pour l’interdiction des armes prétendument non létales


article communiqué de la LDH  de la rubrique justice - police > police
date de publication : mercredi 22 juillet 2009
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Les nouvelles armes prétendument non létales de la police – Flash-ball, LBD40, Taser – sont dangereuses, et leur utilisation pour réprimer des manifestations ne fait qu’augmenter le niveau de la violence. L’exemple des incidents des 8 et 13 juillet à Montreuil le met clairement en évidence.

D’ailleurs, dans son rapport récemment publié concernant la France, le Comité des droits de l’enfant considère que le recours à des émetteurs d’ultra-sons, à des Flash-balls et à des Taser, est une atteinte à la liberté de réunion des jeunes, et il recommande de reconsidérer ou d’interdire l’utilisation de ces dispositifs [1].

Le 8 juillet 2009, Joachim Gatti a perdu un œil à Montreuil, sous le coup d’un tir policier de Flash-ball. Signez la pétition de son père Stéphane Gatti demandant l’interdiction de l’utilisation de ces armes par les forces de l’ordre : http://4653.lapetition.be/.

[Mise en ligne le 18 juillet 2009 – l’appel du Clej a été ajouté le 22 juillet]



Manifestations à Montreuil [2]

Le 8 juillet 2009, après l’expulsion tôt le matin même par la police d’un squat dénommé « la Clinique », une manifestation était organisée à Montreuil ; à la suite d’un tir de flash-ball par la police, un jeune homme de 34 ans a perdu un oeil. Ce tir a été fait apparemment sans sommation sur des personnes qui se rendaient à « la Clinique ». Comment justifier un tel tir, dirigé sur le visage d’un manifestant pacifique et en l’absence de heurts violents ?

Lundi 13 juillet 2009, était organisée à Montreuil une manifestation pacifique en réaction à ces violences policières, rassemblant des personnes de tous âges et de tous horizons. Un dispositif policier impressionnant avait été mis en place.

De nombreux citoyens ont été témoins d’une charge policière d’une force clairement disproportionnée et d’arrestations musclées … démontrant une volonté délibérée de violence de la part des autorités commandant les forces de police.

Douze personnes interpellées et gardées à vue toute la nuit ont été relâchées dès le 14 juillet au matin. Parmi elles, un journaliste en reportage qui a pourtant bien signalé son statut dès son interpellation.

Un document vidéo

La réalisatrice Béatrice Turpin a filmé une partie des incidents entre la police et les manifestants, à Montreuil, lundi 13 juillet [3] :



Simultanément...

La police municipale de Nice reçoit ses premiers Taser

[NOUVELOBS.COM, le 17 juillet 2009]


La police municipale de Nice, l’une des plus importantes de France, s’est équipée samedi 11 juillet de ses premiers Taser, pistolets à impulsions électriques, dont l’utilisation reste controversée. Vingt armes ont été remises aux agents niçois.

A terme, le nombre de Taser devrait atteindre les quarante à cinquante pièces selon le maire de la ville, Christian Estrosi (UMP), pour un effectif actuellement de 284 policiers avec 100 recrutements prévus dans les deux ans à venir.

1.500 euros pièce

Dix-huit agents ont reçu la formation habilitant à l’usage du Taser. Vingt autres agents seront formés d’ici la fin du mois de juillet.
Le coût unitaire d’un taser est d’environ d’environ 1.500 euros. Ils sont équipés d’un système audio/video destiné à enregistrer chaque utilisation. Le conseil général des Alpes-Maritimes participe au financement de l’équipement.

Christian Estrosi estime que le Taser « aura un effet préventif car les agents seront susceptibles de l’utiliser plus facilement », contrairement à « une arme à feu ». Les policiers s’en « servent rarement et les voyous le savent ».
Les 20.000 policiers municipaux sont autorisés à utiliser le Taser depuis septembre 2008, grâce à un décret du ministère de l’Intérieur. La gendarmerie et la police nationale s’en servaient déjà avant.

Et un nouveau modèle de Flash-Ball, plus puissant devrait bientôt être ajouté à l’arsenal des forces de l’ordre.

Le flash-ball a un remplaçant

[Le Dauphiné libéré du 22 mars 2009]


La police nationale a présenté hier ses nouveaux équipements, dont des armes projetant plus loin des munitions non mortelles, comme le "lanceur de balle de défense 40" appelé à succéder au flash-ball et dont 300 sont en cours d’expérimentation. [...]

