une quinzaine de directeurs d’écoles d’Ille-et-Vilaine au palmarès 2006 des BBA


article de la rubrique Big Brother > base élèves
date de publication : dimanche 21 janvier 2007
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Le palmarès 2006 des Big Brother Awards France a été publié le 20 janvier 2007. Le jury a attribué le prix Voltaire de la vigilance aux directeurs d’écoles d’Ille-et-Vilaine qui ont refusé de renseigner le fichier Base-élèves, voué à ficher tous les enfants du primaire.


Base-élèves est actuellement testé dans certaines académies mais devrait être prochainement généralisé à la France entière.

Ces responsables ont notamment répondu à l’appel du syndicat SNUIPP-FSU [1], qui a protesté récemment dans une lettre au ministre contre les faibles garanties de ce dispositif national face aux risques de dérives.

D’après le SNUIPP d’Ille-et-Vilaine, « L’inspecteur d’académie du département les menace de suspension totale du traitement et de destitution de la fonction de direction. La gravité de la menace en dit long sur les enjeux de Base-élèves dans le contexte politique actuel. Une mobilisation intersyndicale est en cours dans les départements déjà concernés par l’expérimentation. Il importe que l’information circule pour une mobilisation avant la généralisation du projet prévue sur 3 ans. »

Les lauréats des Orwell 2006

  1. Orwell Etat & élus : Jacques Lebrot, sous-préfet "sécurité" de Seine-St-Denis, qui s’est distingué ces dernières années en privant d’emploi plusieurs milliers de salariés sur la foi de fichiers policiers recensant, non pas les délinquants avérés, mais de simples suspects, violant leur présomption d’innocence sur la base de pratiques clairement discriminatoires, l’a emporté d’une courte tête devant son ministre de tutelle, Nicolas Sarkozy, qui avait été exclu de la compétition. Gilles de Robien, ministre de l’éducation nationale, est arrivé en troisième position avec son fichier "base élèves" compilant une foultitude de données personnelles concernant les élèves de la maternelle à la primaire (3 à 10 ans !).
  2. Orwell Entreprises : la société Sony-BMG s’est particulièrement illustrée en raison de son "rootkit", petit programme espion qu’elle avait installée dans les CD qu’elle vendait dans le commerce afin de contrôler l’usage qui pourrait en être fait par ceux-là même qui, pourtant, en était devenu les légitimes propriétaires puisqu’ils les avaient acheté. La deuxième place est revenue au duo Sacem & SCPP, sociétés civiles censées défendre les droits des auteurs et producteurs et qui, pour cela, ont fiché nombre d’internautes en violation de la loi. Eternel outsider, le GIP-DMP, en charge du déploiement du Dossier Médical Personnel (ex "Partagé"), est arrivé bon troisième. Gageons que son tour, lui aussi, viendra.
  3. Orwell Localités : Paul Anselin, maire de Ploërmel dans le Morbihan, pour sa soif de vidéosurveillance (bientôt plus de 50 caméras pour 9000 habitants) malgré une délinquance zéro, ainsi que pour la création d’un n° vert visant à encourager la délation. Suivent, ex aequo, le Conseil général de Haute-Savoie, qui a installé des systèmes de vidéosurveillance dans 10 des 48 collèges du département, mais omis de les déclarer, et François Baroin, futur ex-ministre de l’intérieur, pour sa politique de nettoyage du centre ville de Troyes, dont il est le maire, par voie de "requalification urbaine" et de vidéosurveillance.
  4. Orwell Novlang : Frédéric Péchenard, directeur de la Police Judiciaire, qui encourage le fichage génétique de l’ensemble de la population au prétexte que les innocents pourront, dès lors, "être lavés de tout soupçon"... Suivent l’Assedic et ANPE, pour le tri informatique des chômeurs de longue durée qu’ils ont entamé, alors même qu’il n’est fiable qu’à 60% et qu’il risque surtout d’enfoncer les plus précaires. 3e et bons derniers, Sophie Planté et Philippe Melchior, du ministère de l’intérieur, qui expliquent que les papiers d’identité électroniques “sécurisés“, biométriques et dotés de puces RFId ne sont pas un outil au service de la police, mais qu’ils serviront d’abord et avant tout à... faciliter le commerce électronique.
  5. Orwell Ensemble de son Oeuvre : Pascal Clément, garde des Sceaux, avait déjà été nominé pour avoir imposé rétroactivement le bracelet GPS aux délinquants sexuels après leur libération, au mépris de la Constitution, et primé en 2004 pour s’être précisément fait l’ardent promoteur dudit bracelet électronique, a remporté le prix Orwell pour l’ensemble de son oeuvre en raison de son acharnement à vouloir contrôler et enfermer, et pour son mépris des institutions et des droits de l’homme. Il devance de peu la RATP, pour son désormais célèbre pass Navigo, et la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale accusée de ficher, en toute illégalité, des millions de gens depuis des années : si JUDEX (2,8M de simples "suspects") vient d’être légalisé... 20 ans après sa création, le fichier des personnes nées à l’étranger (7M de fichés) et le FAR, qui sert à évaluer la dangerosité de la population (60M de fichés !) sont toujours illégaux.
  6. Prix Voltaire de la vigilance : ont été primés, ex-aequo, les directeurs d’école qui refusent le fichier Base-élèves, et Pierre Muller, le webmaster de Ordinateurs-de-vote.org, pour son constant travail d’éveil et de recensement de tout ce pour quoi le vote électronique est une fausse bonne idée, et une menace pour la démocratie.

