l’UMP ouvre la porte à la création de nouveaux fichiers de police


article communiqué de la LDH  de la rubrique Big Brother > Edvige et Cristina
date de publication : samedi 12 décembre 2009
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L’Assemblée nationale a adopté en première lecture le 2 décembre 2009 la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, dans des conditions qui sont évoquées ci-dessous, mais la loi doit maintenant être examinée au Sénat.

Suite aux amendements Bénisti, le texte comprend une Section 3, "Dispositions relatives à l’informatique, aux fichiers et aux libertés", constituée de 9 articles, de 29 à 29 nonies. L’article 29 bis autorise la création de fichiers de police, y compris de renseignement, par simple arrêté ministériel – une procédure encore plus simple qu’un décret. Un décret en Conseil d’Etat est nécessaire lorsque des données sensibles sont concernées [1].

Le Collectif « Non à EDVIGE », dont la LDH fait partie, avait dénoncé et condamné avec force ce qu’elle qualifie de procédés contraires à un processus démocratique normal.

[Mise en ligne le 26 novembre 2009, mise à jour le 12 décembre]



Communiqué du Collectif « Non à EDVIGE »

Paris le 26 novembre 2009

Fichiers de police : un choix opportuniste et malvenu

La Commission des lois de l’Assemblée nationale avait adopté en mars 2009 à l’unanimité, majorité et opposition réunies, une proposition de loi sur les fichiers de police prévoyant le passage obligé par la loi pour toute création de fichiers de police.

Le collectif « NON A EDVIGE », même s’il émettait des réserves, considérait que cette proposition était une avancée intéressante en matière de fonctionnement démocratique.

Entre temps, contrairement à ce qu’il avait annoncé au plus fort de la mobilisation citoyenne, le gouvernement a choisi d’éviter le débat parlementaire en créant le 18 octobre 2009 par décret deux fichiers en remplacement du défunt décret « EDVIGE 1.0 », retiré par le gouvernement en novembre 2008 suite à la mobilisation citoyenne.

Mise au vote à l’Assemblée le 24 novembre dernier, cette proposition de loi a été repoussée par les députés UMP.

Le matin même et en totale contradiction avec leur vote précédent en Commission des lois, les députés UMP, y compris Jacques-Alain Bénisti pourtant co-signataire de la proposition de loi sur les fichiers de police, ont voté en Commission des amendements à une proposition de loi sur la simplification du droit. Ces amendements autorisent la création de fichiers par simple arrêté gouvernemental, confirmant la volonté de la majorité présidentielle d’enterrer définitivement la promesse de faire passer par la loi la création de tout nouveau fichier de police.

Le Collectif « Non à EDVIGE » dénonce et condamne avec force ces procédés contraires à un processus démocratique normal.

Contact Presse du Collectif : contact@nonaedvige.sgdg.org
http://www.nonaedvige.sgdg.org/

L’UMP ouvre la porte à la création de nouveaux fichiers

par Patrick Roger, Le Monde daté du 26 novembre 2009


La proposition de loi visant à encadrer la création et le fonctionnement des fichiers de police présentée, jeudi 19 novembre, par Delphine Batho (PS, Deux-Sèvres) a été rejetée, mardi 24 novembre, par la majorité de l’Assemblée nationale. Ont aussi été rejetées les deux autres propositions de loi - sur le droit de finir sa vie dans la dignité et sur la régulation de la concentration dans les médias - défendues par le groupe socialiste dans le cadre de sa journée d’initiative parlementaire.

Le texte sur les fichiers de police présentait la particularité d’être issu d’une proposition commune de Mme Batho et de Jacques-Alain Bénisti (UMP, Val-de-Marne), rédigée dans la foulée du retrait des décrets créant le fichier Edvige. Cette proposition avait été adoptée, le 16 juin, à l’unanimité de la commission des lois de l’Assemblée. Selon celle-ci, l’autorisation de créer des fichiers intéressant la sécurité publique ou ayant pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales devait relever de la loi. Elle détaillait précisément les points sur lesquels le législateur devrait statuer, les caractéristiques des fichiers qui devraient être déterminées.

Un recul

C’est ce qu’a rappelé Mme Batho, mardi, avant le vote qui devait aboutir au rejet de la proposition. "Nous étions tous d’accord, a-t-elle souligné, pour refondre entièrement le cadre juridique des fichiers de police, [...] améliorer la protection des citoyens et [...] moderniser les outils dont disposent les policiers."