C’est surtout sur les "armes à létalité réduite" que l’accent a été mis. Le lanceur de balle de défense, dont les munitions de calibre 40 mm peuvent être des balles en mousse, lacrymogène ou fumigène, peut assurer un tir précis jusqu’à 30 mètres. (AFP / Stéphane de SAKUTIN)


Au lendemain des émeutes de fin 2007 à Villiers-le-Bel [4]

Au lendemain des émeutes de fin 2007 à Villiers-le-Bel (Val-d’Oise), la direction de l’administration de la police nationale (DAPN) décide de mettre à disposition des forces de l’ordre de nouveaux moyens. Outre les lunettes pour se protéger des jets de pierre et les boucliers résistant aux tirs de chevrotines, la DAPN promet qu’ « une nouvelle génération de Flash-ball ’lanceur 40’ (calibre 40 mm) va leur être fournie » au cours de l’année 2008, passant d’une portée de 10 à 50 mètres.

A Nantes, en novembre 2007, lors du mouvement contre la réforme sur l’autonomie des universités, un lycéen de 17 ans participant à une manifestation devant le rectorat est atteint à la tête par un tir de Flash-ball qui lui fera perdre l’usage d’un œil. Il affirme qu’il a été tiré par le policier cagoulé avec un Flash-ball jaune. Ce « Flash-ball jaune » n’est autre que le nouveau lanceur de balle de défense « LBD 40 », plus puissant et précis que le modèle Super-pro utilisé depuis 1999. Fin 2007, il était encore en cours d’expérimentation.

Saisie à la suite de cet incident, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) met en cause les conditions d’utilisation du LBD 40.

Une arme dangereuse [5]

Dans son avis d’octobre 2008, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) La CNDS n’avait pas manqué de remarquer la dangerosité de cette nouvelle arme, en particulier à courte portée : « Si ce dernier [le Flash-Ball classique] permet de riposter instantanément à une agression, le LBD est une arme de neutralisation, susceptible d’atteindre, avec une excellente précision et une meilleure conservation de l’énergie cinétique, des cibles éloignées de 25 à 30 mètres. » Il suppose donc « un tir plus réfléchi » et « exige une expérience avérée », poursuit la Commission. Une conclusion qui l’amène finalement à s’interroger sur « la compatibilité de l’usage d’une telle arme dans le cadre d’une manifestation qui implique une proximité des manifestants et de la police, et leur grande mobilité ».

Appel du Collectif Liberté, Égalité, Justice (CLEJ)

Face aux dérives policières, mobilisons-nous !

Mercredi 8 juillet, alors que des militants et des habitants solidaires d’un quartier montreuillois manifestaient contre l’expulsion d’un squat, la police a fait usage à plusieurs reprises de tirs de flash-ball, blessant cinq personnes, dont un jeune homme qui a perdu un œil, venues soutenir pacifiquement les squatteurs.

Depuis 2005, ce ne sont pas moins de sept personnes qui ont perdu un œil dans les mêmes conditions, dont cinq pour la seule année 2009. Des syndicats et associations avaient dénoncé en novembre 2007 ces pratiques, alors qu’un lycéen nantais avait été visé à la tête par la police lors d’une manifestation et y avait perdu son œil droit.

La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) a plusieurs fois dénoncé l’usage inapproprié de cette arme par la police et la note de service adressée en mai dernier par la Direction centrale de la sécurité publique à ses directeurs départementaux quant à ses règles d’utilisation semble très largement ignorée, voire bafouée.

Il est urgent de rétablir un fonctionnement de nos institutions policières conforme aux engagements internationaux de la France en matière de droits et libertés. Cela suppose de rompre avec un discours des pouvoirs publics qui non seulement incrimine les militants comme des délinquants ou des coupables potentiels, les exposant fréquemment aux coups de matraque et aux grenades lacrymogènes, mais encore avec des pratiques qui aboutissent à couvrir les dérives ou les brutalités policières, y compris lorsqu’il s’agit des dommages irréversibles causés par l’utilisation de ces armes dites « à létalité atténuée ».

Les organisations soussignées exigent qu’une enquête présentant des garanties d’indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics soit menée sur ces derniers incidents à Montreuil, comme pour l’ensemble des affaires impliquant l’usage abusif et inconsidéré des tirs de flash-ball. En l’espèce, elles demandent l’ouverture d’une information judiciaire afin que toute la lumière soit faite sur les circonstances de cette scandaleuse affaire. Elles demandent également que des poursuites soient engagées lorsque les responsabilités des agents et de leurs autorités donneuses d’ordre ont été établies. Elles exigent que l’usage des armes de type flash-ball ou taser soit soumis sans délai à un moratoire.

Les signataires s’insurgent contre une dérive continue et permanente des pratiques policières en matière de sécurité publique. Ces dérives sont constatées et dénoncées tant par la Cour européenne des droits de l’Homme que par des organisations internationales ou nationales :

  • contrôles ou interpellations au faciès,
  • délit d’outrage,
  • gardes à vue abusives,
  • usage humiliant des fouilles à nu (assorties d’une « inspection anale »),
  • menottage abusif, méthode d’immobilisation dite de « décubitus ventral »,
  • abus de la perquisition,
  • atteintes au libre exercice des journalistes.

