la “fiche parcours élèves” : une fiche qu’il faut avoir à l’oeil


article de la rubrique Big Brother > le ministère de l’EN et les fichiers
date de publication : samedi 16 mai 2009
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Les données personnelles que le ministre de l’Education nationale avait été contraint de supprimer de Base élèves 1er degré vont-elles réapparaître par un autre biais ? On est fondé à se poser la question après la révélation de l’existence de fiches papier qui auraient été utilisées en Seine-Saint-Denis pour regrouper des informations concernant les élèves de CM2 de façon nominative.

Le ministère ne donne aucune précision sur ses intentions. Cela confirme la nécessité de maintenir la plus grande vigilance par rapport à une administration dont la transparence n’est pas la qualité première, et cela met en évidence, une nouvelle fois, la difficulté où se trouve le citoyen pour exercer cette vigilance : à qui peut-il s’adresser pour connaître l’utilisation qui sera faite des informations ainsi rassemblées ?

[Première mise en ligne le 15 mai, revue et corrigée le 16 mai]



Au printemps 2009, comme chaque année à pareille époque, les écoles ont reçu des fiches papier à remplir concernant les élèves de CM2.

Pour les remplir, avant de les retourner aux inspecteurs, il suffisait jusqu’à présent de donner le nombre d’élèves de CM2 qui avaient pu bénéficier d’une “aide” au cours de leur scolarité.

Mais si l’on en croit le document reproduit ci-dessous, cette année en Seine-Saint-Denis les renseignements demandés ont été transmis de façon nominative – avec nom, prénom et date de naissance.

Fiche parcours scolaire (Seine-Saint-Denis)

Il est intéressant de remarquer de plus que la plupart des “champs” de cette fiche figurent parmi ceux qui étaient rassemblés à l’origine dans Base élèves. Ils en avaient disparu lors des “purges” que le ministère en 2008 avait dû faire subir à Base élèves.

Un détail de la fiche

Décryptage des sigles employés [1]

  • CLIN : « Classe d’initiation », enseignement réservé aux enfants non francophones, classe “ouverte” dans le sens où l’enfant intègre une classe ordinaire tout en suivant cet apprentissage parallèle. Une donnée qui peut sans doute remplacer l’absence de case « nationalité » qui ne figure plus dans BE1D. Une circulaire de mars 2002 précise en passant qu’il « n’appartient pas au ministère de l’éducation nationale de contrôler la régularité de la situation des élèves étrangers et de leurs parents au regard des règles régissant leur entrée et leur séjour en France »… A bon entendeur !
  • Aide personnalisée : ce sont les deux heures du samedi qui doivent être désormais consacrées aux élèves les plus en difficulté de la classe. La FCPE comme de nombreuses organisations a dénoncé cette mesure, qui justifie la suppression des RASED (lire point suivant), alors que ces cours sont assurés par un enseignants généralistes et non “spécialisés”.
  • RASED : Réseau d’aide spécialisée pour les élèves en difficultés, qui ont donc été supprimées sans sommation par Darcos, malgré son efficacité reconnue par le corps enseignant. Cette information pourra donc alimenter un autre fichier parallèle à BE. Et on comprend la sensibilité de cette donnée lorsqu’elle est ventilée en fonction de la spécialité dnas laquelle l’enfant a été pris en charge : code “E” pour l’aide à dominante pédagogique (difficultés scolaires) ; code “G” pour une aide à dominante psycho-pédagogique (difficultés comportementales, absence de désir d’apprendre, troubles du comportement), très utile, donc, pour assurer une prédictibilité de la délinquance juvénile si chère aux députés Bénisti et Lefebvre…
  • PPRE : projet personnalisé de réussite éducative, autre accompagnement particulier réservé aux élèves qui risquent « de ne pas maîtriser les connaissances et les compétences indispensables à la fin d’un cycle ».
  • Parmi les « actions extérieures » on trouve : « orthophoniste », « ASE » (Aide sociale à l’enfance : donnée qui peut là aussi renseigner sur la situation sociale de la famille entière, « psychologue », CMPP (pour savoir si l’enfant est suivi par un Centre médico psycho-pédagogique),

et pour terminer « PJJ » : « Protection judiciaire de la jeunesse » !

Autant de données très sensibles sur l’enfant et sa famille que le directeur est donc “invité” à transmettre à sa hiérarchie sans sourciller – et sans que les parents en soient informés.

Une fiche qu’il faut garder à l’œil !


Notes

[1La plus grande partie de ce décryptage est repris du site du CNRBE.


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