trois avocats condamnent les projets de Nicolas Sarkozy dans le domaine de la justice pénale


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date de publication : dimanche 9 septembre 2007
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Robert Badinter, sénateur des Hauts-de-Seine et ancien ministre de la justice, William Bourdon, ancien secrétaire général de la Fidh (Fédération internationale des droits de l’homme), et Thierry Lévy, ancien président de l’Oip (Observatoire international des prisons) , condamnent les projets de Nicolas Sarkozy concernant la création du juge des victimes, le traitement de la récidive, la création d’hôpital-prison, l’instauration de procès pour les irresponsables pénaux...


Robert Badinter : ne pas confondre justice et thérapie

propos recueillis Alain Salles, Le Monde daté du 9 septembre 2007
  • Nicolas Sarkozy a annoncé des mesures nouvelles sur la justice, à l’occasion de plusieurs faits divers. A chaque fois, il affirme son intention de se placer du côté des victimes. Quelle doit être la place de la victime dans le processus judiciaire ?

La justice pénale doit impérativement prendre en compte les intérêts de la victime, assurer le respect de ses droits et la réparation des préjudices subis. La victime doit être traitée en justice avec toute l’humanité que sa souffrance appelle. J’ai été le témoin jadis de l’indifférence avec laquelle l’appareil judiciaire traitait la victime. A la chancellerie, j’ai beaucoup oeuvré pour étendre les droits et améliorer la condition des victimes d’infractions. Depuis lors, des progrès sont encore intervenus.

Mais il faut rappeler que la justice pénale n’a pas pour mission d’être une thérapie de la souffrance des victimes. Elle a une fonction répressive, dissuasive et expressive, car elle exprime les valeurs de la société. Mais elle ne saurait avoir une finalité thérapeutique. Il existe des systèmes judiciaires, notamment anglo-saxons, qui n’admettent pas la victime comme partie dans le procès pénal, la réparation de son préjudice étant assurée par les juridictions civiles.

Ce n’est pas notre choix et l’on doit s’en féliciter. Mais au nom de la souffrance des victimes, qui appelle toute la solidarité de toute la société, nous ne devons pas altérer le difficile équilibre de la justice pénale qui repose sur les principes du procès équitable inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme.

Or nous assistons à une sorte de dérive. Se proclamer du côté des victimes est toujours politiquement profitable. Qui serait contre ? Nous sommes dans une société d’émotion qui se veut compassionnelle. Rien ne mobilise plus l’émotion que le crime et la souffrance des victimes, décuplée par la médiatisation et la puissance des images à la télévision. Cela nourrit la pulsion de vengeance qui est au coeur de la réaction humaine en présence d’un crime atroce. Mais la justice ne peut se confondre avec la vengeance ni avec la compassion pour les victimes. C’est ce qui rend son exercice si difficile. Rappelons-nous l’affaire d’Outreau...

  • En matière de justice, on a l’impression que la loi est modifiée à chaque fait divers. Peut-on construire une politique pénale de cette façon ?

Devant la vague émotionnelle que suscite un crime odieux, les femmes et les hommes politiques se sentent interpellés. La réponse la plus simple consiste à dire : faisons une loi pour éviter que cela se reproduise. Regardons ce qui est advenu depuis 2002 en matière de récidive, notamment celle des délinquants sexuels. Alors que la loi Guigou de 1998 avait déjà instauré un suivi socio-judiciaire, on a voté successivement les lois Perben 1 et 2, la loi sur la récidive de 2005, celle sur la prévention de la délinquance en mars 2007, un nouveau texte à la session extraordinaire de juillet, et on nous annonce une nouvelle loi à la rentrée parlementaire !

La multiplication des lois, sans chercher à s’assurer de leur efficacité, engendre un désordre législatif préjudiciable. Trop de lois nuisent à la Loi. Quel bilan a-t-on fait de l’ensemble de ces textes ? Quelle a été l’effectivité de leurs dispositions ? On est entré dans un système où la loi devient un mode de communication politique. Mieux vaudrait s’assurer de sa mise en oeuvre.

