un rêve de Nicolas Sarkozy : sécuriser le TER avec le TASER


article de la rubrique justice - police > police
date de publication : dimanche 11 juin 2006
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Le TASER X26 est-il une arme non létale
 [*] ?
Nos cousins d’Acadie se posent également la question [1].

MM. Sarkozy et Clément, eux, ne se posent plus la question : une dépêche AFP nous apprend que les ministères de l’Intérieur et de la Justice ont lancé deux appels d’offres pour l’achat de plusieurs milliers de pistolets TASER [2].

[Première mise en ligne, le 19 janvier 2006,
mise à jour le 11 juin 2006.]

à 7h51, Sarkozy monte dans le TER 17430 à destination de Marseille (© Felix Golesi/AFP)

Lundi 16 janvier 22006, le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, prend place à Toulon dans le TER 17430, pour lancer sa police ferroviaire depuis ce train, théâtre le 1er janvier d’incidents qui avaient suscité une vive émotion en France.
Les 2 450 policiers et gendarmes qui la composeront, ne seront "pas sur les quais, mais dans les trains, au plus proche des usagers", a expliqué Nicolas Sarkozy.

"Le rôle d’un ministre de l’Intérieur, c’est de s’occuper de la vie quotidienne", affirme-t-il devant des usagers surpris de le voir débarquer dans leur train dès potron-minet.
"Je souhaite que chacun puisse se dire quand lui ou un membre de sa famille prend le train, qu’il le fait en toute sécurité".

"Vous n’avez pas de craintes dans ce train ?" demande-t-il. "Aujourd’hui ça va", répond une voyageuse, mi-figue mi-raisin.
Et les services de sécurité ? "On les voit jamais". - "Je viens justement pour ça. [...] Franchement, je vous assure que vous allez les voir. Il faut que les voyous sachent qu’il y a un risque. Parce que le problème, c’est qu’ils pensaient qu’il n’y avait pas de risque", répond le ministre.

Il s’avoue également "très tenté par un essai de vidéosurveillance à l’intérieur d’un train d’une ligne exposée à la violence".

Le ministre compte aussi "renforcer les possibilités juridiques des agents de sécurité de la SNCF pour qu’ils puissent verbaliser et relever tous les délits" [3]
et "renforcer leur possibilité d’armement avec notamment des armes non létales", comme le pistolet à impulsion électrique Taser, "de façon à ce qu’ils puissent mieux assurer leur sécurité".

Pistoler Taser X26

Les malfrats n’ont qu’à bien se tenir... Tout droit sorti d’un véritable James Bond, voici le Taser X26. Un pistolet (EMD, Electro Muscular Disruption) mis au point par TASER International, le leader du marché des armes moins meurtrières perfectionnées. Le X26 tire jusqu’à 6 mètres de distance deux dards de 5 mm, qui s’accrochent sur les vêtements envoyant une impulsion électrique.

La décharge neutralise alors pendant un bref instant la communication entre le cerveau et les muscles. La personne atteinte est du coup incapable de coordonner ses mouvements et tombe à terre. Les forces de l’ordre n’ont plus qu’à cueillir leur suspect sans qu’il y ait de blessé, selon les concepteurs. Le X26 devrait être commercialisé aux services de police, et agences privées de sécurité aux alentours de 750 euros.

une arme non létale ?

ÉTATS-UNIS - La police et les pistolets paralysants

Un document d’AMNESTY INTERNATIONAL
Index AI : AMR 51/139/2004 (décembre 2004) [4]

Aux États-Unis, plus de 5000 services chargés du maintien de l’ordre utilisent actuellement des pistolets Taser. Ces armes de poing peuvent projeter à quelque six mètres de distance deux aiguilles reliées à des fils électriques. La personne touchée subit pendant cinq secondes une décharge électrique de 50 000 volts qui la paralyse instantanément. Ces pistolets paralysants peuvent également être utilisés à bout portant, « par contact ».

L’usage de ces armes, introduites dans les années 1970, a considérablement progressé au cours des quatre dernières années avec la mise sur le marché des « pistolets paralysants évolués » M26 et X26, beaucoup plus puissants que les anciens modèles. Outre la police et l’administration pénitentiaire, l’armée américaine les utilise en Irak ; des particuliers en ont fait l’acquisition et elles sont aussi en service ou à l’essai dans un certain nombre de pays.

Les services de police qui font usage des pistolets paralysants affirment que cette alternative aux armes à feu et aux matraques permet de réduire les blessures infligées et de sauver des vies. Toutefois, les recherches effectuées par Amnesty International démontrent que ces pistolets sont utilisés dans des circonstances qui ne justifient ni le recours à la force meurtrière, ni même l’utilisation de matraques.

Par ailleurs, l’organisation est préoccupée par le nombre croissant de décès liés à l’utilisation de ces armes par la police. Au cours des trois dernières années, plus de 70 personnes seraient mortes aux États-Unis et au Canada après avoir été atteintes par des pistolets incapacitants M26 ou X26 ; le nombre de victimes augmente chaque année. Les coroners attribuent généralement le décès à d’autres causes, comme la prise de drogue, mais des experts médicaux estiment que l’utilisation de ces armes peut accroître le risque de crise cardiaque pour les personnes agitées, droguées ou présentant des problèmes de santé. Dans au moins cinq cas récents, les coroners ont conclu que l’utilisation d’un pistolet incapacitant avait directement entraîné la mort de la victime, conjointement avec d’autres facteurs comme la toxicomanie ou les maladies cardiaques. Ainsi que nous l’indiquons dans le présent rapport, l’augmentation du nombre de décès renforce les préoccupations d’Amnesty International quant à la sécurité des pistolets paralysants et à l’absence d’examen rigoureux et indépendant de leurs effets médicaux.

