moratoire en région PACA pour la mise en place dans les lycées de dispositifs biométriques de contrôle de l’accès à la cantine


article de la rubrique Big Brother > biométrie
date de publication : mercredi 13 mai 2009
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La technologie de reconnaissance du contour de la main, sans utilisation d’empreintes digitales, est la seule qui soit autorisée par la CNIL dans les établissements scolaires, et uniquement pour l’accès à la cantine.
Cependant le conseil régional PACA a décidé un moratoire sur leur mise en place dans les lycées.

Autre élément du dossier que vous trouverez ci-dessous : le revirement du colllège de Carqueiranne qui, après avoir été l’un des premiers à faire appel à cette technologie – ce qui avait valu à son directeur d’être distingué en 2005 aux Big Brother Awards –, vient de renoncer à son utilisation. Peut-être le collège avait-il été influencé à l’époque par le Gixel, autre lauréat des Big Brother Awards 2004.


La CNIL dit non aux empreintes digitales pour la biométrie dans les écoles

Le 26 juin 2008, la CNIL a refusé l’utilisation d’un dispositif reposant sur l’empreinte digitale pour contrôler l’accès à un établissement scolaire ainsi que la présence des élèves.

Pour la première fois, la CNIL s’est prononcée sur l’utilisation d’un dispositif reposant sur la reconnaissance des empreintes digitales avec un stockage sur une base de données pour contrôler l’accès à un établissement d’enseignement ainsi que la présence des élèves.

Elle a considéré que la mise en place d’un tel dispositif n’était pas justifiée compte tenu de l’absence d’un fort impératif de sécurité. En effet, conformément à sa doctrine définie et codifiée en 2007, le contrôle d’accès à un lycée ainsi que le contrôle de présence des élèves n’ont pas pour objet de sécuriser l’accès d’un nombre limité de personnes à une zone bien déterminée, représentant un enjeu majeur dépassant l’intérêt strict de l’organisme.

A ce jour, la CNIL a exclusivement autorisé l’utilisation de dispositifs ayant pour finalité le contrôle de l’accès à la cantine scolaire reposant sur la reconnaissance du contour de la main, pour lesquels une procédure d’autorisation unique a d’ailleurs été adoptée en avril 2006 afin de faciliter l’accomplissement des formalités préalables. La CNIL n’est pas hostile à l’utilisation de la biométrie mais elle opère une distinction entre les techniques ayant recours aux empreintes digitales et les autres (contour de la main, réseau veineux, etc). Pourquoi une telle différence ?

Elle repose sur le constat que, contrairement au contour de la main, l’empreinte digitale est une biométrie à « trace ». Chacun laisse des traces de ses empreintes digitales, plus ou moins facilement exploitables, dans beaucoup de circonstances de la vie courante (sur un verre ou une poignée de porte etc.). Ces « traces » peuvent être capturées à l’insu des personnes et être utilisées notamment pour usurper leur identité. C’est pourquoi leur utilisation doit être strictement limitée et encadrée. C’est également pour ces raisons que la CNIL a refusé, le 17 juillet 2008, la mise en œuvre de huit autres dispositifs reposant sur l’enregistrement des empreintes digitales dans une de base données. Ces refus concernaient, notamment, le contrôle de l’accès aux locaux d’une société de transformation de produits alimentaires, d’une entreprise de gestion de patrimoine immobilier et d’un établissement hébergeant des enfants confiés à l’aide sociale.

S’agissant du refus d’autorisation concernant l’établissement scolaire, la Commission a pu constater que le choix d’un tel dispositif biométrique était consécutif à des sollicitations commerciales répétées. En conséquence, elle appelle les chefs d’établissements à être vigilants lorsqu’ils sont démarchés par des sociétés distribuant des systèmes biométriques.

Enfin, la CNIL souhaite poursuivre sa réflexion quant à l’utilisation de dispositifs biométriques auprès de mineurs et envisage prochainement de procéder à des auditions d’associations de parents d’élèves, de chefs d’établissement et de représentants du ministère de l’Education nationale.

Lire également, la page du site de la Cnil consacrée aux questions-réponses sur les dispositifs biométriques pour l’accès aux cantines scolaires.

Biométrie : pourquoi le collège de Carqueiranne renonce

par Sylvain Mouhot, Var Matin, le 13 mai 2009


Montrer patte blanche pour accéder à la cantine : le concept a fait des émules. Trop coûteux, il a été abandonné au collège Joliot-Curie, précurseur en 2002. Il y a sept ans déjà, le collège de Carqueiranne était novateur dans l’utilisation de la technologie biométrique de gestion des demi-pensionnaires [1]. Pour entrer dans la cantine, les élèves devaient montrer patte blanche dans un appareil de reconnaissance du contour de la main (RCM).

