mosquée de Fréjus : le parquet fait appel de la décision qui évitait la démolition


article de la rubrique extrême droite > Rachline, maire de Fréjus
date de publication : dimanche 6 mars 2016
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Le tribunal correctionnel de Draguignan a condamné vendredi 26 février les dirigeants de la mosquée de Fréjus à une peine d’amende pour des irrégularités liées à son permis de construire, sans toutefois ordonner la démolition du lieu de culte, comme le parquet l’avait requis à l’audience du 24 novembre dernier.

Il a en revanche déclaré l’association musulmane El Fath et son président coupables d’exécution de travaux en vertu d’un permis périmé, et en méconnaissance du plan de prévention des risques d’inondation. Ils ont été respectivement condamnés à des amendes de 60 000 et 15 000 euros.

Le tribunal condamne également Elie Brun, l’ex-maire de Fréjus, comme coupable du délit de délivrance frauduleuse d’un permis de construire par dépositaire de l’autorité publique : dix-huit mois de prison avec sursis, 100 000 euros d’amende, et cinq ans d’interdiction d’exercice de toute fonction publique.

Dernière minute (AFP)
Le parquet de Draguignan fait appel du jugement qui a permis, fin février, à la mosquée de Fréjus (Var) d’échapper à la démolition, a indiqué samedi le procureur Ivan Auriel.

Le 26 février, le tribunal correctionnel avait condamné les dirigeants de la mosquée à des peines d’amende, pour n’avoir pas entrepris les travaux de construction assez tôt et pour ne pas avoir respecté certaines dispositions relatives au risque d’inondation. En revanche, le tribunal n’avait pas ordonné de « remise en état des lieux », soit la démolition du bâtiment de 1 500 mètres carrés et pouvant accueillir 700 fidèles, dont les travaux s’étaient achevés en avril 2015, comme l’avait requis le procureur en novembre.

[Mis en ligne le 27 février 2016, mis à jour le 6 mars 2016]



Un article publié avant le jugement :

Fréjus : la justice va-t-elle ordonner la démolition de la mosquée ?


Vendredi 26 février, le tribunal correctionnel de Draguignan décidera si le lieu de prière flambant neuf, au cœur d’un conflit avec la municipalité FN, doit être démoli.

[par Rémi Sulmont et Loïc Farge, publié sur RTL] le 24 février 2016.


Le maire Front national de Fréjus, David Rachline, obtiendra-t-il la démolition de la nouvelle mosquée de sa ville ? Si les réquisitions sont suivies, ce serait sans précédent. Tous les juristes qui suivent ces dossiers n’ont pas souvenir d’avoir vu un procureur demander la destruction complète d’un lieu de prière dont les travaux sont déjà entièrement achevés depuis neuf mois. S’il y avait un concours récompensant la mosquée de France qui collectionne le plus de procédures juridiques contre elle, Fréjus aurait décroché plusieurs trophées.

La ville varoise est un cas d’école qui a abouti le mois dernier à une décision totalement inédite. Le maire refusant d’autoriser l’ouverture au public des lieux, le préfet du Var s’est substitué à lui pour faire appliquer la loi de 1905 qui prévoit le libre exercice des cultes.

Des irrégularités pointées

L’inauguration très festive de la mosquée, en présence de 700 fidèles musulmans, heureux d’avoir enfin leur lieu de prière, s’est déroulée le mois dernier. Après neuf mois à prier à l’extérieur, devant le bâtiment, et après des années dans des salles de prière improvisées dans des garages.

Ce qui est certain, c’est que le permis de construire n’a pas été accordé dans les règles de l’art par l’ancien maire, condamné par la justice par ailleurs et battu par David Rachline, le maire FN actuel. "L’ancien maire avait scellé une alliance avec une association pour lui permettre de construire la mosquée", explique un bon connaisseur du dossier. Les maires, dit-il, sont "souvent désireux de satisfaire les demandes des communautés musulmanes, par sympathie mais aussi pour des raisons électoralistes". Le permis est donc accordé. Mais plusieurs irrégularitée sont pointées : l’association musulmane n’était pas propriétaire de toutes les parcelles au moment du permis, les délais juridiques n’ont pas été respectés, etc.

Certains points ont été régularisés depuis. Du coup, l’avocat de l’association dénonce le "jusqu’au-boutisme" du procureur. Le contexte politique local et l’arrivée du Front national à la mairie ont fait du dossier de la mosquée de Fréjus un enjeu politique. Sa démolition serait aujourd’hui une victoire hautement symbolique pour le parti de Marine Le Pen.

Des cas rares

Cette mosquée de Fréjus est-elle révélatrice de ce qui se passe aujourd’hui en France concernant les constructions de lieux de culte pour les musulmans ? On a posé la question à un homme qui tente de dépassionner le débat sur la construction de mosquées en France. Depuis vingt ans, Bernard Godard a suivi tous ces dossiers de près. Sociologue de formation, il a longtemps été le "Monsieur Islam" au ministère de l’Intérieur. Les cas comme celui de Fréjus sont, à ses yeux, une exception.

"Il y a encore des blocages. Cela devient rare, quoi qu’on en dise. Cela existe, mais ça se compte sur les doigts d’une main", explique-t-il. "D’autre part, la plupart des musulmans ne demandent pas en plein centre-ville un minaret qui dépasse la flèche de l’église. Tout cela est du domaine du fantasme", ajoute-t-il. Les minarets sont effectivement rares. Seules 2,5% des mosquées françaises en possèdent. Celle de Fréjus n’en a pas.

Si l’on s’en tient aux chiffres, c’est constant depuis dix ans : 150 à 200 nouveaux lieux de culte musulmans sont déclarés chaque année en ce moment. Ce ne sont pas forcément des constructions neuves. Il y a des agrandissements, des rénovations de locaux existants. "Tous ces lieux, insiste Bernard Godard, deviennent du coup des locaux déclarés et enregistrés".


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