libération conditionnelle et liberté d’expression


article  communiqué de la LDH  de la rubrique libertés
date de publication : mardi 14 octobre 2008
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Au sujet de la réincarcération de Jean-Marc Rouillan à la suite de ses déclarations rapportées dans l’hebdomadaire L’Express [1], la Ligue des droits de l’Homme déclare que « mieux vaut appliquer l’interdiction légale de faire l’apologie d’un crime que d’interdire a priori toute expression » [2].


COMMUNIQUÉ LDH

Paris, le 14 octobre 2008

Libération conditionnelle et liberté d’expression

Peut-on faire du silence d’un homme sur les faits qui l’ont conduit en prison la condition de sa libération conditionnelle ? La loi le prévoit pour les infractions particulièrement graves dont les atteintes à la vie : parmi les conditions particulières que le juge peut imposer, figure celle de s’abstenir de toute intervention publique relative à l’infraction commise.

Jean-Marc Rouillan s’est exprimé dans une interview accordée à L’Express. Au journaliste qui lui demandait s’il regrettait les actes d’Action directe, et notamment l’assassinat de G. Besse, Rouillan fait une réponse ambiguë et ne se contente pas de dire qu’il n’a pas le droit de s’exprimer sur ce sujet. Que Rouillan ne soit pas un repenti ne peut étonner personne. Mais si, officiellement, nul n’exige cela de lui, c’est bien ce que l’on en attend, car un propos de Rouillan d’une autre nature n’aurait pas entraîné la même réaction.

Rouillan a parlé sans parler tout en parlant. Si l’on doit en tirer comme conséquence sa réincarcération, il faut dire clairement le discours que l’on veut entendre des membres d’Action directe. De simples paroles, même sujettes à interprétations, méritent-elles des années de prison alors qu’il a subi sa peine et que la justice a considéré qu’il remplissait les conditions nécessaires à une liberté conditionnelle, au demeurant très partielle, puisqu’il était astreint à dormir en prison ?

Jean-Marc Rouillan a été condamné pour les crimes commis ; le respect dû à ses victimes exige qu’il respecte certaines obligations. Ceci ne peut signifier qu’il soit interdit d’aborder cette période et notre société démocratique doit être suffisamment mûre pour ne pas être déstabilisée par des propos, fussent-ils difficiles à lire ou entendre. Mieux vaut appliquer l’interdiction légale de faire l’apologie d’un crime que d’interdire a priori toute expression.

Notes

[1Voici ce que Jean-Marc Rouillan a répondu au journaliste qui lui demandait, à l’occasion d’une interview publiée dans L’Express le 1er octobre, « Regrettez-vous les actes d’Action directe, notamment cet assassinat ? »

« Je n’ai pas le droit de m’exprimer là-dessus... Mais le fait que je ne m’exprime pas est une réponse. Car il est évident que si je crachais sur tout ce qu’on avait fait, je pourrais m’exprimer. Mais par cette obligation de silence, on empêche aussi notre expérience de tirer son vrai bilan critique. »

[2Lire sur ce site les déclarations de Francis Zamponi au sujet d’une stèle érigée à Béziers en hommage à l’OAS.


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