Prenons le cas de l’affaire Francis Evrard. Elle pourrait faire l’objet d’une commission d’enquête parlementaire. Pourquoi, dans ce cas, l’arsenal des dispositions inscrites dans les lois existantes n’a-t-il pas fonctionné ? Pourquoi les mesures de surveillance judiciaire ont-elles été inopérantes ? A-t-il fait l’objet d’un traitement psychiatrique en détention ? A-t-on mobilisé juges de l’application des peines, psychiatres, agents d’insertion et de probation à sa sortie ? Cette affaire grave révèle une série de dysfonctionnements auxquels il serait plus urgent de porter remède que de légiférer dans la hâte.

  • La principale mesure est celle d’un hôpital-prison pour délinquants sexuels dangereux, où ils iraient après leur peine. Que pensez-vous de cette initiative ?

Il faut bien mesurer que ce qui s’annonce là est un changement profond de la fonction du juge. Que prévoit-on ? Le juge sera en présence d’un détenu qui aura purgé entièrement sa peine, qui "aura payé sa dette à la société", comme on le dit familièrement. Que va-t-on demander à ce juge ? Au vu d’un rapport d’expertise psychiatrique — et la psychiatrie n’est pas une science exacte —, le juge devrait décider la détention de quelqu’un qui n’aurait pas commis de nouvelle infraction, mais qui recèlerait en lui la possibilité d’en commettre, en fonction d’une dangerosité présumée. Le juge ordonnerait une détention sans infraction ni condamnation !

Je crains que pour pallier les carences dont on aura fait preuve, dans le traitement des condamnés au cours de l’exécution de leur peine, on ne crée un système judiciaire destiné à mettre à l’écart, sinon à éliminer, des individus en raison d’une dangerosité présumée. Nous sommes là en face d’un choix très grave pour l’avenir.

  • Quelle solution faudrait-il mettre en place ?

Il faudrait, dès l’arrivée en détention de tels condamnés, mettre en place un véritable projet pénitentiaire, élaboré à partir d’un bilan médical et psychiatrique. Il faudrait élaborer un programme de traitement pour les années à venir en détention et au-delà dans le cas d’une libération conditionnelle ou d’une surveillance judiciaire.

Il faudrait qu’une telle prise en charge soit effective, qu’elle ne soit pas seulement inscrite dans la loi ou sur des circulaires sans être réellement appliquée. Si l’on ne mobilise pas tous les moyens de traitement pendant que de tels criminels sont en prison durant des années, alors comment supprimer ou atténuer leur dangerosité et préparer leur sortie ?

Cela vaut non seulement pour ceux qui sont atteints de troubles mentaux ou les délinquants sexuels, mais aussi pour tous ceux qui sont condamnés à des peines d’une certaine durée. La préparation à la sortie est essentielle pour tout détenu et pour la société. La réinsertion est l’un des objectifs fondamentaux de la prison. Il faut s’en préoccuper dès l’entrée et pas à la veille de la sortie. Toutes les mesures qui facilitent cette réinsertion et la prévention de nouvelles infractions doivent être effectivement mises en oeuvre, y compris la généralisation du bracelet électronique dans le cadre de la libération conditionnelle ou de la semi-liberté s’agissant de tels criminels.

  • Autre fait divers, autre annonce. Nicolas Sarkozy a demandé que l’on organise des procès pour les irresponsables pénaux.

Ce serait un détournement de la justice que de juger des déments déclarés comme irresponsables. On aurait un procès fictif dont le but serait de permettre aux familles des victimes de "faire leur deuil". Les psychiatres estiment que le processus de deuil est si complexe qu’on ignore réellement quel effet thérapeutique peut susciter un tel procès. Il est naturel qu’une victime veuille assister au jugement de l’auteur de l’infraction. Mais on ne va pas transformer le procès en psychodrame judiciaire. Ce serait dévoyer la justice sans mieux assurer les droits des victimes.

