Toulon, Sanary ... les intégristes sont parmi nous


article de la rubrique extrême droite > l’extrême droite catho
date de publication : samedi 20 novembre 2004
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Sous la soutane, l’intégrisme catholique du Var. [1]

Page mise en ligne le 2 novembre, et modifiée le 20 novembre 2004


Voir en ligne : deux ans plus tard, à Carqueiranne ...

Au temps du Front National

Le précédent maire, Jean-Marie Le Chevallier, et son équipe d’extrême-droite, avaient cru bon de "consacrer Toulon au Sacré-Coeur" lors de cérémonies qui se sont déroulées le 4 août 1996 en l’église Saint-François-de-Paule. Mgr Joseph Madec, évêque de Fréjus-Toulon, n’y était apparemment pour rien, mais la municipalité frontiste avait su trouver une oreille complaisante en la personne du curé de la paroisse, le chanoine Proton. Ce "grand moment pour Toulon" [2] n’avait pas empêché la lente désintégration de l’équipe municipale à laquelle nous avons assisté jusqu’au printemps 2001.

En novembre 1998, à l’occasion de la “Fête de la liberté du livre” (!), la municipalité frontiste avait décerné la médaille de la ville de Toulon à Xavier Dor. Il s’agissait d’honorer un activiste, président de l’association « SOS tout-petits », célèbre pour ses nombreuses (on parle de deux cents) actions de type "commando anti-IVG".

L’extrême droite n’a plus aucun élu à la mairie de Toulon. Cela n’a pas empêché Xavier Dor d’organiser, samedi 28 août 2004, devant l’Hôpital Font-Pré une "prière publique contre l’avortement".

Mais aujourd’hui Toulon semble menacé par un autre phénomène : une épidémie de manifestations ostensibles de signes religieux de la part de chrétiens souvent proches de l’extrême droite.

Nous avons eu droit à l’épisode de l’aumônier Antoine Galland qui parcourait le lycée en soutane, sous le nez des élèves interdites de tout voile. Aujourd’hui tout semble rentré dans l’ordre, l’aumônier ayant accepté de retirer sa soutane. Mais cet épisode est un signe ...

D’après Lilian Renard, tout commence à Sanary

Le père Arnaud Adrien aurait été le premier en France, en 1994, à organiser sa paroisse en “cellules d’évangélisation” ; aujourd’hui 300 Sanaryens sont regroupés en 24 cellules. Chaque membre est prié d’agir sur son environnement pour procéder à “une évangélisation par rayonnement”. Une organisation qui laisse songeur : comment ne pas faire le rapprochement avec des phénomènes sectaires ou totalitaires ? [3]

Le curé actuel de la paroisse, le père Bertrand Lorentz, poursuit l’œuvre entamée. Sa paroisse ne s’était pas montrée particulièrement compréhensive envers le groupe de résidants du Val d’Aran venus occuper son église, en décembre 2003 et janvier 2004, afin d’attirer l’attention sur leur situation [4]. Le père Bertrand s’était déclaré profondément blessé par l’occupation de son église : " Personne ne peut imaginer ce que l’on ressent quand c’est son église. J’ai beaucoup souffert même si je n’étais pas là personnellement, c’est comme un viol. J’ai vécu cela comme un acte de violence." Il n’avait pas compris les raisons de l’occupation de son église : " Les rencontrer ? Je ne sais pas. Ils n’ont pas cherché à nous [l’église] rencontrer depuis que je suis là (7 ans) ".
 [5]

Une autre communauté, la fraternité Marie-Madeleine a installé à Sanary un “centre de guérison par la prière” qui met en pratique l’agapéthérapie - “thérapie par l’Amour de Dieu”.

L’école cachée

L’aumônier Antoine Galland n’est pas isolé dans le clergé toulonnais. Il est membre de la communauté Saint-Martin, réputée proche de l’extrême-droite. C’est à cette communauté que le nouvel évêque de Fréjus-Toulon, Mgr Dominique Rey, lui-même issu de la communauté charismatique de l’Emmanuel, a confié la paroisse Saint-Pie X en 2001.

Depuis peu, la paroisse toulonnaise Saint-Pie X accueille une étonnante initiative, dénoncée par une partie du clergé. Dans ses sous-sols, une douzaine d’enfants suivent régulièrement les « cours Anne de Guinié », école par correspondance, hors contrat, décrite comme « traditionaliste »

Le siège de cette école se trouve à Paris ; à Toulon, un répétiteur fait travailler des élèves coupés de toute autre forme de vie scolaire.
L’aumônerie est assurée par la fraternité Saint-Pierre, à qui a été confiée la paroisse Saint-François-de-Paule.

La quête par prélèvement.

Ne pensez pas que ces prêtres dynamiques aient perdu tout sens des réalités terrestres. Pour optimiser leurs dons, plutôt que de donner de la monnaie à l’occasion de la messe, les fidèles sont invités à demander un prélèvement automatique sur leur compte, en échange de jetons qui permettent de ne pas rompre avec le geste symbolique de l’offrande. Résultat : le montant du denier de l’Église a fait un bond de 50%. [6]

Où l’on voit un cardinal membre de l’Opus Dei défendre la laïcité

La situation toulonnaise n’est sans doute pas exceptionnelle en Europe, si l’on en juge par les déclarations suivantes.

On perçoit l’inquiétude et la crispation dans les déclarations récentes du cardinal Julian Herranz [7] :
"Nous nous trouvons face à une vague de fondamentalisme laïc", affirme-t-il.
"Nous assistons à l’apparition d’une intolérance qui confond la laïcité de l’Etat avec le laïcisme", soutient le cardinal. [8]

Il rejoint le cardinal Renato Martino qui dénonce haut et fort « une Inquisition antichrétienne » après le haro suscité par les déclarations de Rocco Buttiglione affirmant devant les eurodéputés que l’homosexualité est un « péché », que la famille est la matrice qui permet « à la femme d’avoir des enfants et d’être protégée par son mari » ...
 [9]

Ne désespérons pas !

Pour conclure son dossier, Lilian Renard donne la parole à Gilles Rebêche, en citant une prière écrite par ce diacre toulonnais :

Protège-nous de l’illusion d’être les seuls à posséder la Vérité [...]
protège-nous de vouloir imposer aux autres notre morale ...

Notes

[1Lilian Renard a publié, le 2 novembre 2004, dans le quotidien local Var-Matin, un dossier très complet intitulé Sous la soutane, la face cachée du diocèse.

[2Présent du 6 août 1996.

[3Une soixantaine de paroisses françaises seraient aujourd’hui organisées en cellules.

[4Les occupants devaient quitter l’église le 10 janvier, après avoir fait le ménage et remis les lieux en ordre. Le maire de Sanary et l’évêché de Toulon-Fréjus avaient obtenu que le TGI de Toulon ordonne leur expulsion dans un délai de cinq jours "au besoin avec le concours de la force publique", afin de "rétablir l’ordre public".

[5Var Matin, 14 janvier 2004.

[6Le Figaro, 28 octobre 2004

[7Le cardinal Julian Herranz est un des plus hauts dignitaires de l’Opus Dei. Très proche de la personne du pape, il est membre de la chapelle pontificale.

[8Entretien consacré à la situation en Europe, publié par le quotidien italien Il Giornale, le 19 octobre 2004. Source : ZENIT, Agence d’information - Le monde vu de Rome.

[9L’Express du 25 octobre 2004


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