vers une relance de la loi de prévention de la délinquance


article de la rubrique Big Brother > loi de “prévention” de la délinquance
date de publication : mardi 29 septembre 2009
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Depuis quelques mois, le gouvernement, s’appuyant sur des statistiques contestables, insiste sur une augmentation récente de la délinquance. Il s’agit sans doute de nous préparer à une relance de la loi dite de prévention de la délinquance. En effet, en juin dernier, Nicolas Sarkozy avait annoncé « pour septembre un plan gouvernemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes ». Il considère en effet que « la prévention de la délinquance a été beaucoup trop négligée ces dernières années » [1].

Le fait est que l’application de la loi de prévention de la délinquance se solde aujourd’hui par un échec relatif. Mais, à en juger par la nomination d’un Monsieur Prévention de la délinquance dans le département du Loir-et-Cher, on constate que le gouvernement n’a pas renoncé à ses projets sécuritaires.


2 septembre 2009, Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur/ AFP/ B.Guay

Un Monsieur Prévention de la délinquance dans le Loir et Cher [2]

Le 4 septembre 2009, le préfet, le président du conseil général et le président de l’association des maires du Loir-et-Cher ont signé, en présence de la procureure de la République, une convention instaurant un coordinateur départemental de prévention de la délinquance
 [3]. Le premier titulaire du poste, Michel Coutant, 54 ans, ancien policier, chef de circonscription au commissariat de police de Vendôme et directeur de la sécurité à Blois, a pour fonction d’aider les communes à appliquer la loi relative à la prévention de la délinquance du 5 mars 2007.

D’après la directrice de l’Association des maires de Loir-et-Cher, Michel Coutant sera « un relais entre les maires, la police, la préfecture et le parquet. » Son plan d’attaque en cinq groupes de travail :

  • vidéoprotection dans les communes
  • plans anti-intrusion dans les collèges avec éventuellement un système de caméras et d’alarmes à l’entrée des établissements
  • participation citoyenne avec la création d’un réseau de voisins pour prévenir la délinquance et l’isolement social
  • réorientation des gens du voyage vers des zones attribuées
  • lutte contre les violences familiales.

L’idée est de Michel Coutant en personne : « A Blois, je travaillais sur les problèmes de délinquance. Je me suis aperçu que cela ne concernait pas que la ville mais tout le département. J’ai proposé mon idée en janvier ». Rapidement soutenue par l’Etat dans le cadre du plan de relance de la loi de prévention de la délinquance, dont le contenu est attendu dans les semaines à venir, elle a été validée par le Comité interministériel de prévention de la délinquance.

Hostilité des syndicats

Pour Alain Borg, secrétaire général de l’Union départementale de la CGT Loir-et-Cher, « c’est un coup médiatique, de la poudre aux yeux, du baratin. Ce n’est pas comme cela qu’on va régler les problèmes de crise et d’exclusion. [...] La délinquance est la conséquence d’une politique de casse de l’emploi, de casse des services publics y compris ceux de la sécurité et de casse de l’Education nationale. »

A la Fédération nationale SUD Santé-Sociaux, la secrétaire, Fabienne Binot, pointe le choix du responsable : « En mettant quelqu’un de la police, on est déjà dans la répression. [...] On ne prend la prévention que sous son aspect répressif. Je trouve cela dangereux qu’on investisse tant d’argent dedans et rien sur la politique de la jeunesse, de l’éducation, de la vie associative, de la prise en charge du social. »

Plus inquiétant pour Fabienne Binot, la relance de la loi de prévention de la délinquance :
« Si les messieurs Délinquance apparaissent sur tout le territoire, nous allons certainement reformer le Collectif national unitaire » créé en 2006 par SUD Santé-Sociaux avec d’autres partenaires sociaux et syndicaux, et d’évoquer la réactivation d’une «  résistance collective. »

La loi de prévention de la délinquance en échec

par Luc Bronner, Le Monde du 1er septembre 2009


C’était une des lois phares de Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur. La loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance, vivement contestée par la gauche et les organisations de travailleurs sociaux, était censée faire des maires les « pivots » des politiques de sécurité.

Le futur chef de l’Etat avait alors expliqué, en défendant son projet, que le texte devait permettre d’apporter de « nouvelles méthodes » de travail et donner « les moyens juridiques qui faisaient défaut » à la lutte préventive contre la délinquance (absentéisme scolaire, rapport avec les familles, etc.).

Deux ans après, le bilan est médiocre, comme a dû le reconnaître Nicolas Sarkozy en demandant au gouvernement de réfléchir, pour ce mois de septembre, à un nouveau « plan gouvernemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes ». Une des mesures-clés, l’installation d’une nouvelle génération de contrats locaux de prévention, pour associer les différents acteurs (police, justice, mairies, etc.), est un échec. Alors qu’ils concernent toutes les villes de plus de 10 000 habitants, ces contrats n’ont été signés que dans 22 villes en 2007, six en 2008 et une seule en 2009. Quant aux « conseils pour les droits et devoirs des familles », censés entendre et aider les familles dont les enfants ont des problèmes de comportement, seule une vingtaine de communes, sur 36 000, l’ont mis en place avant l’été.

Un rapport d’évaluation, réalisé en mars par le conseil national des villes (CNV), instance placée auprès du premier ministre, a dressé un bilan encore plus sévère. Dans son avis, le conseil, composé d’élus de droite et de gauche, a conclu à « l’absence quasi systématique de mise en oeuvre de la loi de mars 2007 ». Les nouveaux conseils locaux n’ont pas rencontré le succès escompté – généralement parce qu’ils existaient déjà sous d’autres formes. Quant aux dispositions sur l’absentéisme scolaire, elles sont restées inappliquées à cause d’un « système trop compliqué et lourd ». Le CNV regrette enfin que les fonds de prévention aient surtout servi à financer la vidéosurveillance.

Luc Bronner


Notes

[1Voir cette page.

[3Voir sur le site de la préfecture du Loir-et-Cher : http://www.loir-et-cher.pref.gouv.f....


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