la section de Toulon de la LDH s’adresse aux maires de la communauté d’agglomération TPM


article de la rubrique Big Brother > loi de “prévention” de la délinquance
date de publication : lundi 22 janvier 2007
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Nous voulons attirer leur attention sur le projet de loi dit de prévention de la délinquance, actuellement examiné au Parlement, qui risque d’altérer profondément les relations qui existent entre les maires et leurs administrés.

En effet, l’article 1er du texte prévoit de faire du maire le pivot de ce dispositif. A ce titre, de nouveaux pouvoirs de contrôle et de sanction lui seraient attribuées. Par ailleurs, le maire serait en droit d’exiger des travailleurs sociaux et personnels de santé qu’ils lui confient, à propos des familles connaissant des difficultés, des informations relevant du secret professionnel. Tôt ou tard, le maire risque de se retrouver tenu responsable de tout. Ecartelé entre la défiance de ceux des électeurs qui rejetteront ce nouveau rôle de « shérif » et le désir de certains autres d’un ordre toujours plus « efficace », il lui serait de plus en plus difficile d’être tout simplement maire.

Malheureusement, comme vous pourrez le constater ci-dessous, aucun maire n’a répondu à notre demande.

[Première mise en ligne, le 8 octobre 2006,
complétée par un communiqué, le 23 janvier 2007]

Madame/Monsieur le Maire,

Toulon, le 8 octobre 2006

Le gouvernement présente au Parlement, cet automne, un projet de loi « pour la prévention de la délinquance ». Vous n’êtes pas sans savoir que ce texte est très controversé et inquiète de nombreuses organisations de la société civile, dont la Ligue des Droits de l’Homme.

Il prévoit notamment de donner de très importants pouvoirs aux maires, sur le plan du contrôle et de la répression de la population.
Le projet place les maires au centre des nouveaux dispositifs de repérage, fichage et lutte contre la délinquance, pouvant lui permettre d’accéder à des informations aujourd’hui confidentielles.

  • Le maire, en effet coordonnera toute la politique de fichage mise en place par la loi.
  • C’est le maire qui sanctionnera les familles en cas de non respect du contrat de responsabilité parentale mis en place par la loi.
  • Le maire saisira le conseil général pour faire suspendre le paiement des allocations familiales.
  • Il pourra décréter des travaux d’intérêt général pour de simples contraventions.
  • Le maire présidera le conseil des droits et devoirs de la famille, structure municipale devant rappeler aux parents leurs responsabilités et les sanctionner, en cas d’absentéismes scolaires ou de défaut de surveillance de leurs enfants.

Ces dispositions tendent ainsi à confier au maire des prérogatives qui empiètent largement sur les missions actuelles d’autres institutions.
Le maire deviendra en fait le relais nécessaire sur lequel se grefferont l’action de la police et des parquets, dans la logique du traitement pénal d’une délinquance dont il n’est question que d’éliminer les symptômes, et certainement pas la racine.

Vous conviendrez aisément, qu’il s’agit là d’une conception spécieuse de la prévention. La prévention a besoin de temps, de dialogue, de discrétion, de tisser des relations. La répression, quand elle devient une fin en soi, attachée à une culture du résultat à court terme est aux antipodes de cette démarche.

Il faudrait pouvoir débattre de la prévention, mais vous avez sans doute, en homme de terrain, pu apprécier tout ce qu’il était possible d’obtenir avec des actions de prévention bien préparées et menées avec des professionnels.

Il reste que pour le maire, ses nouveaux pouvoirs ne seront pas forcément faciles à assumer : tenu pour responsable de la politique sécuritaire sur sa commune, il lui faudra faire du chiffre, faire face dans les petites communes au risque d’atteinte à la vie privée des usagers, se couper d’une partie de son électorat qui rejettera son rôle de « shérif », et se couper d’une autre partie de son électorat s’il n’obtient pas de bons résultats. Le maire étant bien souvent le seul élu qui inspire confiance aux citoyens, on peut estimer que le projet de loi ternira cette image. Un certain nombre d’élus ont d’ailleurs alerté le gouvernement sur ces risques.

La Ligue des Droits de l’Homme, je ne vous le cache pas, s’inquiète de la restriction des libertés pouvant découler de l’application de cette loi, si elle était votée en l’état.
Nous devrions, avec nos partenaires associatifs et institutionnels, intervenir auprès des media, des autorités judiciaires, politiques et des organes de l’Union Européenne,
pour la sauvegarde des droits élémentaires de certains de nos compatriotes.

Aussi, nous adressons-nous aux Maires des communes de la communauté d’agglomération TPM, afin de mieux connaître leurs réactions face à ce projet, et la manière dont ils comptent mettre en œuvre les nouvelles dispositions les concernant, si la loi était adoptée. Il ne s’agit pas d’un acte de défiance, mais une manière de pratiquer naturellement la démocratie. Nous organiserons, au terme, de cette campagne d’information, une conférence de presse, à laquelle vous serez bien entendu invité(e).

Veuillez agréer, Madame/Monsieur le Maire, l’expression de nos salutations respectueuses.

Pour la section de Toulon de la Ligue des droits de l’Homme
Gilles Desnots, président.

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Communiqué de la section de Toulon de la LDH

Toulon, le 20 janvier 2007

Dans une lettre d’octobre 2006, la section de Toulon de la Ligue des droits de l’Homme demandait aux maires de l’agglomération de TPM de prendre position sur le projet de loi de prévention de la délinquance, actuellement en seconde lecture.

Ce projet de loi, le plus dangereux peut-être du dernier quinquennat, met les maires au centre de nouveaux dispositifs répressifs.

Malheureusement, aucun maire n’a répondu à notre demande : la section de Toulon de la Ligue des droits de l’Homme fait donc part de sa vive déception devant l’absence de dialogue sur un sujet qui préoccupe nombre de nos concitoyens.

Nous restons bien entendu disposés à débattre avec les maires : ce n’est pas en ayant toujours plus recours à la répression que l’on pourra venir à bout de la délinquance, mais en prenant en compte ses causes sociales.


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