Il est inacceptable que la police, dont le principal objet est d’assurer la sécurité des personnes, puisse être perçue, en raison de certaines de ses pratiques, comme une menace.

Ces dérives policières tendent à s’inscrire dans un contexte particulièrement inquiétant d’intimidation de l’expression sociale et militante : multiplication des poursuites pour outrage et rébellion, instrumentalisation de la justice aux fins de répression de la contestation, sentiment d’impunité concernant les brutalités policières...

Les organisations soussignées appellent à s’opposer à cette alarmante banalisation des atteintes aux droits et libertés. À cet effet, elles invitent les organisations qui s’y reconnaissent à s’associer au présent appel en transmettant leur signature à l’une des organisations mentionnées ci-dessous.

Le 21 juillet 2009

Le CLEJ vous invite à signer la pétition de Stéphane Gatti.

Organisations signataires :

- associations :
Association Française des Juristes Démocrates (AFJD)
Attac France
Ligue des droits de l’Homme (LDH)
« Souriez-Vous-Etes-Filmé-es ! » (SVEF)

- mouvements et partis politiques :
Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA)
Parti Communiste Français (PCF)
Les Verts

- syndicats :
Confédération Française Démocratique du Travail – Finances de la Gironde (CFDT-Finances de la Gironde)
Confédération Générale du Travail - Protection Judiciaire de la Jeunesse (CGT-PJJ)
Confédération Générale du Travail - Pénitentiaire (CGT-Pénitentiaire, UGSP)
Fédération Sud Education
Fédération Syndicale Unitaire (FSU)
Solidaires Unitaires Démocratiques - Santé/Sociaux (Sud-Santé/Sociaux)
Syndicat des Avocats de France (Saf)
Syndicat de la Magistrature (SM)
Syndicat National de l’Ensemble des Personnels de l’Administration Pénitentiaire (Snepap/FSU)
Syndicat National des Enseignants du Second degré (Snes/FSU)
Syndicat National de l’Enseignement Supérieur (Snesup/FSU)
Syndicat National des Personnels de l’Education et du Social - Protection Judiciaire de la Jeunesse (Snpes-PJJ/FSU)
Syndicat National Unitaire des Collectivités Locales, de l’Intérieur et des Affaires Sociales (SNU-CLIAS/FSU)
Syndicat National Unitaire des Instituteurs, Professeurs des écoles et PEGC (Snuipp/FSU)
Union Syndicale de la Psychiatrie (USP)
Union syndicale Solidaires

- autres structures :
Agir ensemble contre le Chômage ! (AC !)
Appel des appels (Ada)
Appel des 39 – La Nuit Sécuritaire
Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale (Cedetim)
Collectif « Nous refusons la politique de la peur »
Comité de défense des libertés fondamentales contre les dérives sécuritaires (Codelib Saint-Nazaire)
Comité européen droit, éthique et psychiatrie (CEDEP)
Mouvement politique d’éducation populaire (M’Pep)
Réseau féministe « Ruptures »
Réseau Stop Précarité
Témoignage Chrétien


Notes

[1Points 47 et 49 des conclusions du Comité des droits de l’enfant (traduction officielle en français de ce rapport).

  • 47. Le Comité est préoccupé par les restrictions imposées à la liberté d’association des enfants par l’utilisation d’émetteurs de sons à très haute fréquence, particulièrement pénibles pour les enfants, et par le recours à des armes de type Flash-Ball et Taser, alors que les forces de sécurité n’ont pas reçu d’instructions suffisantes en ce qui concerne leur utilisation contre les enfants.
  • 49. Le Comité recommande à l’État partie de revoir ou d’interdire l’utilisation des
    émetteurs de sons à très haute fréquence et du Flash-Ball et autres dispositifs dangereux,
    car elle pourrait constituer une violation du droit des enfants à la liberté d’association et de
    réunion pacifique, droit dont l’exercice est essentiel pour le développement des enfants et
    ne peut être soumis qu’à des restrictions très limitées comme le prévoit l’article 15 de la
    Convention. Il recommande en outre à l’État partie de prendre des mesures pour
    harmoniser les règles relatives à la liberté d’association pour les enfants de tous âges.

[2Extrait du communiqué du 16 juillet 2009 de la fédération LDH de Seine Saint Denis : « Non aux violences policières ».

[5Extrait de « Les policiers font-ils un usage adéquat du Flash-Ball ? » par Mael Inizan, Le Monde du 17 juillet 2009.


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