projet de loi de prévention de la délinquance, le retour


article de la rubrique Big Brother > loi de “prévention” de la délinquance
date de publication : dimanche 19 novembre 2006
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Le projet de loi sur la prévention de la délinquance a été adopté le 21 septembre par le Sénat dans des termes plus répressifs que le projet initial du gouvernement [1].

Il doit être discuté devant l’Assemblée nationale à partir du 21 novembre.
Le contexte politique et social favorise la surenchère répressive de la droite la plus dure, contestée au sein même de l’UMP. Il remet en cause plusieurs principes de la politique de prévention [2].

La mobilisation pour le retrait du projet n’a jamais cessé. Après la mobilisation du 10 octobre qui a vu plusieurs centaines de personnes se rassembler sur le port de Toulon [3], le Collectif varois de lutte contre la discrimination sociale a organisé une manifestation le samedi après-midi 18 novembre sur la Place d’Armes de Toulon [4].

[Première mise en ligne le 14 nov 06, dernière mise à jour le 20 nov 06]

Examen à l’Assemblée nationale du 21 au 29 novembre - vote le 5 décembre [5]

[AFP - 14 nov 2006 11h02] - Le projet de loi Sarkozy sur la prévention de la délinquance, déjà adopté par les sénateurs et vivement critiqué par la gauche, sera examiné par l’Assemblée du 21 au 29 novembre et soumis au vote le 5 décembre, a-t-on appris mardi à l’issue de la conférence des présidents. [...]

Le projet de loi, contesté par de nombreux syndicats et associations, durcit plusieurs points de l’ordonnance de 1945 sur "l’enfance délinquante".

Il compte parmi ses dispositions phares l’institution de la procédure de "présentation immédiate" des jeunes délinquants devant les magistrats pour mineurs. Elle est destinée à remplacer la procédure de "jugement à délai rapproché", actuellement en vigueur.

Le projet Sarkozy, qui doit être examiné mercredi par la commission des Lois, vise aussi à faire du maire le "pivot" de la politique de prévention.

Un débat est en cours à droite sur la suppression de "l’excuse de minorité" pour faire condamner les multirécidivistes mineurs de plus de 16 ans comme des adultes, et pour introduire dans ce texte des "peines planchers" pour les mineurs multirécidivistes.

Pas de peines plancher et volet santé mentale par ordonnance

[AFP - 14 nov 2006 14h23] - Les députés UMP ont décidé mardi de ne pas présenter d’amendement instaurant des peines plancher dans le cadre du projet de loi de prévention de la délinquance et de permettre au gouvernement de légiférer par ordonnance sur le volet santé mentale du texte, a annoncé leur chef de file, Bernard Accoyer.

Lors de son point de presse hebdomadaire, Bernard Accoyer a expliqué qu’en concertation avec le gouvernement, les députés UMP avaient repoussé l’idée des peines plancher, défendue par le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy, renvoyant cette question au "débat électoral" de 2007.

Toutefois, a-t-il dit, les députés réfléchissent à des amendements sur la "motivation des décisions de justice" afin de prendre en compte des circonstances aggravantes comme la récidive pour les délinquants mineurs.

Le dispositif sera arrêté en fin d’après-midi lors d’une nouvelle réunion des députés UMP sur le texte Sarkozy.

S’agissant du volet santé mentale du texte décrié par les professionnels et des élus, M. Accoyer a expliqué qu’il avait été décidé de permettre au gouvernement de légiférer par ordonnance.

Le groupe UMP a ainsi décidé d’autoriser le gouvernement à présenter dans sa niche (séance dont l’ordre du jour est fixé par un groupe) du 23 novembre un projet de loi relatif "aux professions de santé dans lequel sera introduit un amendement autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnance" sur le volet santé mentale du projet de loi Sarkozy.

Des lois pour la galerie

Le Canard enchaîné, 8 nov 2006

Que faire devant l’échec de la lutte contre l’insécurité ? Chercher à en prévenir les causes ? Revenir sur la suppression de la police de proximité, comme le prône une mission sénatoriale, avec l’approbation des élus UMP ? Donner des moyens à la prévention, qui en manque tant ? Il y a plus simple et moins coûteux, c’est une nouvelle loi ! Et, dans ce registre, Sarkozy et Clément (ministre de la Justice) font assaut d’idées lumineuses.

