à quoi sert le SDIG ?


article de la rubrique libertés
date de publication : mercredi 18 mars 2009
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Suite à une information inexacte, cet article avait été initialement intitulé « à quoi sert la DCRI ? ». Mais d’après la mise au point du 17 mars émanant de la police que nous reprenons plus bas, l’article ci-dessous met en scène des fonctionnaires du SDIG (et vous trouverez des précisions sur la DCRI sur cette autre page).

Parmi les attributions du Service départemental d’information générale (SDIG), issu avec la DCRI de la fusion de la DST et des RG [1], figure la surveillance de la jeunesse. Rappelez-vous l’histoire de Simon, 19 ans, président d’un syndicat de lycéens. Il a raconté sa convocation au commissariat de Lens, le 26 novembre 2008 : « J’ai été reçu par un fonctionnaire qui s’est présenté comme le responsable des renseignements généraux pour les collèges et lycées du bassin minier [...] L’entretien était très calme, il était très poli, mais il m’a demandé de faire attention parce que le fait d’aller trop loin dans le syndicalisme pourrait me fermer des portes pour les concours de la fonction publique. »

[Première mise en ligne le 16 mars 2009, corrigée et complétée le 18 mars]

Un lycéen met en ligne un site sur les réformes Darcos. La police se déplace dans son établissement pour obtenir son dossier scolaire.

par Hélène Bréault, Le Parisien du 13 mars 2009


Son blog déclenche une enquête de police.

Stéphane [2], un lycéen de 15 ans habitant à Bry-sur-Marne, ne se doutait pas que créer un blog aurait de telles conséquences. A peine en service, son site consacré aux réformes Darcos a été repéré par la police . « C’est même la DCRI (NDLR : Direction centrale du renseignement intérieur), ex-renseignements généraux, qui s’est présentée dans son établissement du Perreux pour demander son dossier scolaire », détaille Johan Ankri, conseiller municipal de Bry (PS).

Le jeune homme n’a toujours pas compris ce qui a pu se passer… « J’ai participé aux manifestations contre les réformes Darcos et les suppressions de postes, raconte Stéphane, élève de seconde. Avec un ami, nous avons pensé qu’il serait intéressant de créer un blog pour informer les jeunes du Val-de-Marne des mouvements de grève, expliquer les réformes et leurs conséquences. » Le blog CIL 94170 (Comité indépendant lycéen) est mis en ligne pendant les vacances de Noël et, début janvier, après une rapide discussion téléphonique avec une journaliste, s’est retrouvé dans les colonnes d’un hebdomadaire.

« Que fait-on du droit d’expression ? »

« En rentrant de vacances, le 5 janvier, on a un peu parlé du blog entre nous, mais sans plus. Le lendemain, le conseiller principal d’éducation est venu me chercher en classe et m’a interrogé sur le site. J’ai appris que deux policiers étaient venus au lycée pour avoir des renseignements sur nous et nos parents. Depuis je n’ai pas de nouvelles. Je sais seulement que le blog a été désactivé il y a quelques jours et c’est frustrant. » Une décision prise apparemment par le cocréateur du blog.

Pour les parents de Stéphane, par ailleurs délégué de classe et membre du conseil municipal des jeunes de Bry, l’enquête de police est disproportionnée. « Que fait-on du droit d’expression ? s’insurge son père. Ces deux adolescents ont simplement voulu s’impliquer dans la vie citoyenne, ouvrir le débat sur les réformes de l’Éducation. Maintenant, on leur demande de s’écraser, de ne pas faire de vagues, c’est inacceptable. » Les parents vont engager des démarches pour savoir si leur fils sera fiché dans une quelconque base de données policières.
Johan Ankri a écrit à plusieurs parlementaires et au ministère de l’Intérieur pour « faire part de son indignation devant ce comportement de l’État, qui constitue une atteinte à la liberté d’opinion et au droit d’expression. »

Contacté, le ministère de l’Intérieur n’a pas apporté de précisions sur cette affaire. Stéphane va poursuivre son engagement citoyen au sein du conseil municipal des jeunes de Bry. « La leçon que j’ai retenue de cette histoire, c’est : Tais-toi quand tu parles. »

Hélène Bréault

Suite à un article portant sur le même sujet paru dans Rue89, « Deux policiers des ex-RG dans le lycée d’un jeune blogueur », un haut responsable de la police qui souhaitait garder l’anonymat, a tenu à clarifier un certain nombre de points. Selon lui, les deux agents qui se sont effectivement rendus au lycée du jeune blogueur se seraient présentés non pas comme des membres de la DCRI, comme l’aurait affirmé la proviseure au jeune homme, mais comme des ex-RG. Nous reprenons ci-dessous la mise au point parue dans Rue89.

La réponse de la police

[publiée sur Rue89 le 17 mars 2009]


« La mission des SDIG est d’informer les autorités sur tout ce qui relève de la contestation sociale. Si la liberté de manifestation est un droit, elle se doit tout de même d’être encadrée, et ce afin d’éviter tout débordement. Nous avons donc à ce titre un rôle d’anticipation et il est important pour nous, dans ce cadre, d’avoir des interlocuteurs.

Nous sommes là pour protéger les manifestants, et la police travaille main dans la main avec les organisateurs. Dans le cadre de notre mission d’information générale, notre rôle est de suivre les mouvements sociaux, pas de les empêcher.

Or les fonctionnaires ont repéré ce blog (CIL94170) via la veille que nous opérons sur Internet. Sur ce site apparaissaient les prénoms et numéros de téléphone des deux auteurs. Estimant que le blog était intéressant et bien fait, les deux agents ont donc cherché à les identifier, et ce dans le cadre de leur mission de suivi des manifestations lycéennes.

Ces deux fonctionnaires, qui entretiennent de bonnes relations avec la proviseure, ont donc pris rendez-vous afin de s’enquérir des identités et dates de naissance des deux blogueurs, informations qu’a fournies la proviseure. Nous n’avons en revanche en aucun cas consulté leurs dossiers scolaires, contrairement à ce qu’affirme le jeune homme.

Vous laissez par ailleurs entendre que ces jeunes garçons pourraient faire l’objet d’un fichage. Je tiens à assurer que nous ne fichons personne, nous ne sommes d’ailleurs juridiquement pas en mesure de le faire, le futur fichier EDVIRSP étant actuellement dans les tuyaux de la Cnil.

Enfin, je tiens à préciser qu’il n’y a eu aucune intimidation puisque nous n’avons pas rencontré physiquement ces personnes. Il nous importait simplement d’identifier les auteurs de ce blog, et ce pour une raison : le jour où ils se rendent sur la voie publique, il est important que nous sachions quelles sont leurs intentions afin de faire en sorte d’éviter tout débordement. »

Notes

[1Voir l’arrêté du 27 juin 2008 relatif aux missions et à l’organisation de la direction centrale de la sécurité publique
NOR : IOCC0815022A http://www.legifrance.gouv.fr/affic....

[2Le prénom a été changé.


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