La Cour d’appel de Rouen avait prévu d’examiner mercredi 11 août après-midi, l’appel de François Vaillant, rédacteur en chef de la revue Alternatives non-violentes, condamné en décembre 2009 à 300 € d’amende pour s’être opposé à un prélèvement d’ADN.
En juin 2007, il avait refusé d’alimenter le fichier national des empreintes génétiques après avoir été condamné à 1 € pour avoir barbouillé des panneaux publicitaires dans le centre-ville de Rouen. François Vaillant comptait démontrer en appel que sur la foi de progrès récents en matière de génétique, « les segments non codants » prélevés actuellement pour le fichage, « peuvent être discriminants ».
Le parquet a demandé le renvoi de l’affaire, expliquant qu’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le Fnaeg allait être plaidée devant le conseil constitutionnel d’ici le 17 septembre – voir ci-dessous. Malgré les protestations de la défense, l’audience a été renvoyée au 17 novembre.
Les prélèvements ADN en question
par Jocelyne Thuet, France 3 Normandie, 11 août 2010
A Rouen, le procès en appel d’un militant qui avait refusé de se soumettre aux prélèvements ADN a été reporté.
François Vaillant, philosophe et militant de la désobéissance civile devra patienter jusqu’au 17 novembre pour être jugé en appel suite à son refus de se soumettre à des prélèvements ADN en 2007.
En première instance, il avait été condamné à 300 euros d’amende.Mercredi, le Tribunal Correctionnel de Rouen a décidé de reporter le procès de François Vaillant. Quelques mois de délai, le temps que le Conseil Constitutionnel rende sa décision sur la constitutionnalité de la loi encadrant le Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques.
C’est un justiciable français qui a saisi le Conseil Constitutionnel de cette question brûlante, grâce à une toute nouvelle disposition, plutôt révolutionnaire : la Question Prioritaire de Constitutionnalité.
Depuis le 1er mars, tout citoyen peut, à l’occasion de son procès, contester une loi déjà appliquée – voir ci-dessous.Un militant qui refuse d’être fiché pour 40 ans
François Vaillant, lui, espère bien que le Conseil Constitutionnel fera pencher la balance de son côté. Ce militant de 58 ans n’imaginait pas se retrouver un jour dans une telle situation.
Tout a commencé en 2007, lors d’une action anti-pub du Collectif des Déboulonneurs dont il est le co-fondateur.
- François Vaillant lors d’une l’opération anti-pub.
Condamné à 1 euro d’amende en 2007, il est convoqué par la police quelques mois plus tard pour un prélèvement de son ADN.
Pour avoir refusé de s’y soumettre, il est condamné à 300 euros d’amende en décembre 2009.
Le fichage des empreintes ADN soulève régulièrement la polémique partout en France, surtout depuis la loi sur la Sécurité Intérieure de 2003, et la généralisation des prélèvements à toute personne condamnée ou soupçonnée de crimes et délits.
Voir le reportage video de France 3 Normandie
Rouen : les prélèvements ADN en question
Le Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques
Le FNAEG est un fichier commun à la police et à la gendarmerie qui contient les « empreintes génétiques » obtenues à partir de traces d’ADN relevées au cours des enquêtes.
Il a été créé en 1998 suite à l’affaire Guy Georges, dans le cadre de la loi Guigou relative à la prévention et le répression des infractions sexuelles.
Il a ensuite été étendu par des lois successives, notamment la loi sur la Sécurité Intérieure de Nicolas Sarkozy (2003)D’après la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), le fichier contenait au 30 janvier 2010 les profils génétiques de 1.257.182 individus (personnes condamnées, simplement mises en cause ou traces non identifiées).
Les « empreintes génétiques » ainsi que l’état-civil de la personne sont enregistrés dans le cadre des enquêtes pour crimes et délits, d’enquêtes préliminaires, de commissions rogatoires ou de recherches.
Les informations sont conservées :
- 40 ans pour les personnes définitivement condamnées, décédées, disparues, ainsi que pour les traces non identifiées
- 25 ans pour les personnes mises en cause
Pour en savoir plus sur le Fnaeg : voyez cette page
[1] Arrêt n° 12071 du 11 juin 2010 (09-88-083) : http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/questions_prioritaires_constitutionnalite_3396/12071_11_16495.html
Origine de la saisine : Pourvoi c/ CA Fort de France, 28 oct. 2009 (d’après http://www.courdecassation.fr/IMG/File/tableau%20des%20qpc%20penales%2017062010.pdf).