Le premier s’époumone : « Achetez ma majorité pénale rabaissée à 16 ans ! » Le second vante son nouveau produit, le « délit d’embuscade ». Et, au passage, il critique le premier :
« Abaisser la majorité pénale pose des problèmes constitutionnels. » Exact :
le Conseil constitutionnel a gravé dans le marbre ce principe selon lequel, pour
les mineurs « l’éducatif prime sur le répressif ». Sarko, qui veut faire juger les ados de 16 ans comme des majeurs, risque donc la censure des Sages. Et feint d’oublier que devant les tribunaux et cour d’assises pour enfants il n’est pas rare, déjà, de voir les juges rejeter l’excuse de minorité (qui divise la peine par deux) « en cas de faits graves ».

Ayant osé, pour une fois, contrer le candidat à la présidentielle, Clément a d’ailleurs cité le cas de mineurs durement condamnés. C’est dire. Mais,
avec son « délit d’embuscade », le ministre de la Justice n’est pas en reste.

« Je souhaite que l’on puisse punir les embuscades alors même qu’elles n’ont pas atteint leur but », a-t-il déclaré.
Autrement dit, on créerait ainsi un délit d’intention, caractérisé, selon Clément, par « des jeunes sur un toit, qui, munis de pavés, attendent les policiers ». C’est oublier qu’en droit, sans commencement de passage à l’acte, l’intention n’est pas punissable.

Ainsi, l’achat de poison en vue de supprimer un conjoint, même glissé dans la soupe, ne conduira personne devant les tribunaux si ladite soupe n’a pas été servie. « Evidemment, relève un magistrat, parce que cela obligerait les juges à rechercher l’intention de personnes qui n’ont pas encore agi ! C’est carrément impossible ! »

Clément veut aussi envoyer aux assises les auteurs de violences sur policiers commises avec arme, « en bande organisée ou après un guet-apens », et ayant entraîné huit jours d’arrêt de travail. Aujourd’hui, cela vaut 10 ans de prison, ce qui n’est pas rien.

Demain, avec un article de loi à la sauce Clément, ce serait 15 ans de réclusion criminelle... A défaut d’être capables de juguler la délinquance, Sarko et Clément choisissent de rouler des mécaniques.

Dominique Simonnot

Médecins et psychiatres dénoncent le projet de loi de prévention de la délinquance

par Cécile Prieur, Le Monde daté du 6 octobre 2006

L’ensemble des organisations représentatives de la psychiatrie, associées aux représentants des familles et des patients, a solennellement appelé, mercredi 4 octobre, au retrait des dispositions réformant l’hospitalisation sous contrainte incluses dans le projet de loi de prévention de la délinquance. Les organisations protestataires, qui demandent une audience au président de la République, dénoncent "l’amalgame inacceptable" que ferait le projet de loi entre "maladie mentale et délinquance".

Adopté en première lecture, le 21 septembre, par le Sénat, le texte, élaboré par le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, comporte plusieurs dispositions réformant la loi de 1990 sur l’internement psychiatrique. Le projet étend notamment les prérogatives du maire en matière d’hospitalisation sous contrainte, durcit les conditions de sortie des patients et crée un fichier national des personnes hospitalisées d’office pour cinq ans

"RETOUR EN ARRIÈRE" Pour les intervenants en psychiatrie, l’introduction de dispositions sanitaires dans un texte visant à prévenir la délinquance pose un problème de principe, témoignant d’un "retour en arrière" dans la conception par les pouvoirs publics des questions de santé mentale. "Depuis deux siècles, quand un malade mental commet un crime ou un délit, il est avant tout considéré comme un patient, a expliqué le docteur Olivier Boitard, président du Comité d’action syndical de la psychiatrie. Et voilà que ce texte nous replonge dans la confusion." Les organisations syndicales ont déploré "l’absence préoccupante" du ministre de la santé, Xavier Bertrand, dans ce débat. "Conscients" des problèmes de sécurité auxquels est confrontée la psychiatrie, les professionnels ont rappelé qu’ils réclamaient depuis plusieurs années une révision de la loi de 1990, révision maintes fois reportée par le ministère de la santé.

Les protestations atteignent désormais toute la communauté médicale. L’Intersyndicat national des praticiens hospitaliers et la Coordination des praticiens hospitaliers dénoncent une "régression dans la prise en charge des malades", tandis que le Conseil de l’ordre des médecins estime que le projet de loi entraînerait "une violation grave des droits à la vie privée et à l’intimité des patients".


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