Le Conseil des ministres a adopté le 21 décembre 2016, un projet de loi relatif à la sécurité publique. Si le texte consacre une large partie aux règles d’emploi des armes pour les policiers nationaux et les gendarmes, certaines mesures intéressent les services départementaux de l’aide sociale à l’enfance, les acteurs de la formation professionnelle et les transporteurs publics. Ces nouvelles mesures sécuritaires contribueront-elles à améliorer la sécurité publique ?
Le projet ne pourra devenir une loi qu’après son adoption éventuelle par le Parlement. Vous trouverez dans le petit dossier ci-dessous, la réaction de la LDH dans la situation actuelle. Et nous terminerons avec la reprise des commentaires du projet de loi, placés danqs le corps même du projet de loi.
Sécurité : faire assaut de démagogie
Communiqué LDH du 22 décembre 2016
En bout de course de mandature, le gouvernement va soumettre un projet de loi élargissant les conditions dans lesquelles les policiers peuvent ouvrir le feu.
A l’inverse de ce qu’il prétend, l’alignement de la police sur la gendarmerie ne permettra pas plus aux policiers de savoir dans quelles conditions ils peuvent tirer. En dernière analyse, ces conditions resteront soumises aux exigences posées par la Convention européenne des droits de l’Homme et la jurisprudence de la Cour : respecter le principe de proportionnalité face à un danger imminent reste un impératif.
En revanche, le message lancé peut être interprété par certains comme une autorisation presque illimitée et peut donc conduire à une augmentation des bavures. Une extension des pouvoirs de police applicables dans la vie quotidienne n’est pas de nature à renforcer le lien de confiance entre la police et la population, alors que celui-ci est plus que jamais nécessaire.
Décidément, en matière de libertés publiques, les différents gouvernements de ce quinquennat n’auront eu de cesse de privilégier la démagogie et la restriction des libertés.
Paris, le 22 décembre 2016
Compte rendu du Conseil des ministres du 21 décembre 2016
Sécurité publique
Le ministre de l’intérieur et le garde des sceaux, ministre de la justice ont présenté un projet de loi relatif à la sécurité publique.
Ce projet de loi constitue le volet législatif du plan pour la sécurité publique.
Dans le contexte d’intense mobilisation des forces de sécurité intérieure et des risques auxquels elles sont confrontées, les mesures proposées renforcent notamment leur protection et la sécurité juridique de leurs interventions.
Plusieurs mesures concernent également les moyens d’action de ceux qui œuvrent quotidiennement à la sécurité de tous.
Un cadre commun d’usage des armes est défini pour les forces de sécurité, visant à unifier les règles applicables et à les adapter aux situations auxquelles elles font face de plus en plus fréquemment. Il s’appliquera aux policiers et gendarmes, ainsi qu’aux douaniers et militaires déployés dans le cadre de réquisitions (opération Sentinelle) ou protégeant des installations militaires.
Ce cadre précis, stabilisé et maîtrisé complète les dispositions qui avaient déjà été prises dans le cadre de la loi du 3 juin 2016 afin de répondre aux situations de périples meurtriers.
Ces dispositions sont pleinement conformes aux jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’Homme et de la Cour de cassation, notamment quant à la condition d’absolue nécessité et de stricte proportionnalité.
Afin d’assurer la protection de l’identité des policiers et des gendarmes lorsque leur révélation constituerait un danger pour eux-mêmes ou leur famille, ils pourront être autorisés, sous certaines conditions, à s’identifier par un numéro d’immatriculation administrative, en lieu et place de leur état civil.
Ce dispositif, généralisé depuis plus de trente-cinq ans en Espagne, existe déjà en France en matière de lutte contre le terrorisme. Dans les cas exceptionnels où la connaissance de l’état civil de l’enquêteur serait indispensable à l’exercice des droits de la défense, le juge pourra ordonner la révélation de ces informations.
Afin d’assurer également la protection de l’identité des auteurs de décisions administratives en lien avec le terrorisme, l’administration sera autorisée à ne notifier à la personne concernée ou à ne communiquer aux tiers qu’une ampliation anonyme de l’acte. Le projet aménage par ailleurs les règles du contradictoire en matière contentieuse.
Il est aussi prévu le doublement des peines encourues en cas d’outrage aux personnes dépositaires de l’autorité publique en les alignant sur celles prévues en cas d’outrage à magistrat.
Le projet de loi comporte également diverses dispositions :
tirant les conséquences des enquêtes administratives concernant des salariés occupant des emplois en lien direct avec la sécurité des personnes au sein de certaines entreprises de transport ;
améliorant l’articulation entre les procédures judiciaires et les mesures de contrôle administratif, qui permettent de contrôler les personnes ayant rejoint ou cherché à rejoindre un théâtre d’opérations dans des conditions susceptibles de les conduire à porter atteinte à la sécurité publique lors de leur retour sur le territoire français ;
ouvrant de manière encadrée la possibilité d’un armement des agents de sécurité privée exerçant des activités de protection des personnes, lorsque la personnalité protégée est exposée à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie. Il permet dans le même temps de renforcer l’encadrement et la formation de ces agents.
Conformément au plan d’action le 25 octobre 2016 concernant la sécurité pénitentiaire et l’action contre la radicalisation violente, l’article 8 du projet de loi dote certains personnels des équipes de sécurité pénitentiaire des prérogatives légales afin de leur permettre d’intervenir sur l’ensemble du domaine pénitentiaire en cas de comportement faisant craindre la commission d’infractions portant atteinte à la sécurité de l’établissement, et de lutter contre les projections d’objets illicites en détention (stupéfiants, téléphones…).
Le projet autorise dans certains cas, en matière d’assistance éducative, une intervention des services de la protection judiciaire de la jeunesse parallèlement au placement du mineur auprès d’un service de l’aide sociale à l’enfance.
Enfin, s’inscrivant dans les suites de l’expérimentation d’un « service militaire volontaire », autorisée par la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense, le projet ouvre une nouvelle phase de l’expérimentation en créant un statut spécifique combinant celui de militaire et celui de stagiaire de la formation professionnelle, tout en veillant à ce que le nouveau dispositif, intitulé volontariat militaire d’insertion, n’entre pas en concurrence avec les autres dispositifs d’insertion.