Christiane Hummel, nostalgique de la peine de mort, se verrait bien shérif de La Valette


article de la rubrique Toulon, le Var > villes du Var
date de publication : mardi 31 octobre 2006
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Le 26 septembre 2004, Christiane Hummel, maire de La Valette du Var, était élue sénatrice (UMP) du Var - elle est également vice-présidente de la communauté d’agglomération Toulon-Provence-Méditerranée. [*]

Après une relative discrétion de deux ans, elle ne fait plus mystère de ses conceptions musclées : dans l’esprit de son interview fortement sarkozyste sur RTL, en septembre dernier, elle vient de signer une proposition de loi de Charles Pasqua, « visant à porter la durée de la période de sûreté à trente ans dans les cas de condamnations pour les crimes les plus odieux » [1].

Que les Varoises et les Varois le sachent : ils sont "représentés" par une sénatrice musclée.


Voici l’exposé des motifs de cette proposition de loi, par laquelle 49 sénateurs expriment leur regret que la peine de mort ait été abolie en France.

« L’abolition de la peine de mort a été décidée en automne 1981 dans l’euphorie d’un état de grâce qui, sans aucun doute, pêchait par excès d’optimisme ou par sensibilité à sens unique, c’est-à-dire dans la seule considération de la clémence envers les criminels. Cette abolition procédait d’une vision doctrinaire et irréaliste, selon laquelle l’individu ne serait pas responsable de ses actes. Les motifs qui ont inspiré l’abolition de la peine de mort sont incompatibles avec l’humanisme républicain fondé sur le principe de la responsabilité personnelle, fondement de la dignité de l’homme.

« Depuis lors, les Français assistent inquiets à une montée de la délinquance violente et du terrorisme. Les malfaiteurs semblent faire de moins en moins cas de la vie humaine. Chaque jour désormais ou presque, on enlève et on tue des enfants, on assassine des personnes âgées pour leur dérober leurs économies ; on n’hésite plus à ouvrir le feu sur les représentants de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions.

« La preuve est ainsi malheureusement apportée que l’abolition de la peine de mort, dont on attendait un progrès moral, aura été reçue, en fait, comme une incitation à l’assassinat par des délinquants désormais seuls à l’abri d’une peine qu’ils distribuent aveuglément à leurs victimes innocentes.

« Face à cette violence, la société a le droit et le devoir de se protéger. La République, dont la première tâche est d’assurer la sécurité des citoyens, doit élaborer une riposte à la mesure du danger qu’ils encourent. Pour échapper à un engrenage fatal qui entraînerait les Français à se faire justice eux-mêmes, il faut aujourd’hui mettre un terme au laxisme et à la faiblesse. »

Un esprit fortement sarkozé

Le 28 septembre 2006, dès le journal de 7 heures de RTL-Toulon, la sénatrice-maire fait la promotion du projet de loi de prévention de la délinquance, adopté - et durci - par le Sénat quelques jours auparavant.

  • RTL : Le projet de loi Sarkozy sur la délinquance va placer le maire au centre de la politique de prévention ; vous allez voter cette loi ?

Christiane Hummel : « Bien entendu, c’est une évidence, et tout le monde l’a dit, le maire est déjà au centre de la prévention, le maire est au centre de tout de toute façon dans sa commune. »

  • RTL : Le maire aura le pouvoir d’envoyer une personne à l’hôpital sans avis médical.

CH : « Le maire ne fera pas ce genre de choses, on en a longuement discuté. Moi je suis d’accord car dans ma commune, le cas s’est plusieurs fois présenté. Il ne le fera pas sans profonde connaissance du terrain et de la personne, connaissance qu’il a déjà. »

  • RTL : Exemple, un couple qui se rend dans une unité de toxico-dépendance, information transmise à la mairie… et ensuite s’ils déposent une demande de logement sociale ? Ce couple estampillé toxicomane sera-t-il prioritaire ?

