il y a 30 ans, la France abolissait la peine de mort


article  discours de Pierre Tartakowsky  de la rubrique peine de mort > en France
date de publication : jeudi 13 octobre 2011
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Ci-dessous, une vidéo de la première partie du discours prononcé le 17 septembre 1981 à l’Assemblée nationale par Robert Badinter, alors ministre de la justice du gouvernement de Pierre Mauroy, suivi de l’intégralité de ce discours.

Vous trouverez à la suite le discours de Pierre Tartakowsky, président de la LDH, prononcé le 10 octobre 2011 à l’occasion du 30e anniversaire de cette abolition au « village contre la peine de peine », sur le parvis de l’Hôtel de ville de Paris.


Discours de Robert Badinter sur l’abolition de la peine de mort à l’Assemblée nationale, le 17 septembre 1981 (1/2 – 25min 36s).


Le discours de Robert Badinter demandant à l’Assemblée nationale, le 17 septembre 2011, d’abolir la peine de mort en France, est publié dans son intégralité sur le site internet de la Documentation française.

Discours de Pierre Tartakowky le 10 octobre 2011

La LDH tout naturellement est présente à ce rassemblement de témoignage et de lutte contre la peine de mort. Elle s’est crée contre l’injustice et la peine capitale représente le summum de l’injustice d’autant plus insupportable qu’elle est par définition, sans remède. Nous sommes donc partie prenante des mobilisations qui se développent pour l’abolition de la peine de mort depuis sa création. Cela a été le cas pour les Rosenberg, pour Mumia Abu Jamal et plus récemment pour Troy Davis ; c’est un combat que nous continuons de mener concernant l’Iran, la Chine et partout ailleurs.

Cet engagement est par ailleurs inséparable de ceux que nous menons contre toute tentative de faire prévaloir dans notre pays la barbarie sur la justice.

Certes, la peine de mort est interdite en France et elle n’est pas, comme on dit, « tendance ». Mais elle compte toujours ses partisans ; et leurs propositions dessinent dans le débat public l’ombre portée d’une guillotine d’un type nouveau. C’est ainsi qu’une série de propos, de propositions sur la justice et la peine sont délibérément structurés – sinon par la peine de mort du moins par sa logique prophylactique –, qui est celle de l’élimination définitive.

On a vu ces derniers temps, formulées au plus haut degré de l’État des théories sur la maladie mentale, sur la criminalité, sur telle ou telle population, qui les renvoient – et nous avec elles – aux temps funestes des théories génétiques, de l’eugénisme et d’un hygiénisme radical.

Des actes ont suivi, bousculant les droits et les libertés, ouvrant par exemple à des peines d’incarcération quasi à vie, à des enfermements sans fin, au motif non pas de ce qui avait été commis mais de ce qui pourrait peut-être se commettre…

C’est pour faire reculer ce scénario à la Minority report, cette culture mortifère et les peines qui l’accompagnent que la LDH lie étroitement ses mobilisations contre la peine capitale dans le monde à celles qu’imposent les progrès de la justice en France. Nous sommes heureux de pouvoir le faire aujourd’hui tous ensemble. Sachons poursuivre nos combats dans l’unité la plus large.

Pierre Tartakowsky
Président de la LDH


Troy Davis a été exécuté

LEMONDE.FR avec AFP et Reuters, le 22 septembre 2011


La Cour suprême a refusé d’annuler l’exécution de Troy Davis. Il lui a fallu plus de quatre heures pour rendre son avis, un délai exceptionnellement long pour ce genre de cas.

La Cour suprême a refusé d’annuler l’exécution de Troy Davis. Il lui a fallu plus de quatre heures pour rendre son avis, un délai exceptionnellement long pour ce genre de cas.AP/Stephen Morton

Malgré la mobilisation, il n’y a pas eu de miracle pour Troy Davis. L’Américain a été exécuté mercredi par injection létale à 23 h 08 heure locale (5 h 08 jeudi, heure de Paris), a annoncé le pénitencier de Jackson, en Géorgie.