"Tous d’accord", avant que le gouvernement ne publie, le 18 octobre, deux décrets autorisant la création de deux fichiers "post-Edvige" sur des délinquants potentiels "susceptibles d’être impliqués dans des actions de violences collectives" ou "dont l’activité indique qu’elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique" (Le Monde du 20 octobre). Ainsi a été balayé par le gouvernement le travail des parlementaires de la majorité et de l’opposition.

Dès lors, le gouvernement ne souhaitait plus que la proposition de loi voie le jour. Mais ce qui aurait pu n’être qu’un épisode de plus dans l’opposition de l’exécutif et du législatif prend une tout autre tournure après ce qui s’est passé, mardi, en commission des lois. En effet, si l’UMP a refusé de voter la proposition de loi coécrite par un de ses membres, elle a en revanche approuvé une série d’amendements déposés sur le même sujet par... M. Bénisti à une proposition de loi dite "de simplification et d’amélioration de la qualité du droit" qui doit être examinée mardi 1er décembre en séance.

Des amendements en totale contradiction avec la proposition de loi initiale puisqu’ils autorisent la création de fichiers par simple arrêté gouvernemental et énumèrent de façon extrêmement large, et générale, les catégories et les finalités de fichiers pouvant être créés. Loin de "préciser" la loi, ils constituent en ce sens un recul par rapport au droit existant. "Ces amendements venus d’ailleurs sont une sorte de blanc-seing donné au gouvernement pour passer par la voie réglementaire", s’insurge Mme Batho.

Patrick Roger


Jacques-Alain Bénisti (photo : Assemblée nationale)

Un amendement Bénisti

Un amendement [2] présenté par M. Jacques-Alain Bénisti et adopté par la Commission des lois de l’Assemblée nationale prévoit de réécrire l’article 26 de la loi du 6 janvier 1978 afin que les traitements intéressant la sécurité publique puissent être créés par simple voie réglementaire lorsqu’ils correspondent à l’une des finalités suivantes :

faciliter les rapprochements entre infractions, la recherche et l’identification d’éléments biométriques et biologiques, ou de personnes et d’objets “signalés“, la constatation des infractions, la diffusion et le partage des informations entre services de police judiciaire, la centralisation des informations relatives à la prévention des atteintes à la sécurité publique, la gestion administrative et la transmission des décisions de justice, le contrôle d’accès à certains lieux, le recensement des personnes fichées, ainsi que l’alimentation automatique de certains fichiers…

Source :
Fichiers policiers : les (gros) godillots de l’UMP… et de la CNIL du blog Bug Brother.

P.-S.

L’Assemblée invente la législation au sprint

par Dominique Simonnot, Le Canard enchaîné du 9 décembre 2009


Quinze petites minutes, de 17 heures à 17h15, et hop c’est plié. Le 1er décembre, à une allure stupéfiante, la commission des Lois de l’Assemblée examinait une dernière fois les 156 articles de la troisième proposition de loi de "simplification et amélioration du droit". Simplifier, mais dans le brouillard. Car, à cette vitesse, et dans cet enchevêtrement d’articles et d’amendements, impossible de décrypter quoi que ce soit.

Exemples : « Le cinquième alinéa de l’article L. 251-2 du Code de l’action sociale et des familles est supprimé. » Ou bien : « La commission accepte l’amendement n° 95 substituant, en cas d’emploi abusif du terme de "coopérative agricole", au système de sanctions pénales existant un dispositif d’injonction du juge civil en référé. »

[...] La « simplification » à la Jean-Luc Warsmann, le président de la commission des Lois, cache en réalité quelques innovations, comme cette permission accordée au gouvernement de créer, à l’envi, de nouveaux fichiers de police « Honteux, scandaleux ! », ont protesté les socialistes. A droite, à gauche, les compliments ont fusé : « hasardeux », « périlleux », « fourre-tout mettant en cause des pans entiers du droit »... Et pourtant, quelques heures après avoir été examiné, si l’on ose dire, par la commission des Lois, le texte a été soumis à l’Assemblée, et adopté le 2 décembre « Je sais, c’est nul, on l’a voté, mais c’est comme ça », avoue un élu de la majorité. Avec l’espoir que les sénateurs parviennent, eux, à en révéler les vices cachés ?

Et pour 84 000 euros… une loi bien complexe

par Jacques Moran, L’Humanité du 10 décembre 2009


Le président UMP de la commission des Lois a fait travailler un cabinet privé sur le projet de loi simplifiant le droit. Au prix fort… [...] Jean-Luc Warsmann a tout simplement fait appel à un cabinet privé, Lexisnexis, pour la coquette somme de 84 000 euros. [...]

Notes

[2L’amendement CL24 rect, à la proposition de loi (n° 1890) de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.
Référence : pages 111-114 de http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/amendements_commissions/cloi/1890-01.pdf


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