Outre les inquiétudes relatives à la santé, les armes qui envoient des décharges électriques peuvent donner lieu à des abus car elles sont portables et faciles à utiliser ; il suffit de pousser un bouton pour infliger une forte douleur sans laisser de marques importantes. Malgré ces risques, l’utilisation des pistolets paralysants n’a pratiquement pas fait l’objet d’enquêtes indépendantes aux États-Unis ni de normes ou de directives régissant leur emploi. Dans la pratique, les recherches d’Amnesty International ont révélé que de nombreux services de police utilisaient habituellement ces armes pour maîtriser des individus non armés qui opposent une résistance sans représenter un véritable danger pour eux-mêmes ni pour autrui.

Comme le démontrent les cas exposés dans le présent rapport, des policiers ont utilisé des pistolets incapacitants contre des écoliers indisciplinés, des individus souffrant de troubles mentaux, ou encore ivres et agités, mais qui ne mettaient aucune vie en danger, des personnes âgées, des suspects non armés qui s’enfuyaient après avoir commis un délit mineur. Des personnes qui avaient une altercation avec des policiers ou refusaient d’obtempérer immédiatement ont également subi l’usage de ces armes. Dans la plupart des cas, les victimes ont reçu de multiples décharges, parfois alors qu’elles étaient entravées.

P.-S.

Une campagne vient d’être lancée par l’association RAIDH (Réseau d’Alerte et d’Intervention pour les Droits
de l’Homme) pour demander l’interdiction du TASER sur le territoire français.
Vous pourrez vous y associer en signant leur pétition.

Notes

[*Arme létale : arme risquant d’entraîner la mort.
[Question : existe-t-il des armes non létales ?]

[1« 
Une enquête aura aussi lieu concernant la mort de Kevin Geldart, un homme de 34 ans de Riverview. Geldart est décédé après que des agents de la GRC [Gendarmerie royale du Canada] ont utilisé un fusil « Taser » sur lui. »
Voir : Trois enquêtes du coroner au Nouveau-Brunswick par Sophie Cormier - 18 mai 2006 http://www.cjse.ca/cjse/detail.cfm?....

[2France : appels d’offres du gouvernement pour un pistolet paralysant

Les ministères de l’Intérieur et de la Justice viennent de lancer deux appels d’offres pour l’achat de plusieurs milliers de pistolets paralysants à impulsions électriques, a-t-on appris sur les sites spécialisés de marchés publics.

Le premier marché concerne la "fourniture de pistolets à impulsions électriques (PIE), de leurs cartouches, de leurs étuis de port et de leurs accessoires destinées aux services de police et de gendarmerie" pour un volume "de 1.500 à 6.000" PIE.

Le second appel d’offres, lancé par le ministère de la Justice, pour l’Administration pénitentiaire, "a pour objet l’achat de 83 PIE comprenant pour chaque pistolet deux cartouches".

Le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy s’est prononcé à plusieurs reprises pour une large dotation des forces de l’ordre en Taser X26, pistolet paralysant non létal, qui maîtrise la personne touchée en lui ôtant tout contrôle de ses muscles avec une décharge électrique.
Plusieurs unités (GIPN, GIGN, Raid, Bac) sont déjà dotées de deux cents Taser, une arme dont le fabricant américain est en situation de quasi-monopole et qui équipe 5.000 services de police américains.
Selon le fabricant, cette arme a permis, là où elle est utilisée, de réduire de 67% les blessures aux suspects et de 82% celles aux policiers. Quand un tir avec une arme classique fait mouche six fois sur dix, le Taser, utilisé par une cinquantaine de polices dans le monde, atteint sa cible presque à coup sûr (94,7 %) grâce à son système de visée par laser.
Efficace jusqu’à 6,50 mètres, le Taser envoie deux dards sur le suspect, lui administrant une décharge de 50.000 volts qui agit sur son système nerveux et le tétanise quelques secondes. Il ne souffre ensuite d’aucun effet secondaire, assure-t-on.
Les syndicats de police sont favorables au Taser "arme anti-bavure", selon le syndicat des commissaires et des hauts fonctionnaires de la police nationale (SCHFPN). Des organisations de défense des droits de l’Homme ont émis des réserves, comme Amnesty International, qui a demandé une étude indépendante sur ses effets.
Par ailleurs, 160 pistolets Taser devraient être livrés prochainement aux commandos de la Marine nationale.

[Source : AFP - Paris - jeudi 18 mai 2006, repris dans
http://www.cyberpresse.ca/article/20060518/CPACTUALITES/605180959/5024/CPDMINUTE]

[3Aux yeux de M. Sarkozy, l’extension de cette police permettra de renforcer la "lutte contre l’immigration irrégulière" : sur un millier de contrôles depuis le début de l’année dans les trains près de Marseille, 57 ont révélé des infractions dont plusieurs "défauts de visas".


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