CH : « Il y a 1500 demandes de logement social dans ma commune, je ne vois pas pourquoi des gens, s’ils ne se plient pas aux règles, passeraient devant 1500 personnes, et en plus des femmes seules avec des enfants, sur les listes d’attente. »

  • RTL diffuse une interview pré-enregistrée d’une syndicaliste, représentant les travailleurs sociaux de la PJJ (Protection judiciaire de la jeunesse) :
    « cette loi, c’est plus de coercitif, la stigmatisation des personnes en difficulté comme potentiellement délinquante. C’est un détournement des services sociaux publics de proximité : contrôle des familles, fichage ... Quelles solutions ou aides supplémentaires le maire pourra-t-il apporter ? Le renforcement de son rôle développera le contrôle social et
    stigmatisera la jeunesse au lieu de l’aider ».

Réaction de Christiane Hummel : « Oui j’ai entendu beaucoup de baratin, comme celui que j’ai entendu sur les bancs de la gauche au Sénat. Je ne prendrai que l’exemple des grands mots qui ont été utilisés : la politique en faveur de la jeunesse vire à "la politique qui ferait passer les jeunes pour des délinquants" ? alors là, c’est grotesque.
Par contre je lui conseille ( à la personne de la PJJ) de se rendre dans des cités, et une qui se trouve dans ma commune, que je ne citerai pas, où les habitants étaient terrés chez eux.
Et où la nuit des jeunes sous l’emprise de la drogue, parce qu’il faut savoir qu’à 9 ans, il y a déjà des jeunes qui sont drogués, des enfants qui sont drogués, se livrent à des actes de barbarie envers des animaux.
Et que le matin on trouve des cadavres, je ne dirai pas lesquels pour ne pas inciter à refaire la même chose, mais on trouve des cadavres d’animaux partout.

« Alors que je veux bien […] mais écoutez la répression… à partir d’un moment, ça fait 30 ans en gros, un peu plus de 20 ans, qu’on a mis en marche la politique de la ville, avec des gens qui se sont investis, et les maires plus que les autres, en consacrant des sommes… cette politique de la ville, mise en place par des gouvernements de gauche, a été un échec complet.

[…]

« Je voudrais dire un mot, il y a un amalgame qui se fait et il y a une malhonnêteté : le maire va continuer à travailler avec les travailleurs sociaux.
Ce qu’on demande, c’est que, dans les cas très graves, les travailleurs sociaux nous mettent au courant de ce qu’il se passe, sans incriminer ; nous on n’est pas là pour faire les justiciers, mais on est là pour aller dire aux familles et aux enfants et aux jeunes : vous pourriez faire autrement.

  • RTL : mais est-ce qu’on aura l’argent ? est-ce qu’on aura les moyens pour tout cela ?

CH : « On sait très bien que les collectivités locales vont avoir des charges supplémentaires.
Qu’est-ce que vous croyez qu’on fait ?
Moi je passe mon temps dans la cité dont je vous ai parlé, on va trouver des solutions urbanistiques, pour éviter ce qui se passe, que les jeunes se cachent un peu partout, et que les gens crèvent de peur, parce que c’est ça qui se passe.
[…]
Si on le prend assez en amont, on évitera la délinquance. On n’est pas des Zorros. C’est ça qu’on veut, donner une chance à des gosses, malheureusement, qui ne sont pas guidés dans la vie. »

Après un braquage contre une bijouterie du centre-ville de La Valette, le 13 mai 2006, Christiane Hummel avait vivement réagi : «  Dès lundi je demanderai un rendez-vous avec le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy pour que la situation de notre ville soit enfin prise en compte.
Il est inadmissible qu’une ville de notre importance ne bénéficie pas d’un commissariat de police à plein temps. Un jour il y aura un mort et l’on recherchera les responsabilités. Faudra-t-il que moi aussi je commence une grève de la faim au Sénat ?
 » [2].

Défense des valeurs traditionnelles

Christiane Hummel figure parmi les 50 élus hostiles au mariage homosexuel et qui ont décidé de le dire [3] .
« Le mariage est une institution fondée sur le désir d’un homme et d’une femme de créer une famille. Je suis tout à fait tolérante envers tout le monde, mais la famille, c’est autre chose » déclare-t-elle [4].

