violences policières en Tunisie


article de la rubrique international > Hors Europe
date de publication : jeudi 27 janvier 2022
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Manifestants molestés, journalistes tabassés, que cesse l’impunité. Justice pour toutes les victimes de l’Etat policier .


24 janvier 2022 – Tribune collective “Contre les violences policières et sexistes en Tunisie, solidarité internationale !” publiée dansLibération

Lire la tribune publiée par un collectif d’associations (dont la LDH), de syndicats et de collectifs surLibération

A Tunis, les forces de police agressent impunément les habitant·e·s des quartiers populaires, les personnes LGBT, les militant·e·s, les journalistes critiques, comme Arroi Baraket, et les opposant·e·s politiques. Un collectif demande la fin de l’impunité et justice pour toutes les victimes.

Le soir du 17 septembre dernier, la journaliste et féministe Arroi Baraket a fait l’objet d’une agression à caractère sexiste par un agent de police, à Tunis, alors qu’elle filmait une scène mettant en évidence l’arbitraire policier dans la gestion du couvre-feu. L’agent de police s’est notamment jeté sur elle et l’a injuriée avec des propos sexistes. De victime, Arroi Baraket a été transformée en coupable de « violence extrême contre agent de la fonction publique dans le cadre de l’exercice de ses fonctions ». Initialement prévu le 22 octobre, le procès a été reporté au 26 janvier à la demande des avocat·e·s d’Arroi Baraket afin que sa propre plainte soit prise en considération.

Le cas d’Arroi Baraket n’est pas isolé. Le 21 octobre, soit la veille de la confrontation prévue au tribunal entre celle-ci et le policier qui l’a agressée, Badr Baabou, défenseur des droits humains et président de l’association Damj, a été violemment agressé par deux agents, l’un en uniforme, l’autre en civil, dans le centre-ville de Tunis, qui lui ont porté des coups à la tête et à la nuque, et lui ont arraché son téléphone et son ordinateur.

Par ailleurs, dix autres militant·e·s féministes, LGBT et d’extrême gauche sont accusé·e·s, entre autres charges, « d’outrage à agent de la fonction publique » pour avoir animé la mobilisation contre le projet de loi de l’automne 2020 élargissant les pouvoirs des policiers. La plainte a été déposée contre elles et eux par les syndicats de police. Si, parallèlement aux violences physiques directes, l’institution judiciaire est déployée contre les militant·e·s qui résistent aux violences policières, celles-ci provoquent la mort de participant·e·s aux mouvements sociaux. Le 8 novembre dernier, à Agareb, alors que les habitant·e·s protestaient contre la réouverture d’une décharge d’ordures ménagères dans laquelle sont déversés des produits chimiques, un homme d’une trentaine d’années est décédé des suites d’une asphyxie causée par les gaz lacrymogènes des forces de l’ordre.

De la transformation des victimes en accusées

Les violences policières prennent souvent la forme de violences sexuelles (injures, humiliations, menaces et agressions, etc.), contre les femmes et les personnes LGBT en particulier, mais aussi des adolescents et des hommes des classes populaires. Les violences policières, tout comme la transformation des victimes en accusées, constitue un phénomène structurel, que la révolution de la dignité a amplement dénoncé, avec notamment le slogan « Ministère de l’Intérieur, ministère de la Terreur ! »

Cependant, la répression s’est accentuée depuis le 25 juillet. Dans le contexte de l’état d’urgence permanent, les forces de police se sentent pousser des ailes pour agresser impunément les habitant·e·s des quartiers populaires, les personnes LGBT, les militant·e·s, les journalistes critiques et les opposant·e·s politiques. Cette répression constitue le pilier d’une restauration autoritaire qui s’attaque aux principales conquêtes de la révolution : la liberté de s’organiser politiquement d’une part, la liberté d’informer d’autre part. C’est tout le mouvement social qu’il s’agit de décimer, pour empêcher les classes populaires et moyennes de résister contre la dégradation des conditions matérielles de vie et l’aggravation des inégalités.

Face à ces violences policières et sexistes, nous, organisations signataires, exprimons notre solidarité avec les militant·e·s tunisien·ne·s et, plus largement, toutes celles et ceux qui en sont victimes au quotidien.

Nous exigeons l’arrêt immédiat des procédures contre Arroi Baraket et la condamnation de l’officier qui l’a attaquée !

Nous exigeons l’abandon des charges qui pèsent contre tou·te·s les militant·e·s inculpé·e·s !

Nous exigeons la fin de l’impunité et justice pour toutes les victimes de l’Etat policier !

NB : Notre correspondant à Tunis, Mathieu Galtié, a également été violemment frappé par la police, en marge d’une manifestation contre le président Kaïs Saïed, vendredi 14 janvier.

Les premières organisations signataires : l’Association des Marocains de France (AMF), l’Association des Tunisiens en France (ATF), l’Association pour la tractation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac), Collectif féministe Héroïnes 95, Collectif urgence notre police assassine, Comité de soutien à Arroi Baraket, Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT), Europe Ecologie-les Verts (EE-LV), Ensemble, Ligue des droits de l’Homme (LDH), Marche mondiale des femmes France, Nouveau parti anticapitaliste (NPA), Planning familial 69, Pour une écologie populaire et sociale (Peps), Réseau féministe « Ruptures », Union syndicale Solidaires, Syndicat national des journalistes affilié à la Confédération générale du travail (SNJ-CGT), Fédération Sud des activités postales et des télécommunications (Sud PTT)…


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