vote électronique = démocratie en danger


article de la rubrique démocratie
date de publication : mercredi 12 août 2009
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L’informatique intervenant désormais dans quasiment tous les domaines de la vie courante, il semble, de prime abord, naturel d’envisager son utilisation pour les élections. Mais ce processus, à la base de la vie démocratique, présente des caractéristiques tout à fait particulières :

  • transparence : chaque électeur a le droit et la possibilité effective de contrôler toutes les étapes d’un scrutin,
  • confidentialité : chaque électeur peut effectuer son choix en secret,
  • anonymat : il doit être impossible de faire un lien entre un bulletin et l’électeur qui l’a choisi,
  • sincérité : les résultats du scrutin doivent fidèlement refléter les choix des électeurs – alors qu’il y a toujours eu des tentatives de fraude ...

Au terme de nombreuses études, il apparaît que le vote électronique est moins fiable que le “vote papier” car sa complexité introduit de multiples failles de sécurité, tandis que le manque de transparence inhérent à l’outil informatique entraîne inéluctablement des doutes sur la sincérité des élections.

Considérant que le vote électronique remet en cause les fondements de notre démocratie, une pétition demandant le maintien du vote papier a été lancée le 28 février 2007 – toujours active, elle a été signée à ce jour par plus de 100 000 personnes.


Un florilège d’événements récents ...

  • Août 2009 – Le vote électronique condamné avec sursis en Wallonie : « Mettre fin à l’expérimentation actuelle du vote électronique en Wallonie afin de renforcer le contrôle démocratique sur l’organisation des élections communales et provinciales » [Extrait du programme du nouveau gouvernement wallon].
  • Juillet 2009 – Une association dépose au Conseil d’État un recours en annulation de résultats du scrutin pour l’élection des représentants à l’Assemblée des Français de l’Étranger le 7 juin dernier, pour dysfonctionnement du vote électronique par Internet.
  • Juin 2009 – Lors des élections européennes, des observateurs font part de problèmes posées par des machines à voter à Meylan (Isère) : des personnes admettent avoir voté n’importe quoi – « j’avais la pression, j’ ai appuyé n’importe où... ».
  • Janvier 2009 – Répondant le 27 janvier à une question orale posée par la sénatrice Nicole Borvo Cohen-Seat qui l’interrogeait sur des incidents constatés mettant « en question la fiabilité du vote électronique », Alain Marleix, secrétaire d’Etat à l’Intérieur ne peut répondre que par des banalités : « La fiabilité des systèmes, leur intégrité et leur sécurité, ainsi qu’un niveau élevé de transparence sont nécessaires. »
  • Août 2008
    Diebold / Premier Election Software admet que ses machines à voter sont défectueuses : elles “perdent” des votes.
  • Juillet 2008 – Une étude, réalisée par une chercheuse du laboratoire d’informatique de Nantes-Atlantique et portant sur les trois derniers scrutins nationaux, pointe un nombre “d’erreurs” plus élevé dans les bureaux utilisant des ordinateurs de vote que dans les bureaux traditionnels.
  • Printemps 2007 – Un chercheur français met en évidence les difficultés des personnes âgées à utiliser des machines à voter : plus de la moitié se tromperaient de candidat, sans toujours s’en apercevoir !
  • 18 mai 2003 – Lors des élections, à Schaerbeek (Belgique), un candidat obtient plus de voix qu’il n’est possible d’en obtenir (Les erreurs ne peuvent être constatées que si elles conduisent à des résultats absurdes ou impossibles).
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Cabu (Le Canard enchaîné du 28 mars 2007)

En France

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Machine à voter (Brest, mars 2004).

1. L’article L. 57-1 du code électoral permet aux communes de plus de 3 500 habitants d’utiliser des machines à voter à l’occasion des scrutins [1].

2. Le vote par internet est autorisé pour les élections professionnelles depuis 2007 [2].
Il échappe au contrôle des premiers concernés, les salariés :

« Lors de l’élection par vote électronique, les fichiers comportant les éléments d’authentification des électeurs, les clés de chiffrement et de déchiffrement et le contenu de l’urne sont uniquement accessibles aux personnes chargées de la gestion et de la maintenance du système. [...] »

[Code du travail, article R2324-6]


3. Pour d’autres cas, voir http://www.ordinateurs-de-vote.org/...

Communiqué de presse du CREIS sur les machines à voter [3]

Stoppons la progression du vote électronique en France

De nombreux pays sont tentés de remplacer le processus manuel de dépouillement des bulletins lors des élections par des machines à voter qui comptabilisent les votes. En France, des communes s’apprêtent à acquérir des ordinateurs de vote (dénommés “machines à voter” par le code électoral) afin de conduire les prochaines élections. À ce jour, plus d’un million d’électeurs utiliseront des ordinateurs de vote en 2007. Les fabricants pratiquent une publicité mensongère allant jusqu’à dire que ces machines ne sont pas des ordinateurs et les mairies en sont victimes au nom du progrès ou de la "rationalité" technique. Elles espèrent des économies et mettent en avant un désintérêt pour l’engagement citoyen.

