédération de parents d’élèves PEEP, dont l’AFP a obtenu copie, M. Darcos assure que "la nouvelle version de cet outil ne fera plus apparaître la profession et la catégorie sociale des parents, ni la situation familiale de l’élève, ni l’absentéisme signalé pas plus que les données relatives aux besoins éducatifs particuliers".

"Les données liées à la scolarité de l’élève ne porteront que sur des champs restreints : dates d’inscription, d’admission et de radiation, classe", ajoute-t-il.

"Les activités périscolaires mentionnées ne figureront qu’aux seules fins de bonne gestion de ces services par les mairies concernées : garderie, études surveillées et accompagnement scolaire, restaurant et transport scolaires", poursuit le ministre.

"Par ailleurs, la durée de conservation des données sera limitée à la scolarité de l’élève dans le 1er degré" (écoles maternelle et élémentaire), précise-t-il.

Ces "évolutions" seront précisées dans "un arrêté", ajoute le ministre en assurant "attacher une attention personnelle à la mise en place effective et rapide de ces décisions".

Dans sa lettre, M. Darcos dit répondre à un courrier du 9 juin dans lequel la PEEP faisait part des "nombreuses interrogations" que suscitait auprès des parents d’élèves "la nature des informations collectées" dans la base.

Celle-ci est un fichier de données informatique rempli par les directeurs d’écoles lors de l’inscription des enfants. Il sert comme logiciel d’aide à la gestion des élèves, au suivi des parcours scolaires et au pilotage académique et national. Il est expérimenté depuis 2005 et doit être généralisé en 2009.

Plusieurs associations, dont la Ligue des droits de l’homme (LDH), des syndicats d’enseignants et la FCPE (parents d’élèves) ont dénoncé son caractère intrusif et la possible utilisation de données à des fins policières, notamment concernant les sans-papiers.

A la suite de protestations, les références à "la nationalité, la date d’entrée sur le territoire, la langue parlée à la maison et la culture d’origine" des élèves avaient déjà été supprimées. Le ministère avait envoyé en octobre 2007 une note en ce sens aux directeurs d’écoles.

Cette fois, M. Darcos assure que l’arrêté, outre les nouvelles suppressions de données, "précisera" aussi "l’interdiction de collecter une quelconque donnée relative à la nationalité et l’origine raciale ou ethnique des élèves et de leurs parents ou responsables".

"L’arrêté en cours de rédaction" a en effet "une valeur normative plus forte" que les notes adressées jusqu’alors aux directeurs d’école, a précisé à l’AFP jeudi soir le ministère de l’Education.

Par ailleurs, "il n’y aura pas d’utilisation" des données qui ont pu éventuellement être collectées jusqu’alors et qui font partie des catégories de questions devant être supprimées, a-t-on assuré.

A côté de plusieurs réformes éducatives en cours, la "base élèves" fait partie des raisons pour lesquelles des parents comptent dormir dans l’école de leurs enfants, lors de la "nuit des écoles" organisée de vendredi à samedi.

_______________________


Terminons par l’exemple très instructif de ce qui s’est passé en Aveyron ces derniers jours. Le 3 juin dernier, l’inspecteur d’académie informe la CAPD [3] que le Recteur a enjoint le département de parvenir à 100% d’écoles utilisant Base Elèves d’ici décembre 2008. Pour cela, l’inspecteur d’académie annonce que de nouveaux temps de formation obligatoire seront programmés et il souligne que les refus de participation aux stages et de saisie des informations pourraient se voir sanctionner du retrait d’1/30ème
 [4].

Voici la lettre qu’il a adressée le même jour aux directeurs d’école [5].

Rodez, le 3 Juin 2008

L’inspecteur d’académie

à

Mesdames et Messieurs
Les Directrices et Directeurs d’école
S/c de Mesdames et Messieurs les Inspecteurs de l’Education nationale

Objet :Base élèves 1er degré.

J’attire votre attention sur « Base élèves 1er degré » qui a fait l’objet d’une déclaration à la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL) conformément aux dispositions de la loi du 06.08.2004. Cette application a donc [6] un caractère obligatoire de mise en œuvre par les directeurs d’école.

