Le problème de l’obéissance à la hiérarchie et à ses instructions commence à se poser à grande échelle dans l’Education nationale, en particulier à l’école primaire.
Les directeurs d’école “réfractaires” (ils sont aujourd’hui 174) qui refusent de mettre en place Base élèves en sont un premier exemple.
Les “désobéisseurs” sont des enseignants, en général du premier degré, qui se sont proclamés en situation de “résistance” contre les mesures Darcos. Ils refusent de mettre en place les heures d’aide, d’appliquer les programmes de 2008. A la date du 1er février 2009, on comptait 2100 désobéisseurs répartis sur 36 départements – dont une seule dans le Var, Pascale La Rosa, professeur des écoles à Toulon.
Une lettre de Pascale La Rosa à son inspecteur :
A l’attention de Monsieur Inspecteur de l’Education NationaleToulon, le 8 décembre 2008
Monsieur l’Inspecteur,
Je vous écris cette lettre car aujourd’hui, en conscience, je ne peux plus me taire ! En conscience, je refuse d’obéir.
Les coups portés à notre système éducatif sous des prétextes fallacieux et démagogiques de la part de nos dirigeants masquent mal leur volonté de démantèlement de l’école publique, dans une optique de marchandisation de l’école. Ainsi, on organise la concurrence des établissements au motif que « la concurrence garantit la qualité » ; c’est délibérément faire un amalgame entre l’éducation d’un enfant et la fabrication d’un objet de consommation courante. La publication plus ou moins officielle des résultats des écoles est une incitation à une attitude consumériste face à l’institution. Il est malhonnête de prétendre comptabiliser et quantifier tous les acquis, les attitudes, les savoir-faire, les savoir-être.
Je ne peux admettre que les principes de la République soient aussi cyniquement bafoués : quelle fraternité, lorsqu’on renvoie à des écoles confessionnelles la mission d’éduquer, au mépris du principe de laïcité qui nous est si cher ? Sans compter l’instauration prochaine d’un chèque éducation pour le privé, alors que dans le même temps l’état se désengage auprès des associations complémentaires de l’école : diminution drastique des subventions avec effet rétroactif et suppression des mises à disposition des enseignants en 2009 dans des associations telles les FRANCA, l’OCCE, les PEP pour ne citer qu’elles.
Je ne peux me résoudre à cautionner l’aide personnalisée qui ne sert qu’à masquer la destruction et la suppression des RASED, dont la philosophie a toujours été « différencier sans exclure », au contraire de ces 2h qui ne font que stigmatiser des enfants en souffrance, déjà gavés d’école et qui ont besoin d’un autre regard sur eux.
En conséquence, je refuse d’appliquer ce dispositif tel qu’il est prescrit, mais consacrerai ces deux heures à la mise en place d’un projet de conte musical pour toute la classe, en demi-groupes.
la suitePascale La Rosa
Pour soutenir les enseignants “désobéisseurs”, une pétition à signer en ligne : Pas en notre nom.
La pétition est téléchargeable au format PDF : http://www.millebabords.org/IMG/pdf....
Les évaluations en CM2
Le problème de l’obéissance va se poser à l’ensemble des enseignants de CM2.
En effet, le ministère a décidé unilatéralement d’organiser les évaluations nationales des acquis des élèves en CM2 au cours de la semaine du 19 au 23 janvier, sur la base d’une procédure rigide qui n’a fait l’objet d’aucune concertation. Un fascicule de 40 pages expose les consignes officielles pour ces évaluations.
Les enseignants considèrent que faire passer ces épreuves à cette période de l’année est une aberration sur le plan pédagogique : il s’agit d’acquis de fin de cycle sur de nouveaux programmes mis en place depuis septembre. Certaines notions n’ont pas été abordées à cette période de l’année. Comment évaluer les élèves, sans les mettre en difficulté, sur des notions qu’ils n’ont pas encore étudiées ou qui nécessitent d’être consolidées ?
L’intersyndicale SE-UNSA, SGEN-CFDT, SNUipp-FSU propose un tri sélectif... des exercices. Certains enseignants se proposent de faire passer ces évaluations ultérieurement. La fédération Sud Éducation, plus radicale, appelle à refuser de faire passer les évaluations nationales CE1 et CM2 qui visent à mettre les écoles en concurrence (ou au moins à refuser de faire remonter les résultats). [1]
Quant à l’avis des inspecteurs de l’Education nationale chargés de mettre en place les évaluations en CM2, il est exprimé dans un communiqué syndical intitulé « Quand évaluation rime avec contrôle qualité et obligation de résultat » [2]. En voici la conclusion :
« Au final, qu’évaluera-t-on ?
Les résultats des élèves, l’efficacité des maîtres, celle des inspecteurs, ou la clairvoyance du ministère ?
L’avenir nous le dira. »
[1] Les évaluations précédentes
Ne cherchez pas les publications récentes du service statistique de l’Éducation nationale. Elles traînent quelque part sous une pile au Cabinet du ministre en attente de validation. Mais elles peuvent aussi avoir été classées confidentielles et rester sur les étagères. Ainsi en a décidé le ministre, pour qui « Toutes les notes de la Depp (Depp : Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance) n’ont pas vocation à être rendues publiques. Certaines sont réservées au ministre ». Une dizaine de numéros de la Note d’information bloqués au 8 décembre 2008 traitent des évaluations en lecture, de la maîtrise des compétences de base en français, des performances des élèves de CM2...
(Référence : tract intersyndical INSEE du 18 décembre 2008)
[2] Communiqué du 5 janvier 2009 du syndicat des inspecteurs de la FSU : http://syndicat.snpi-fsu.org/index.....