vérité et justice pour les victimes de violences policières mortelles


article de la rubrique justice - police > violences policières
date de publication : mercredi 9 mars 2011
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À l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences policières, un collectif de familles de victimes organise une marche pour « la Vérité et la Justice », le 19 mars 2011 à 15h, place Saint-Augustin, Paris 8ème, (métro Saint-Augustin, ligne 9).

Elles appellent la population, les associations et organisations à y participer, pour demander que la vérité soit établie [1].

En mémoire de Abdelhakim Ajimi, Mickaël Cohen, Lamine Dieng, Mahamadou Marega, Abou Bakari Tandia, Bouna Traoré et Zyed Benna, Laramy Soumaré et Moshin, Reda Semmoudi, Ali Ziri, Yakou Sanogo, Baba Traoré, Féthi Traoré, Louis Mendy, Joseph Guerdner
 [2].


POLICE – JUSTICE – CITOYEN
VIOLENCES POLICIÈRES – DÉRIVES JUDICIAIRES

Compte-rendu de la rencontre de Nice organisée les 5 et 6 février 2011 par le comité Vérité et Justice pour Abdelhakim Ajimi.  [3]

Les 5 et 6 février 2011, ont eu lieu à Nice (Alpes-Maritimes) un débat public et une réunion de travail, organisées par le comité de soutien Vérité et Justice pour Hakim Ajimi, de Grasse.

Le premier objectif de la rencontre du 5 février 2011 était d’apporter publiquement un soutien large, solidaire et déterminé à la famille Ajimi dans le difficile combat qu’elle mène pour que la Vérité soit connue et la Justice rendue à leur fils ainé, Abdelhakim, mort en mai 2008 suite à son interpellation par la Brigade Anti-Criminalité et la police grassoise. C’est une nécessité pour la mémoire d’Hakim, pour le deuil de la famille, pour les ami(e)s et pour la société toute entière qui a perdu un de ses membres.

L’émergence d’une vérité inattaquable est un préalable à l’exercice d’une justice impartiale et exemplaire qui, seule, peut garantir le bon fonctionnement des institutions y compris policière et, ce faisant, assurer pleinement la protection de tous les citoyens, cela hors de toute forme de discrimination.
Quelle qu’en ait été la cause, personne ne doit perdre la vie au cours d’une interpellation policière. Les discours politico-médiatiques et juridiques qui viennent légitimer l’usage de la violence et la mort d’un être sont une manipulation odieuse et inacceptable.

Dans tous les cas d’homicide policier, il est donc indispensable de restaurer la mémoire des victimes pour qu’émerge la vérité. Par ailleurs, il nous faut entretenir cette mémoire. Ne pas s’essouffler, ne pas oublier, soutenir la mobilisation pour que « l’affaire », les affaires, ne soient pas enterrées… un combat de longue haleine pour qu’au-delà de la mort, on n’enterre pas une seconde fois la victime dans des méandres judiciaires conduisant bien souvent au non-lieu pour les agents de police impliqués.

RIEN ne peut légitimer la violence et la mort !

Le but de ces journées était donc également d’engager une réflexion de fond sur ce qu’il convient de faire, concrètement, pour

  • faire éclater la vérité au grand jour et que justice soit effectivement rendue à Hakim, mais aussi à tous ceux qui, comme lui, ont été victimes des violences policières et des atermoiements de la justice,
  • faire tout ce qui peut l’être pour empêcher que de telles tragédies ne se renouvellent. Cette réflexion passait indubitablement par la mise en lumière de la récurrence des violences policières et, surtout, de leur sens politique.

Les violences policières sont ciblées ; elles touchent essentiellement les pauvres et en particulier les immigrés, mais aussi les militants politiques, les « déviants », les insoumis… elles sont « nécessaires » à la permanence du pouvoir et font partie d’un système. Ainsi, si le thème principal de ces journées était les homicides policiers, elles furent nécessairement l’occasion d’aborder les décès en détention, la chasse aux « étrangers clandestins », les crimes racistes et sécuritaires, la ségrégation, la répression politique… et toutes les facettes du maintien de l’ordre.

Au travers de communications et de la projection du documentaire de Mogniss H. Abdallah, Douce France, saga du mouvement beur » (Agence IM’media [4]), a été fait en quelque sorte « l’état des lieux » pour les dernières décennies, car le problème n’est évidemment et malheureusement pas nouveau.

Le matin, Dorsaf Briki a dressé le triste tableau d’une décennie de meurtres policiers en France. Fatima Derni a évoqué avec une très grande émotion la mémoire de son frère, Zamani [5], mort à la maison d’arrêt de Nantes en 2000. Elle mène depuis 10 ans un combat judiciaire qui pourrait se clore prochainement… par une prescription ! Ilhan Kiran s’est exprimé au nom de sa famille qui était également présente, pour rappeler les faits graves ayant conduit à la mort de son petit frère, Umüt [6], exécuté par la police suisse, et à l’emprisonnement du jumeau de celui-ci, Erdal. Malgré leur impossibilité d’être présents à Nice, les comités de soutien Vérité et Justice
pour Lamine Dieng, pour Mamadou Marega, pour Abou Bakari Tandia d’une part, le comité de soutien Vérité et Justice pour Ali Ziri d’autre part, se sont joints à nous par des communiqués et la transmission d’un documentaire Ali Ziri, Vie et Mort d’un chibani [7] » (ces documents sont à disposition, de même que le documentaire en mémoire d’Hakim Ajimi réalisé par Regarde à vue [8].