Il existe déjà des dispositions en faveur des victimes en présence d’une éventuelle irresponsabilité pénale pour cause de démence. La partie civile peut demander une contre-expertise psychiatrique. Si le non-lieu est prononcé, elle peut faire appel devant la chambre de l’instruction qui tient une audience publique. La loi permet de reconnaître que le crime a été commis par la personne jugée irresponsable, et la victime peut obtenir des dommages-intérêts en l’absence de condamnation pénale.

Aujourd’hui, le nombre de non-lieux pour irresponsabilité totale est infime par rapport à celui des criminels qui sont considérés comme partiellement irresponsables, condamnés et envoyés dans des établissements pénitentiaires où ils sont très nombreux. C’est là une des grandes difficultés à laquelle est confrontée l’administration pénitentiaire : la détention et le traitement des condamnés atteints de troubles mentaux et qui sont en prison. Dans le cadre de la loi pénitentiaire, cette question majeure devra être traitée.

  • Le gouvernement a annoncé son intention de créer un juge des victimes. Qu’en pensez-vous ?

Je ne vois pas son rôle. S’il s’agit de défendre les intérêts des victimes en justice, c’est aux avocats de le faire. Et toute victime peut obtenir au besoin l’assistance d’un avocat d’office. Alors que fera le juge ? Recevoir la victime, la guider à travers le dédale des procédures, c’est là aussi la fonction de l’avocat. Veiller à l’exécution de la décision rendue ? Là aussi, c’est à l’avocat de le faire. Devra-t-il alors veiller à ce que les avocats s’acquittent avec diligence de leur tâche ? Singulière mission pour un magistrat.

Il y a quelques années, le gouvernement avait instauré un ministre délégué aux droits des victimes. Ses mérites personnels n’étaient pas en cause, mais son domaine de compétence est toujours demeuré insaisissable. Et on n’a pas renouvelé l’expérience.

Robert Badinter

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William Bourdon : récidive, l’imposture du discours présidentiel

Le Monde daté du 28 août 2007

La proposition ahurissante, car d’évidence anticonstitutionnelle, faite par le président de la République de prévoir, en quelque sorte, une double peine, c’est-à-dire de contraindre des délinquants sexuels à être hospitalisés à l’issue de l’exécution de leur peine, a suscité à gauche des commentaires favorables... Certes, ici ou là, quelques réserves d’usage sont faites, mais on sent bien que chacun est embarqué dans une spirale de surenchère électoraliste, en oubliant pourtant quelques évidences qui se volatilisent sous le fracas des contre-vérités.

On entend par exemple que les pédophiles, et au-delà les délinquants sexuels, seraient plus récidivistes que les autres. C’est archifaux. On évalue à 10 % à 15 % de récidivistes parmi les délinquants sexuels et lorsque l’on consulte le taux de récidive à partir des documents officiels édités par le ministère de la justice, on constate aisément que ceux qui sont poursuivis pour agression sur les biens ou trafic de stupéfiants récidivent nettement plus que les délinquants sexuels.

Mais aujourd’hui, l’enfant, figure de l’innocence et de la pureté absolues, permet gaillardement de provoquer des consensus confortables. Et ce, d’autant plus que la mémoire collective et individuelle, frappée d’amnésie, oublie, et pour cause, que pendant des années la parole de l’enfant, après avoir été niée, voire disqualifiée, a été ensuite sacralisée pour être à nouveau et de façon honteuse, démonétisée après le fiasco d’Outreau.

Tout le monde ne pouvant que se sentir coupable de ne pas protéger l’enfant, ces manipulations permettent d’organiser sciemment une baisse de lucidité collective. Ce qui favorise la communication du ministère de la justice sur sa volonté d’assurer la sécurité des Français ; un engagement au coeur de tous les discours de Nicolas Sarkozy depuis qu’il a occupé la Place Beauvau jusqu’à aujourd’hui.

Or le budget du ministère de la justice est de 6 milliards d’euros par an et la France est ainsi au 29e rang en Europe. Se mettre au niveau de l’Allemagne et du Royaume-Uni exigerait de doubler ce budget.

Depuis des décades, les missions de parlementaires français constatent que dans les pays baltes, dans certains Länder allemands, aux Pays-Bas et au Canada, les taux de récidive sont infiniment moins importants qu’en France parce que des moyens sont mis au service de la réinsertion. Reste que le risque zéro de récidive n’existe pas, ou alors il faut laisser mourir en prison ceux qui sont condamnés à une peine des plus graves.