Il y a deux ans, La Valette recevait la Vierge de Santa Cruz. Conduite par Jeanne Botella, présidente du Comité du Var des Amis de Notre dame de Santa Cruz, et par Christiane Hummel, la procession s’est rendue à l’église pour rendre un hommage à celle qui, en 1849, sauva la ville d’Oran du choléra.
En quelques mots la présidente a rappelé l’historique de cette procession : « à cette époque, les autorités étaient dépassées par les évènements et ne savaient que faire. Tous les jours des gens mouraient. Un jour le général Pélissier, qui commandait à Oran, a déclaré : “Installez-moi une vierge en haut de la montagne de Santa Cruz et qu’elle emporte le choléra à la mer...” D’après l’histoire, une procession avec une statue d’une vierge serait montée. Un violent orage aurait éclaté ce soir-là, emportant le choléra. Depuis, chaque année, les Oraniens vénèrent leur Dame de Santa Cruz et font un pèlerinage le jour de l’Ascension. »
Ramenée à Nîmes en 1963, le premier pèlerinage a eu lieu en 1966.
 [5]

Le bon temps des colonies

En janvier 2006, quelques jours avant l’annonce par le président Chirac de sa décision d’abroger partiellement l’article 4 de la loi du 23 février 2005, Christiane Hummel déclare devant l’assemblée générale de l’Amicale des Philippevillois et Constantinois :
« Les députés ont voté l’amendement de la colonisation. Elle a eu des effets positifs. Le sénateur que je suis ne reviendra pas sur cette loi. Vous avez eu un rôle extrêmement bénéfique. On n’a pas à rougir de nos écoles, nos routes, nos hôpitaux, de tout ce qui a été fait. Je ne sais ce qui va se passer dans l’avenir, je vous dis que nous tiendrons bon. Il y a un passé, il faut l’assumer les uns et les autres. Les historiens font leur travail d’historiens, laissons-les faire. » [6].

Une dame de fer

Elle est là pour longtemps (du moins l’espère-t-elle) et elle aimerait bien que son opposition lui fiche la paix.

  • Votre opposition, qui a gagné des voix aux dernières élections cantonales, vous réclame « plus de concertation, plus d’écoute de l’ensemble des Valettois », « plus de sympathie et de gentillesse ».

CH : « Je ne reçois de sa part que des critiques ridicules. Jamais de demande de rendez-vous, de proposition constructive. Le mois dernier, j’ai fait une réunion publique sur TPM. Le lendemain, j’avais droit à un tract socialiste sur le marché, me reprochant d’avoir simplifié le sujet. Je n’en ferai plus !
“Pas gentille” ? Ce n’est pas l’opinion des Valettois qui me téléphonent, m’écrivent et s’inquiètent pour ma santé depuis mon élection au Sénat. Une « casquette » qui s’est ajoutée à celle de maire et de vice-présidente de la communauté d’agglomération.
Qu’ils se rassurent : je passe un ou deux jours à Paris, selon que je suis de « garde de nuit » ou non. Je suis toujours en mairie le lundi, j’y reviens le jeudi, jusqu’au samedi matin. Je reste leur maire. » [7]

P.-S.

Maîtrisant sa nostalgie, Christiane Hummel a, le 7 février 2007, voté en faveur du projet de loi constitutionnelle d’abolition de la peine de mort [8]. [Note ajoutée le 8 février 2007]

Notes

[*Note de LDH-Toulon : Cet article est la version mise à jour d’un article intitulé « le rêve d’une sénatrice-maire : devenir shérif », publié sur ce site le 13 octobre dernier, avant que nous n’ayons eu connaissance de la proposition de loi évoquée ci-dessous.

[1Les crimes concernés sont – pour l’instant – : « viol accompagné de torture, meurtre ou assassinat précédé d’un viol, meurtre ou assassinat d’enfants, de personnes âgées, de femmes enceintes, de personnes handicapées, de policiers, de gendarmes, de magistrats, ... Il est en outre proposé que cette peine de sûreté de trente ans s’applique aux récidivistes les plus graves, [...] ».

Voir la proposition de loi sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/leg/ppl06-032.html.

[2Var-Matin, 14 mai 2006.

[4Var-Matin, 25 janvier 2006.

[5Var-Matin, 12 Septembre 2004.

[6Var-Matin, 19 janvier 2006 - voir article 1079.

[7Var-Matin, 3 janvier 2005.


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