Le CREIS dénonce :

  • L’absence de débat, alors qu’il ne s’agit nullement d’une modification technique mais bien d’une remise en cause radicale de la procédure de vote, pilier de la démocratie représentative.
  • Le procédé antidémocratique, car il autorise une fraude indétectable : dans une élection traditionnelle, pour limiter le risque de fraude, il suffit de surveiller les urnes le jour de l’élection ; les ordinateurs de vote peuvent être piratés à tout moment avant l’élection. Des erreurs ou fraudes jalonnent l’utilisation des ordinateurs de vote.
  • L’absence de contrôle par les citoyens : pas de trace de l’expression de son vote, plus de dépouillement public.
  • L’absence de transparence, base même de la démocratie : le logiciel intégré dans une puce est protégé par le secret industriel, secret qui s’étend jusqu’aux rapports d’agrément.
  • La refus de prendre en compte, par mesure de précaution, les problèmes rencontrés à l’étranger et les moratoires décidés par certains pays.

Le CREIS demande au Ministre de l’Intérieur en application du principe de précaution,

  • d’annuler l’agrément des ordinateurs de vote afin d’en suspendre toute utilisation en France,
  • de mettre en place une commission d’expertise contradictoire et publique afin d’évaluer le vote électronique.

Le 15 février 2007

Communiqué de l’ASTI

adopté par le Conseil des Membres de l’ASTI le 13 décembre 2007 [4]


La Fédération des Associations Françaises des Sciences et des Technologies de
l’Information (ASTI) appelle à ne pas recourir au vote électronique anonyme au
nom du principe de précaution.

L’ASTI est convaincue que les sciences et technologies de l’information peuvent contribuer positivement au développement de la démocratie. Elle tient cependant à alerter les pouvoirs publics sur l’impossibilité en l’état actuel de la technologie de réaliser un vote anonyme contrôlable directement par les électeurs et en conformité avec les dispositions de la Constitution et du Code électoral. Des recherches se développent mais n’ont pas encore abouti à des systèmes permettant l’exercice d’un contrôle démocratique indiscutable.

Dans l’attente de ces avancées scientifiques et technologiques, l’ASTI recommande que ces recherches soient poursuivies et que pouvoirs publics, partis politiques et société civile ne recourent en aucune manière au vote électronique anonyme, y compris au moyen de machines à voter.

Quelques documents

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Notes

[1Voir également sur le site du ministère de l’Intérieur : http://www.interieur.gouv.fr/sectio....

[2Il a été introduit par le décret n° 2007-602 du 25 avril 2007 relatif aux conditions et aux modalités de vote par voie électronique pour l’élection des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d’entreprise.

Une action d’Ordinateurs de vote

Le recensement des élections électroniques

Vous êtes appelé à voter lors d’un scrutin professionnel ou dans le cadre de votre retraite.

Il s’agit d’un vote électronique ou d’un vote par correspondance avec dépouillement automatique des bulletins de vote (présence d’un code barre ou d’un numéro vous identifiant sur le bulletin de vote).

Merci de communiquer à contact(arobase)ordinateurs-de-vote.org :

  • la nature du scrutin,
  • le calendrier (dates de vote),
  • si possible, une photocopie ou un scan du matériel de vote.

Même si les élections sont passées, vous pouvez envoyer ces informations dans un but de recensement des élections électroniques.

[3CREIS – Centre de coordination pour la Recherche et l’Enseignement en Informatique et Société : http://www.creis.sgdg.org

[5Cet article a été publié dans Jus Politicum, N°2, mars 2009, Droit, politique et justice constitutionnelle.

Le site de Chantal Enguehard : http://www.sciences.univ-nantes.fr/... comporte d’autres éléments intéressants et notamment une note technique (4 pages - 24 Ko - format pdf) sur les ordinateurs de vote.

Voyez également le site Ethique citoyenne.


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