Aux Etats-Unis, l’opinion publique s’accommode parfaitement de la mort, chaque mois, de nombreux détenus, comme elle s’accommode de l’exécution de condamnés après dix années passées dans les couloirs de la mort. Pourtant cette pratique et le niveau exceptionnel de nombre de détenus par rapport aux habitants n’empêchent pas un taux de récidive extrêmement élevé.

Alourdir la répression en laissant en jachère la prévention et la réinsertion, c’est mécaniquement assurer pour l’avenir un nombre plus élevé encore de victimes. C’est une façon particulière de s’occuper des victimes, de leur mettre la main dessus, qui est aux antipodes de l’obligation de l’Etat de les protéger.

Toutes les statistiques le montrent, dès lors que les prisons continueront à être des petites universités du crime et des machines à découragement, on est assurés du résultat... Et le palais de l’Elysée se transformera de plus en plus en "bureau des victimes". Et quand le gisement des victimes s’accroît, l’Etat comme incarnation de la compassion se redore à chaque fois les plumes.

Les politiques font donc de la cavalerie sur le dos de l’opinion publique en surfant sur une émotion savamment entretenue. L’imposture est donc absolue : on prétend protéger les victimes, alors qu’on crée, en connaissance de cause, les conditions du maintien sinon d’une aggravation du taux de récidive en France.

Qui osera dire encore que la réitération d’un crime sexuel par un récidiviste qui a bénéficié d’une libération conditionnelle, si ignoble soit le crime, "peut et doit être pondérée", par tous les crimes évités du fait de mesures d’accompagnement et de préparation des détenus dans l’exécution de leur peine et dans la préparation de leur sortie de détention ?

Qui osera rappeler que les libérés conditionnels ont des taux de récidive nettement plus faibles que ceux qui sortent en fin de peine, toutes les statistiques en témoignent, et notamment celles du ministère de la justice ?

Et point d’orgue de cette pseudo-protection des victimes, la castration chimique, mesure au parfum détestable. Si personne ne peut contester la nécessité d’explorer des traitements hormonaux, dès lors qu’ils peuvent être de nature, pour les délinquants sexuels les plus graves, à réduire le risque de passage à l’acte, toute institutionnalisation d’une atteinte à l’intégrité physique, même sur une base volontaire, nous fait rentrer dans l’antichambre d’une société dont des pans entiers d’humanité risquent de s’éclipser.

La politique actuelle n’a rien à voir avec la protection des victimes, elle ne peut qu’alourdir le nombre de celles qui auront à se plaindre, demain, des politiques qui oublient toujours les moyens et les fins, au profit de la gesticulation compassionnelle.
William Bourdon est avocat.

William Bourdon

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Thierry Lévy : loi pénale, l’escalade de Sarkozy

Le Monde daté du 30 août 2007

Le respect des textes et de leur esprit s’impose à tous. Même au président de la République.

Au-delà du fait divers, la délinquance reprochée à Francis Evrard lance un défi à la puissance publique qui ne réussit pas, en dépit d’une répression écrasante, à empêcher la réitération des agressions sexuelles. Ni l’incarcération pendant près de trente ans, ni le contrôle judiciaire, ni la menace d’une condamnation encore plus sévère n’ont été dissuasifs. Ainsi que l’a constaté la ministre de la justice, l’échec de la sanction est flagrant.

C’est pourquoi l’homme de l’Elysée veut donner l’impression de subir les actes de Francis Evrard comme une offense personnelle. Et les mesures qu’il propose découlent peut-être d’une attitude vigoureuse mais ne leur confèrent aucune garantie de constitutionnalité ni d’efficacité.

En premier lieu, le chef de l’Etat dénonce le fait que le condamné n’a pas effectué un temps de détention égal à la durée de sa condamnation. Pourtant, les réductions de peine ont été, en l’espèce, appliquées en exécution d’une loi du 12 décembre 2005 votée par le Parlement sur proposition d’un gouvernement auquel appartenait Nicolas Sarkozy. La loi qui déciderait de priver une catégorie de condamnés, les délinquants sexuels, de ces dispositions serait censurée par le Conseil constitutionnel pour violation du principe d’égalité.