L’après-midi, Sihem Souid [9], Mogniss H. Abdallah, Pierre Tévanian [10], et Mathieu Rigouste ont abordé sous différents angles la question des violences policières : corruption, racisme, formation des policiers ; manipulation politico-médiatique des esprits, supercheries sémantiques qui dissimulent la réalité politique des violences policières ; nécessité économique et politique des violences policières participant d’un système de domination des populations en général, des populations pauvres en particulier. Les communications des intervenants ont été retranscrites en ligne par le MRAP 06 [11].

La rencontre publique du 5 février 2011 était ouverte à tous et, de ce fait, a permis de rassembler des participants d’horizons divers, portés par une même cause. Près de 150 personnes étaient présentes (selon les organisateurs !). Elles ont pu s’exprimer librement lors de réels temps de discussion. Les échanges ont été, sans conteste, riches et fructueux.

Témoignages et compréhension du fait répressif dans son ensemble ont permis d’appuyer et d’étoffer les perspectives de réactions et d’action concrètes pour lutter contre les violences policières et la répression.
Le comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi a donc présenté ses axes de réflexions pour intensifier sa propre mobilisation et l’insérer dans une lutte collective à l’échelle nationale.

Un de ses objectifs est l’interdiction de la clé d’étranglement enseignée dans les écoles de police française qui a couté la vie à Hakim Ajimi et bien d’autres. La France a été condamnée en 2007 par la Cour européenne des droits de l’homme pour l’usage de la clé d’étranglement [12]. En 2002, le Comité de prévention de la torture avait déjà demandé d’éviter son utilisation. Cette méthode d’immobilisation est d’ores et déjà interdite en Belgique, en Suisse et dans certaines villes des États-Unis. Mekia Noura Addad a présenté les dispositifs législatifs existant dans ces pays et villes. Le comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi envisage de rédiger un projet de loi visant l’interdiction de la clé d’étranglement et souhaite s’associer à d’autres comités pour porter ce projet et trouver les relais politiques nécessaires.

Appel à la constitution d’une coordination nationale

Le comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi et ses invité-e-s ont fait le constat de dynamiques similaires nombreuses à travers le pays, mais aussi d’un certain isolement, du morcellement de la solidarité, de la vulnérabilité des familles de victimes et des personnes qui les épaulent face à l’appareil judiciaire dont la fonction semble être d’essouffler ces luttes locales… Une mobilisation effective et collective, indépendante des instrumentalisations idéologiques ou politiciennes, n’est-elle pas une condition essentielle pour se constituer comme un réel contre-pouvoir et ainsi faire face aux dérives des institutions ?

Le 6 février 2011, une vingtaine de personnes présentes la veille se sont réunies pour constituer un groupe de travail. Sur la base des conclusions de la journée précédente, le besoin de solidarité a été réaffirmé, ainsi que la nécessité de redécouvrir, créer et mettre en commun de réels outils de prévention, de défense (caisse de solidarité, plateforme juridique…).

Aussi, dans la continuité de l’appel de Poitiers [13] (auquel répond déjà l’organisation d’une marche « Vérité et Justice » le 19 mars 2011, 15h place Saint-Augustin à Paris cf. tracts ci-joints), le Comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi appelle à constituer dans les prochains mois une assemblée de coordination nationale réunissant les proches de victimes et les militant-e-s de base travaillant contre les violences d’État. Les violences policières ne doivent pas rester impunies !

NOUS VOUS SOLLICITONS POUR PRENDRE PART À CETTE INITIATIVE.

Rejoignons-nous via comite_hakim_ajimi@riseup.net, et merci à ceux qui ont la possibilité de mettre à disposition un lieu pour se réunir.

Notes

[1Un tract appelant à la marche du 19 mars : http://www.millebabords.org/IMG/pdf/A4_appel-familles_mars2011.pdf

[3Source : Comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi

[7Journée de mobilisation en soutien à Arezki Kerfali et en mémoire d’Ali
Ziri le 10 mars 2011 devant le tribunal correctionnel de Pontoise.
http://www.dailymotion.com/video/xe...

[8Pour cela, contacter le comité Vérité et Justice pour Hakim Ajimi comite_hakim_ajimi@riseup.net.

[10Le site du Collectif les Mots sont Importants auquel participe Pierre Tévanian : http://lmsi.net/

[11Pierre Tevanian, « Omerta dans la polis » : http://www.differences-larevue.org/...
Sihem Souid, « Pour une police respectueuse des droits de l’hommme » : http://www.differences-larevue.org/....

[12Voir l’affaire Mohammed Ali Saoud : http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article2312 .

[13Appel de Poitiers : inscription des comités de soutien sur
http://fr.groups.yahoo.com/group/codecoantirep ou par mail :
codecoantirep-subscribe@yahoogroupes.fr ; contact : antirep86@free.fr.


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