Juste avant son exécution, cet Afro-Américain de 42 ans a répété qu’il n’était pour rien dans la mort du policier blanc pour laquelle il a été condamné en 1991. "Ce n’était pas de ma faute, je n’avais pas d’arme", a déclaré Troy Davis, d’après une journaliste locale qui a assisté à l’exécution aux côtés des parents de la victime. "A ceux qui s’apprêtent à m’ôter la vie, que Dieu vous bénisse", a-t-il ajouté. Aux abords de la prison, à Jackson, plusieurs centaines de manifestants s’étaient rassemblés en espérant que la sentence ne serait pas exécutée.

Ils scandaient "S’il vous plaît, ne laissez pas mourir Troy Davis" et "Je suis Troy Davis !" Les manifestations, qui ont commencé en début d’après-midi, ont eu lieu sur fond de forte présence policière et deux personnes au moins ont été appréhendées.

Retard

Initialement prévue à 19 heures, heure locale, l’exécution a été retardée de plus de quatre heures, dans l’attente d’une décision de la Cour suprême des Etats-Unis, qui a finalement autorisé la mise à mort. Le décès de Troy Davis a été constaté une quinzaine de minutes après le début de la mise à exécution. Les centaines de manifestants présents à l’extérieur de la prison ont accueilli la nouvelle dans un profond abattement après avoir espéré pendant des heures un improbable geste de la plus haute juridiction du pays.

Le gouvernement français a rapidement réagi pour regretter l’exécution. "Nous déplorons vivement que les nombreux appels à la clémence n’aient pas été entendus", a fait savoir le ministère des affaires étrangères, dans un communiqué.

Condamné à mort pour le meurtre du policier Mark MacPhail, tué par balles sur un parking de Savannah en 1989, Troy Davis avait déjà échappé à trois exécutions grâce à de multiples recours judiciaires évoquant des doutes quant à sa culpabilité. Lors du procès, neuf témoins l’avaient désigné comme l’auteur du coup de feu, mais l’arme du crime n’avait jamais été retrouvée et aucune empreinte digitale ou ADN n’avaient été relevés. Depuis, sept témoins s’étaient rétractés, certains d’entre eux affirmant avoir été incités par la police à accuser Troy Davis.

Rejet par la Cour suprême

La décision de la Cour suprême a mis fin à une journée d’intenses efforts de l’avocat de Troy Davis, qui a réclamé une suspension de l’exécution en assurant avoir "de nouvelles preuves" exonérant son client. La requête déposée mercredi matin par Me Brian Kammer citait notamment "un faux témoignage" du médecin légiste qui a autopsié le corps du policier tué. Mais cette requête a été rejetée successivement en première instance puis par la Cour suprême de Géorgie et enfin par la Cour suprême des Etats-Unis. La veille, le Comité des grâces de Géorgie avait rejeté un précédent recours, ouvrant la voie à l’exécution. Troy Davis s’était ensuite adressé par écrit à ses partisans depuis le couloir de la mort où il se trouvait depuis vingt ans, affirmant que "le combat pour la justice" ne s’arrêterait pas avec lui.

Le président Barack Obama avait fait savoir mercredi soir qu’il se refusait à intervenir. Le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney, a indiqué qu’il n’appartenait pas au président "de peser sur des affaires spécifiques comme celle-ci, qui est une procédure d’Etat fédéré". Interrogée sur la chaîne de télévision CNN, Anneliese MacPhail, la mère du policier tué en 1989, a dit attendre "soulagement et paix" de l’exécution de Troy Davis, après "l’enfer" qu’elle a vécu depuis la mort de son fils.

“Barbarie”

Présenté par ses partisans comme le prototype du Noir condamné à tort, M. Davis jouit de l’appui de personnalités comme l’ancien président Jimmy Carter, le pape Benoît XVI ou l’actrice Susan Sarandon, et des centaines de manifestations de soutien ont eu lieu partout dans le monde. Le New York Times avait dénoncé "les nombreuses graves erreurs" commises dans le dossier Davis, qui, selon le quotidien, prouvaient à nouveau "la barbarie de la peine de mort".

Quelques heures avant Troy Davis, au Texas, Lawrence Brewer, un Américain de 44 ans membre du Ku Klux Klan condamné pour un meurtre raciste, était lui aussi exécuté. Les Etats-Unis ont pratiqué 46 exécutions en 2010.


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