le Var expulse de plus en plus de clandestins


article de la rubrique les étrangers > à la préfecture du Var
date de publication : mercredi 11 mars 2009
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D’après la préfecture, le nombre d’expulsions de “clandestins” a presque doublé en quelques années dans le département : Var-Matin du 11 mars 2009 rapporte que la préfecture a « pris 325 arrêtés de reconduite à la frontière en 2008, contre 180 en 2005. » Il y a un an, le préfet du Var avait déclaré, “sans états d’âme”, que 282 personnes en situation irrégulière avaient été« reconduites à la frontière » en 2007 dans le département [1].

Difficile de dégager de ces deux chiffrages une tendance de l’évolution sur un an – d’autant plus que le total de 2007 englobait vraisemblablement une soixantaine de départs “volontaires”. Il reste que la situation semble se durcir, à Toulon comme ailleurs...


Var : 325 clandestins ont été reconduits à la frontière en 2008

un dossier de P. Poletto, publié le 11 mars 2009 dans Var-Matin [2]


Mohamed B. est en situation irrégulière depuis neuf ans. Interpellé par la police, l’homme a fait l’objet, le 14 février, d’un arrêté du préfet du Var de reconduite à la frontière et a réclamé l’annulation de la décision devant le tribunal administratif de Toulon.

Peine perdue. L’homme n’a pas d’emploi ni de famille en France. En neuf ans, il n’a jamais engagé de démarches pour régulariser sa situation. Difficile, dans ce cas-là, de prétendre à un sursis et à rester sur le territoire français.

En 2008, la préfecture du Var a ainsi recensé 325 procédures de reconduite à la frontière, soit 70 de plus qu’en 2007. Le ton s’est durci, ces dernières années. En trois ans, le nombre de retour aux pays d’origine a quasiment doublé. À titre de comparaison, en 2005, la police aux frontières de Toulon avait reçu des injonctions pour 180 reconduites.

La régularisation par le travail

Plus sévère, le nouveau dispositif législatif, mis en œuvre en 2007, table sur une immigration choisie et non subie. C’est ainsi que des textes prévoient la régularisation « par le travail. »

Avocat spécialiste de la défense des clandestins, Me Bruno Bochnakian évoque un leurre.
Un miroir aux alouettes pour ces ouvriers qui travaillent souvent « au black », depuis des années, « à qui on fait miroiter une régularisation de leur situation. Une liste des métiers qui donnent lieu à régularisation a été établie par région dans l’arrêté du 18 janvier 2008. Il suffit de la consulter au niveau de la région Paca (voir ci-dessous) pour s’apercevoir qu’elle n’est pas en adéquation avec les besoins réels du marché de l’emploi local. »

Mohammed, un ressortissant marocain, se bat devant la justice administrative. Sa situation semble presque ubuesque. Il vit en France depuis 1997. Ses deux frères et sa sœur ont régularisé leur situation.

Un CDI à la clef mais un refus de régularisation

Lui se bat depuis des mois pour obtenir un titre de long séjour qui lui donnerait droit à un permis de travail.

Tous les éléments plaident en sa faveur. L’homme est ornemaniste : il crée des fresques en plâtre. Une activité très peu pratiquée, à tel point que l’ANPE ne trouve aucun candidat à proposer à l’entreprise toulonnaise intéressée par l’embauche de Mohammed.

Une offre, une demande, une promesse d’embauche : tout semblait aller dans le bon sens. Avec une seule condition : l’obtention d’un titre de séjour en échange de son CDI. L’administration va toutefois lui opposer un refus. Et pour cause, l’emploi qu’il convoite (et que la société souhaite pourvoir) ne figure pas sur la fameuse liste de l’arrêté de janvier 2008.

Mariée à un Français, battue, divorcée, elle a failli être expulsée [3]

Linda, une jeune femme d’une trentaine d’années, vient certainement d’échapper à une reconduite à la frontière traumatisante [4]. Il faut dire que son parcours n’est pas commun. Née en Algérie, elle se marie alors qu’elle est tout juste majeure avec un Français. C’était il y a dix ans. Elle obtient une carte de séjour en raison de sa situation matrimoniale. Les tensions se multiplient dans le couple. Elle est battue. Violentée. Harcelée. Elle quitte finalement le domicile conjugal, divorce en janvier 2008 et sollicite un titre de séjour. Sa vie est désormais ici, dans son pays d’adoption, la France. Elle ne s’attend pas à un refus. Et pourtant... Séparée de son mari, elle n’aurait pas le droit de rester sur le territoire.

Elle forme un recours en décembre dernier et se voit interpellée par la police quelques jours plus tard. Placée en centre de rétention, elle saisit la justice administrative pour que sa situation soit étudiée.

Étude au cas par cas ?

« Les dossiers de régularisation doivent être étudiés au cas par cas. Mais en pratique, ce genre d’affaire se règle devant les tribunaux », dénonce Me Bochnakian, avocat spécialisé dans la défense des « clandestins. »

Devant la juridiction niçoise saisie, le magistrat à estimé que le préfet a un pouvoir d’appréciation de la situation, eu égard aux violences conjugales subies par Linda. Sa carte de séjour peut être renouvelée. Pour son conseil, « on oublie trop souvent que l’on traite de l’humain et pas du chiffre. Ce n’est pas compatible. »

Régularisations grâce à l’emploi en PACA

L’arrêté du 18 janvier 2008 établit, pour la région Provence Alpes-Côte d’Azur, une liste de professions ouvrant droit, sans opposition de la situation de l’emploi, à des autorisations de travail aux étrangers non-ressortissants d’un État membre de l’Union européenne.

P. Poletto

P.-S.

Liste des métiers donnant lieu à régularisation en PACA (Voir cette page) :

Informatique : technicien de la vente à distance, cadre de l’audit et du contrôle comptable, informaticien d’étude, informaticien expert.

Industrie : marchandiseur, mécanicien d’engins de chantier, de levage et manutention et de machines agricoles, pilote d’installation de production cimentière, conducteur de machine de fabrication des industries de l’ameublement et du bois (et matériaux associés), façonneur bois et matériaux associés (production de série), technicien de méthodes ordonnancement-planification de l’industrie, dessinateur-projeteur de la construction mécanique et du travail des métaux, dessinateur-projeteur en électricité et électronique, dessinateur en électricité et électronique, technicien de fabrication de la construction mécanique et du travail des métaux, technicien qualité construction mécanique et du travail des métaux, technicien de production
des industries de process, technicien des industries de l’ameublement et du bois, installateur-maintenicien en ascenseurs (et autres systèmes automatiques), inspecteur de mise en conformité, maintenance en électronique.

BTP : dessinateur du BTP, géomètre, chargé d’études techniques du BTP, chef de chantier du BTP, conducteur de travaux du BTP.

Notes

[2On peut lire en une du journal : « la préfecture a pris 325 arrêtés de reconduite à la frontière en 2008 », alors que le titre de la page 6 est « Var : 325 clandestins ont été reconduits à la frontière en 2008 ». Il est vraisemblable qu’une des deux affirmations est inexacte... [Note de LDH-Toulon].

[3L’intertitre était : « Mariée à un Français, battue, divorcée, expulsée ».

[4Son prénom a été modifié.


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