quand le Royaume-Uni torturait en Irlande du Nord


article de la rubrique torture
date de publication : dimanche 29 juin 2014
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Au début des années 70, le gouvernement britannique a autorisé le recours à la torture de nationalistes irlandais en détention, c’est ce qui ressort d’un documentaire diffusé sur la chaîne de télévision publique irlandaise RTÉ.
Ces révélations, qui ne font que confirmer d’autres informations — voir l’article “British government authorised use of torture methods in NI in early 1970s” sur le site BBC News — illustrent une fois de plus que tout État a une grande difficulté à assumer son passé.

Pour Amnesty international, il est maintenant nécessaire que toutes les parties du conflit nord-irlandais reconnaissent le rôle qu’elles ont joué dans cette sale histoire. Opposée à une amnistie générale qui « serait une trahison absolue pour les victimes », l’organisation demande que tous ceux qui ont « cautionné ou commis des actes de torture – un crime qui relève du droit international – rendent des comptes. »
Pour cela, Amnesty international réclame la mise en place d’un « mécanisme global pour examiner le conflit dans son ensemble, établir la vérité sur les violations des droits de humains non élucidées et déterminer les responsabilités. »


Quand le Royaume-uni torturait en Irlande du Nord

Source : Amnesty international, le 12 juin 2014


Les allégations diffusées le 4 juin dans un documentaire sur la chaîne de télévision publique irlandaise RTÉ, selon lesquelles le gouvernement britannique a cautionné le recours à la torture en Irlande du Nord dans les années 1970 et s’est abstenu de révéler des éléments de preuve pertinents à la Cour européenne des droits de l’homme, attestent de l’incapacité à mettre en place un mécanisme global afin de faire face au passé.

En 1971, l’Irlande a soumis la première requête interétatique à la Cour européenne des droits de l’homme, affirmant que la Grande-Bretagne avait violé la Convention européenne des droits de l’homme. Le recours à la torture durant la détention fut centrale dans cette affaire, concernant 14 détenus (les « hooded men »).

Un documentaire édifiant sur la torture

Le documentaire, intitulé The Torture Files, se fonde sur les investigations menées par le Centre Pat Finucane, ONG qui défend les droits humains en Irlande du Nord, et la RTÉ (chaîne de télévision publique irlandaise). Il affirme que le gouvernement britannique, dans le cadre de sa défense, a dissimulé à la Cour européenne des droits de l’homme des éléments de preuve pertinents.

Pas une semaine ne se passe sans qu’une révélation n’éclate sur le passé trouble du Royaume Uni en Irlande du Nord. Le fait qu’il ait fallu les enquêtes d’une ONG et de journalistes persévérants pour déterrer ce triste épisode concernant l’incapacité de l’État à admettre qu’il a cautionné la torture fait écho au manque de détermination à faire face au passé.

Mettre en place un mécanisme global pour mener des enquêtes efficaces

Les nouvelles allégations sur cette affaire et d’autres cas choquants mettent en évidence la nécessité pour toutes les parties de reconnaître le rôle qu’elles ont joué dans cette histoire sordide. Tous les responsables qui ont cautionné ou commis des actes de torture – un crime qui relève du droit international – doivent rendre des comptes.

Les recherches qu’a menées Amnesty International sur la torture en détention en Irlande du Nord dans les années 1970, notamment publiées dans deux rapports en 1971 et 1978, ont largement contribué au fait que ces affaires soient portées devant la Cour européenne.

Amnesty International réclame la mise en place d’un mécanisme global pour examiner le conflit dans son ensemble, établir la vérité sur les violations des droits humains non élucidées et déterminer les responsabilités.

Ce mécanisme doit également traiter les atteintes subies par les personnes grièvement blessées et les victimes de torture et d’autres formes de mauvais traitements, qui sont trop souvent exclues des procédures existantes.

Irlande du Nord. Une amnistie générale serait une trahison absolue pour les victimes

Communiqué d’Amnesty international, le 20 novembre 2013


L’appel du Procureur général d’Irlande du Nord, qui suggère de mettre un terme aux procédures judiciaires dans les affaires d’homicides qui ont marqué trente ans de violences politiques en Irlande du Nord, est une trahison absolue du droit fondamental des victimes à obtenir justice, a déclaré Amnesty International mercredi 20 novembre.

Le Procureur général John Larkin a déclaré qu’il ne devrait y avoir ni information judiciaire pour déterminer les causes de la mort, ni enquête d’aucune sorte, ni poursuites judiciaires pour les homicides commis avant la signature de l’accord de paix dit « du Vendredi saint » (ou accord de Belfast), en 1998.

John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International, a déclaré :

« L’appel lancé le 20 novembre par le Procureur général accorderait, dans les faits, une amnistie générale pour des atteintes et des violations des droits humains commises par toutes les forces en présence durant trente années de violences politiques en Irlande du Nord. Ce serait une trahison absolue du droit fondamental des victimes à la justice.

« Une telle mesure foulerait au pied les normes internationales des droits humains et perpétuerait l’impunité.

« Amnesty International est bien consciente des difficultés que représentent des procédures judiciaires après tant d’années, mais il n’en reste pas moins vital, lorsqu’il existe suffisamment d’éléments probants, que les personnes soupçonnées d’avoir perpétré des homicides, des attaques ayant mis des vies en danger, ou des actes de torture et autres mauvais traitements soient traduites en justice.

« Bien trop souvent déjà, les enquêtes bancales sur les atteintes et violations des droits fondamentaux commises par le passé n’ont pas apporté aux victimes ce que celles-ci étaient en droit d’attendre. Les suggestions émises le 20 novembre par le Procureur général seraient une nouvelle trahison pour les nombreuses victimes d’Irlande du Nord. »

En septembre, Amnesty International a publié un rapport intitulé Northern Ireland : Time to deal with the past. Ce rapport conclut que le système d’enquête non global établi en Irlande du Nord s’est avéré inadapté à la tâche qui consistait à faire toute la lumière sur les atteintes et violations des droits humains commises par toutes les parties durant trente années de violences politiques.

Amnesty International continue d’appeler à la mise en place d’un mécanisme complet chargé d’examiner le conflit dans son ensemble, d’établir la vérité sur les violations des droits humains non élucidées et de déterminer les responsabilités.

P.-S.

Voir la décision du 18 janvier 1978 de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Irlande contre Royaume-Uni :
http://hudoc.echr.coe.int/sites/eng....


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