Nicolas Sarkozy, multirécidiviste des atteintes à la vie privée, avait été exclu de la compétition

Seule personnalité à avoir été nominée 6 fois aux Big Brother Awards France -dont c’est la septième édition-, Nicolas Sarkozy, à qui 3 prix Orwell avaient été décernés ces 3 dernières années avait été exclu de la compétition.

En 2002, sa toute première nomination l’était déjà pour... l’ensemble de son oeuvre. Signe de la gravité de son cas, il n’en avait pas moins été classé "hors compétition", pour "dopage et exhibitionnisme"à l’unanimité du jury, jury qui, de façon prémonitoire, notait alors qu’"un peu de persévérance lui donne sa chance pour les prochaines éditions".

En 2003, il avait été nominé... deux fois. D’abord pour sa loi sur la sécurité intérieure (LSI), ensuite pour sa loi Perben II, ce qui lui avait d’ailleurs valu le prix Orwell Etat & Elus.

En 2004, il avait encore gagné, toujours avec Dominique Perben, assisté cette fois de l’ancien ministre socialiste Daniel Vaillant, le prix Orwell pour l’ensemble de son oeuvre en raison du FNAEG, fichier génétique initialement conçu pour les délinquants sexuels, et qu’il avait étendu à quasiment tous les mis en examen, qu’ils soient simples suspects, mineurs, et y compris en cas de relaxe ou d’acquittement.

En 2005, il avait, une fois encore, remporté le prix Orwell pour l’ensemble de son oeuvre, à cause de sa loi antiterroriste, parce que l’état d’exception devenait la règle et qu’il étendait considérablement les moyens de surveillance (audio, vidéo, par internet et par recoupement de fichiers, notamment privés).

En 2006, il était nominé en raison de son projet de loi de prévention de la délinquance (PLPD), qui encourage la délation et le fichage des enfants et des familles précaires, mais aussi le fichier ELOI, qui recense les personnes aidant des étrangers sans-papiers.

Cette année, le jury a décidé en délibération de l’exclure à nouveau pour "racolage actif et passif, exhibitionnisme et outrage à magistrat", pour avoir revendiqué de multiples atteintes à la vie privée, et pour avoir activement promu la surveillance en général, et le fichage en particulier.

Notes

[1Syndicat National Unitaire des Instituteurs, Professeurs des écoles et PEGC, affilié à la FSU :
http://www.snuipp.fr/spip.php?artic...


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