Aujourd’hui, la loi, qui permet à tous les condamnés de sortir de prison avant le terme théorique de leur peine, s’applique, et aucun fonctionnaire ni aucun magistrat, fût-il le plus haut placé, ne peut l’ignorer. Or, on vient de voir qu’au sein même de l’administration pénitentiaire un surveillant enhardi par les propos présidentiels a averti la presse d’un prétendu danger résultant de la sortie imminente d’un détenu condamné pour des délits sexuels et libéré par application de la loi en vigueur.

La première obligation de l’administration pénitentiaire est de respecter la loi et de faciliter le retour à la liberté des condamnés qui ont purgé leur peine. En incitant les fonctionnaires à sonner l’alarme contre un danger virtuel, à se dresser contre la loi et à rendre invivables les premiers instants de liberté d’un homme qui s’est acquitté de ses obligations à l’égard de la société, le nouveau président de la République n’a pas rempli son office de gardien de la Constitution.

La seconde mesure envisagée à l’Elysée concerne la création d’un ersatz de prison, une prison psychiatrique dans laquelle on pratiquerait (" je n’ai pas peur du mot ", a-t-on entendu dire par le chef de l’Etat) la castration chimique. Le suivi socio-judiciaire existe déjà dans le code pénal. C’est une peine complémentaire qui ne peut être prononcée que pour une durée déterminée par une juridiction de jugement. Dans ce cadre, les injonctions de soin ne sont possibles qu’avec le consentement du condamné. Le projet consistant à prolonger la neutralisation et les traitements après l’expiration de la peine contient une contradiction insurmontable, car si l’agresseur est malade, il ne doit pas être condamné à de l’emprisonnement, et s’il ne l’est pas, il ne peut pas être hospitalisé sans son consentement.

Cet obstacle est si peu de nature à entamer la détermination de Nicolas Sarkozy que celui-ci vient d’annoncer, sous prétexte de favoriser " le travail de deuil des victimes ", qu’il fallait organiser un procès pour les fous. Le volontarisme affiché rejoint le conformisme victimaire. Si ce projet lamentable était réalisé, les audiences criminelles, déjà plutôt cruelles, transformées dans la plus grande confusion en spectacle de foire, désarmeraient un peu plus la défense face à une accusation désemparée, et chacun aurait bien du mal à surmonter son dégoût.

Peut-on dire pour autant que la réforme annoncée serait une régression ? Progresser, reculer : ces notions sont subjectives. En revanche, il est certain que la notion de peine perdrait le peu de signification qu’elle a conservée. Le droit pénal moderne est fondé sur une idée simple. Il n’y pas d’infraction sans intention, sans volonté consciente et déterminée de commettre un acte illicite. Le juge doit démontrer l’existence de l’intention criminelle avant de caractériser le délit ou le crime et de choisir une peine proportionnée à la gravité de la faute tout en étant susceptible d’être comprise par le délinquant.

Enfermer les criminels sexuels dans des hôpitaux psychiatriques après l’expiration de leur peine, juger les fous, ce n’est pas punir un individu libre et responsable avec l’espoir de le ramener dans la communauté humaine, c’est tenter de prévenir un danger ou un risque sans considérer la réalité de la faute et l’intention de la commettre, cela revient à voir dans chaque personne une menace, la cause potentielle d’un dommage, et à la traiter comme une chose ou un animal. C’est aussi refuser de changer la prison, dont l’échec est pourtant avéré.

Une telle évolution, appuyée sur la dénégation de la liberté individuelle, soutenue par les technologies de contrôle, ne peut que satisfaire un pouvoir orgueilleux et sûr de lui. Ni les élus du peuple ni les démocraties ne sont à l’abri d’un totalitarisme rampant. Si le chef de l’Etat en est conscient, sa réponse au défi d’Evrard ne l’indique pas.

Thierry Lévy

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