TES : Tous Étatiquement Surveillés (màj)


article communiqué de la LDH  de la rubrique Big Brother > fichage généralisé
date de publication : mardi 8 novembre 2016
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Un décret du 28 octobre 2016 autorise la création d’un traitement de données à caractère personnel relatif aux passeports et aux cartes nationales d’identité. Une initiative qui suscite bien des réserves, notamment de la CNIL.

Si elle juge justifiées les finalités du traitement, la CNIL insiste sur la nécessaire vigilance devant la constitution d’un fichier TES (“Titres électroniques sécurisés”) rassemblant « les données biométriques, en particulier les images numérisées des empreintes digitales et de la photographie de l’ensemble des demandeurs de cartes nationales d’identité et de passeports ». TES va en effet ficher 60 millions de personnes, soit « la quasi-totalité de la population française »... Et nul ne peut prévoir aujourd’hui l’utilisation qui pourra en être faite demain.
La CNIL aurait aimé que le gouvernement saisisse le Parlement de cette question...

Ci-dessous un petit dossier sur ce sujet. [1]

[Mis en ligne le 3 novembre 2016, mis à jour le 8]

  • Le décret n° 2016-1460 du 28 octobre 2016 autorisant la création d’un traitement de données à caractère personnel relatif aux passeports et aux cartes nationales d’identité : https://www.legifrance.gouv.fr/affi...

Communiqué de la LDH

Paris, le 3 novembre 2016

Toussaint 2016 : retour du fichier des « gens honnêtes » ?

Avec la création du fichier baptisé « titres électroniques sécurisés » (TES), le gouvernement prétend faciliter l’obtention d’un passeport ou d’une carte d’identité et permettre l’authentification des demandeurs. Il entend également limiter la falsification de ces documents.

Aussi louables que sont de tels objectifs, ceux-ci ne sauraient occulter l’extrême dangerosité d’une base de données qui va centraliser des informations personnelles et biométriques sur la quasi-totalité de la population française, s’inspirant ainsi d’un projet proposé par le précédent gouvernement et partiellement censuré par le Conseil constitutionnel. A cette époque, l’actuel garde des Sceaux avait qualifié un tel projet « de bombe à retardement ».

Le gouvernement, chevauchant une loi qu’il avait décriée et s’exemptant d’un débat au Parlement, s’est contenté de faire paraître, en catimini, un décret pour créer ce fichier unique d’une taille inégalée et malgré les nombreuses réserves de la Cnil.

La LDH dénonce avec force la mise en place d’un outil qui d’ores et déjà est consultable par une multitude de services et qui sera exposé à toutes sortes de piratages. Par ailleurs, ce fichier ne présente aucune garantie quant à d’éventuelles évolutions, tout cela sans possibilité de recours de la part des citoyen-ne-s et sans aucun contrôle d’une instance indépendante. Ce gouvernement poursuit ainsi son choix d’une surveillance de masse et fait preuve de la plus grande irresponsabilité.

La LDH continuera à informer les citoyen-ne-s sur les dangers de cette base de données qui met en danger la protection de la vie privée et le respect des libertés individuelles.

P.-S.

Quelques dates

  • En 2006, l’administration américaine des vétérans a vu les données de 26 millions de citoyens exposées suite à un vol d’ordinateur
  • Au Royaume-Uni, en 2007, l’HM Revenue and Customs Department a perdu des supports contenant les données de 25 millions de personnes bénéficiant d’aides sociales
  • En 2012, la police de Manchester perd une clef usb contenant les données personnelles d’un millier de témoins impliqués dans des enquêtes criminelles
  • Les systèmes du gouvernement américain ont subi des attaques se soldant par le « vol » de données de plus de 21 millions de citoyens du pays. L’affaire a été révélée en juillet 2015. Les données volées concernaient les citoyens ayant travaillé pour l’Etat. Les données contenaient numéros de sécurité sociale, adresses, noms, historiques médicaux et financiers, etc.
  • En février 2016, des hackers piratent les bases de données de l’administration américaine et divulguent les données de 10 000 employés du DHS, puis celles de 20000 employés du FBI

Notes

[1Le titre de cet article est inspiré d’un extrait du chapitre 2 de 1984 de George Orwell : « Another year, two years, and they would be watching her night and day for symptoms of unorthodoxy. »


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