En conséquence, les directeurs d’école qui refuseraient d’utiliser la base élèves encourent des sanctions ainsi que des retenues sur salaire pour non exécution du service. Cette procédure s’appliquera également au refus de participer à une formation.

A cet égard, je rappelle à tous les directeurs d’école qui ont bénéficié de la formation qu’ils doivent saisir les données relatives aux enfants scolarisés dans leur école.

De même, l’inscription d’un enfant dans la base élèves ne dépend donc pas du choix des parents : elle est obligatoire.

Les parents peuvent, comme pour tout fichier informatique, demander communication des informations concernant leur enfant et exercer, le cas échant, leur droit de rectification.

La CNIL a publié le 10 avril 2008 « Base élèves 1er degré : mode d’emploi » qui, d’une part, clarifie l’utilisation et le fonctionnement de ce fichier et, d’autre part, réaffirme l’obligation des parents d’accepter que les informations concernant leur enfant soient saisis dans cette base.

Vous trouverez en pièce jointe ce document. [7]

Par ailleurs, je vous précise que les objectifs de déploiement de base élèves prévoient un taux de couverture à 100% pour la fin de l’année civile. 202 écoles ont aujourd’hui mis en œuvre Base élèves 1er degré. Le déploiement total se fera à la faveur de 9 sessions de formateurs qui se dérouleront de septembre à novembre 2008.

Je sais pouvoir compter sur votre sens des responsabilités et vous remercie tout particulièrement de votre investissement dans la mise en œuvre de cette application.

Tout commentaire est superflu.

P.-S.

Quelques heures avant que la décision du ministre ne soit rendue publique, France culture consacrait à Base élèves l’émission Du grain à moudre de Julie Clarini et Brice Couturier du jeudi 12 juin
de 17h à 17h55 [Pour réécouter l’émission : http://www.radiofrance.fr/chaines/f....]
 :

L’éducation nationale a-t-elle besoin de ficher ses élèves ?

On a beau savoir qu’ainsi va le progrès, que nous toujours plus fichés, toujours plus surveillés, repérés dans nos faits et gestes, l’idée que l’Education Nationale ait tenté elle-aussi de mettre nos enfants en fiche ne laisse pas de nous interroger. Car même si des garanties ont été exigées par la CNIL ces derniers mois, il aura bien fallu la mobilisation des parents et des enseignants pour nous avertir que ce nouvel outil de gestion possédait des caractéristiques inquiétantes. [...]
Reste pour nous l’interrogation sur l’absence de scrupules sinon l’aisance avec laquelle l’administration publique manie ces outils de gestion et de statistiques qui sont aussi potentiellement des instruments de contrôle. L’Education nationale ne vient-elle pas de retirer, encore très récemment, des questionnaires adressés aux enfants de CM2 où on leur demandait la langue parlée à la maison, le lieu de naissance des parents et l’ennui éprouvé en classe ? L’amour des statistiques, le souci d’améliorer l’offre éducative en fonction des publics, suffisent-ils à justifier ces enquêtes ?

Invités :
Pierre-Laurent Simoni. Adjoint au Directeur Général de l’Enseignement Scolaire
Christiane Alain. Secrétaire Général de la FCPE
Sophie Vulliet-Tavernier. Directrice des affaires juridiques de la CNIL
Françoise Dumont. Secrétaire générale adjointe de LDH

___________________________

Compléments à lire sur Rue89 : le naufrage de base élèves, et sur Politis : Base Elèves c’est (presque) fini.

Notes

[1La lettre que le ministre a adressée à la présidente de la PEEP : http://media.education.gouv.fr/file....

[2Cette note a été ajoutée le 16 juillet 2008.

[3Commission Administrative Paritaire Départementale.

[4Extrait du CR fait par SNUipp12 :
http://12.snuipp.fr/spip.php?article495.

[5La version pdf de cette note : http://www.ldh-toulon.net/IMG/pdf/l....

Nous avons pris la liberté de souligner en rouge quelques mots de cette note.

[6 ?

[7Note de LDH-Toulon : voici le document en question.


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