coupable de défendre les droits humains ?


article de la rubrique Algérie
date de publication : lundi 23 janvier 2023
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La LADDH publie un communiqué suite à sa dissolution en septembre 2022. La FIDH réagit.


Communiqué : La LADDH coupable de faire dans les droits humains

La Ligue Algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) confirme, ce dimanche 22 janvier 2022, l’authenticité du document balancé sur les réseaux sociaux par de tierces personnes, d’une manière intrigante et illégale, relatif à un arrêt du tribunal administratif d’Alger portant sur la dissolution de la LADDH.

Ainsi, le Ministère de l’intérieur a introduit devant le tribunal administratif d’Alger, en date du 4 mai 2022, une requête introductive par laquelle il demande la dissolution de notre organisation. Le tribunal statue en faveur de Ministère de l’intérieur en date du 29 juin de la même année. Le jugement portant la dissolution de la LADDH porte la date du 29 septembre 2022. La LADDH fut absente ou évitée durant toute la procédure qui l’a visée.

Comme d’autres organisations et partis politiques, la LADDH paye son engagement, au même titre que des millions d’Algériens et Algériennes, dans le mouvement pacifique du Hirak. Un engagement pour la démocratie, les libertés et les droits humains. Et comme d’autres organisations, la question de la conformité avec la loi sur les associations a toujours fait objet de blocage et d’instrumentalisation de la part des pouvoir publics. Comment ne pas douter de cet argument quand on sait que les véritables membres de la LADDH se sont inscrits dans une dynamique collective de refondation de l’organisation et sa stabilisation.

Plus surprenant encore, il est reproché à la LADDH de travailler sur la question des droits de l’Homme avec d’autres instances et organisations internationalement reconnues Il est reproché à la ligue de faire dans les droits humains, selon sa devise : « les droits de l’homme sont universels et indivisibles ». Plus encore, il est reproché à certains de ses véritables membres d’avoir des opinions, d’être au contact des citoyens. De militer pour les droits des migrants, pour les droits des travailleurs, ou encore le droit des familles de Harraga de connaitre le sort de leurs proches.
Révoltant. De tout temps, la LADDH, dont l’histoire se confond avec l’histoire de la Nation, a toujours été ostracisée et combattu par les différents pouvoirs politiques. Elle a toujours résisté et elle résistera encore.
La LADDH dénonce l’acharnement continu qui la cible et qui prend avec cette dernière décision, une proportion d’une extrême gravité. Elle étudiera ce jugement et fera valoir ses droits en usant de tous les moyens légaux et légitimes disponibles.

Le 23 janvier 2023, La LADDH
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FIDH - Fédération internationale pour les droits humains

Déclaration - Dissolution de la La Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme : la répression s’abat sur l’un des derniers bastions de la démocratie en Algérie

La FIDH a appris la dissolution par la junte algérienne de son organisation membre en Algérie, la LADDH. Si cette décision n’est pas surprenante, au regard du contexte algérien de fermeture de la société civile, elle n’en est pas moins extrêmement choquante et préoccupante. En particulier, les modalités de cette décision sont particulièrement ubuesques et en disent long sur l’absence d’indépendance de la justice en Algérie.

Paris, le 23 janvier 2023— C’est par les réseaux sociaux que la LADDH (Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme) a appris sa dissolution, vendredi 20 janvier. L’organisme avait été tenu à l’écart de l’ensemble de la procédure, débutée le 4 mai 2022 par une requête introductive du ministère de l’intérieur devant le tribunal administratif d’Alger, demandant cette dissolution. Le tribunal, toujours sans prévenir la LADDH, a statué le 29 juin en faveur du ministère, ne rendant publique cette décision qu’en septembre, sans toutefois la communiquer à la partie concernée. Une façon de faire curieuse, qui n’a jamais laissé aux accusé·es la possibilité de se défendre, ni même de prendre connaissance de ce qui lui est reproché avant vendredi dernier.

La plainte du ministère de l’Intérieur serait motivée par la non-conformité de l’organisation aux textes en vigueur régissant les associations. En réalité, il est évident que ces accusations ne reposent sur aucun fondement. C’est le rôle de défense des droits humains, de la liberté et de la démocratie qui est reproché à la LADDH. Son travail sur la question des droits humains, en collaboration avec d’autres instances et organisations internationales est d’ailleurs explicitement mentionné dans le texte du jugement.

Museler la voix des sans voix : Depuis sa création en 1985, la Ligue Algérienne de la Défense des Droits de l’Homme a été la voix des sans voix. Elle a toujours dénoncé la répression des opposant·es politiques, des manifestant·es pacifiques, des mouvements citoyens. Elle a soutenu les victimes et était aux côtés des plus démuni·es, en particulier les familles des migrant·es ou les minorités religieuses.

Le régime algérien continue ainsi sa chasse aux voix dissidentes. La répression de la société civile algérienne, notamment sa frange la plus proche du Hirak, ce grand mouvement pro-démocratie lancé en 2019, n’a pas commencé aujourd’hui. Il a touché des associations “pro-hirak” dont le Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ), l’Association SOS Bab Eloued ou encore les médias indépendants comme la Radio Med et Maghreb Emergent, interdits par les autorités, dans ce qui s’apparente à un acharnement judiciaire continu. Cette nouvelle décision condamne ainsi le dernier témoin indépendant, reconnu par les instances internationales et actif pour la défense des droits humains en Algérie.

“L’acharnement que subit notre organisation en Algérie ne montre qu’une seule chose : la défense des droits humains fait peur aux régimes autoritaires,” déclare Alice Mogwe, présidente de la FIDH. “L’exemple algérien est frappant, mais ce n’est pas le seul. Il rappelle la dissolution d’une autre ONG membre de la FIDH et tout aussi emblématique : Mémorial, dissoute par l’État russe en décembre 2021. Le parallèle est frappant.”

“La LADDH sait pouvoir compter sur le soutien sans faille de la FIDH,” déclare Yosra Frawes, responsable Maghreb et Moyen-Orient à la FIDH. “A travers la LADDH, c’est toute la société civile algérienne, ses activistes pour les droits humains, pour les droits des femmes, pour la démocratie et pour le droit à la mémoire des crimes passés que nous soutenons.”

“ Avec la dissolution arbitraire de la LADDH , le régime algérien assume pleinement devant l’opinion nationale et internationale sa nature dictatoriale”, déclare Aïssa Rahmoune, vice-président de la LADDH et de la FIDH. “C’est une remise en cause des acquis démocratique de plusieurs générations de militant.es des droits humains, on ne va pas se taire.”


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