L’expérience a fait boule de neige. En France, près de deux cents établissements scolaires sont équipés par Alise, une société de Venelles (Bouches-du-Rhône) qui se targue d’une progression de 60 % par an. Le lycée Bonaparte et le collège de la Marquisanne à Toulon figurent parmi les derniers convaincus, à la rentrée 2008.

Trop en avance

Mais à Carqueiranne, l’histoire s’écrit au passé. La biométrie RCM n’a pas survécu au départ du chef d’établissement qui l’avait initiée. « Sans doute étions-nous trop en avance. Une technologie doit être partagée par toutes les composantes de l’établissement pour être efficace. De toute façon, notre matériel était devenu obsolète, dit Jean-Pierre Einhorn, l’actuel principal du collège Joliot-Curie. En tant qu’ordonnateur des dépenses, j’ai mis fin au contrat en en référant à l’inspection académique et au conseil général. » Les frais de maintenance, plusieurs milliers d’euros, ont été un autre élément déclencheur.

Entre 5 000 € et 15 000 €

Pierre Benguigui, dirigeant d’Alise (qui n’équipait pas le collège de Carqueiranne), explique : « Chez nous, les frais de maintenance sont calculés à 8 % du montant de la fourniture. Le lecteur lui-même coûte 3 000 €, contre 2 600 € pour un simple lecteur de cartes. En ajoutant le logiciel et toutes sortes d’options, la facture oscille entre 5 000 et 15 000 €. Les établissements peuvent demander une subvention auprès de leurs autorités compétentes, conseil général (collège) ou régional (lycée). Le lecteur RCM est comme le volant hi-tech d’une voiture. Il ne sert à rien sans la voiture qui va avec. »

Aujourd’hui, le collège Joliot-Curie est revenu à « un tout petit logiciel » et l’obligation pour les 650 demi-pensionnaires de décliner leur identité. Ça marche aussi.

Le principal se dit toutefois prêt à revenir à la biométrie si le besoin s’en fait sentir. « Le système permet aussi de contrôler les prêts de livres et de manuels scolaires, d’enregistrer les entrées et sorties du collège. Je n’ai rien contre la technologie puisque nous avons instauré le suivi des notes sur internet. »

Au moins 25 collèges et lycées pourvus dans le département

Avec au moins vingt-cinq établissements pourvus, le Var est en tête des départements ayant recours à la biométrie RCM dans les cantines scolaires. Le conseil général a doté vingt et un collèges : Joseph-d’Arbaud (Barjols), Frédéric-Montenard (Besse), Paul-Eluard et Jean-Moulin (Brignoles), Gérard-Philipe (Cogolin), La Ferrage (Cuers), Général-Ferrié et Jean-Rostand (Draguignan), Marie-Mauron (Fayence), Jean-Cavaillès (Figanières), les Chênes (Fréjus), Guy-de-Maupassant (Gareoult), Victor-Hugo (Gassin), Léonard-de-Vinci (Montauroux), André-Cabasse (Roquebrune-sur-Argens), Berty-Atbrecht (Sainte-Maxime), Henri-Matisse (Saint-Maximin), Alphonse-Karr (Saint-Raphaël), La Martisanne et Peiresc (Toulon), Alphonse-Daudet (La Valette).
Il faut ajouter au moins quatre lycées équipés par Alise : Bonaparte (Toulon), Beaussier et Langevin (La Seyne-sur-Mer) et le lycée du Golfe de Saint-Tropez.

Il y a deux ans, le président de la Région Michel Vauzelle a fait part à l’ensemble des proviseurs de sa volonté que ce système ne soit pas mis en oeuvre, en raison du jeune public auquel il est appliqué.
« Les élus régionaux ont décidé d’un moratoire sur la mise en place, même à titre expérimental, de systèmes biométriques dans les lycées de Paca », indique-t-on à la Région.

Depuis trois ans, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a adopté des autorisations uniques en matière de biométrie. Dès lors que les appareils respectent les prescriptions définies par la Cnil, ils peuvent faire l’objet d’une déclaration en ligne sous la forme d’un engagement de conformité à l’autorisation adéquate. Chez Alise, chaque borne biométrique RCM s’accompagne systématiquement d’un lecteur de cartes magnétiques pour ceux que cette technologie rebute.

Conditionnement des plus jeunes

En 2004, le Gixel, un groupement d’industriels de microélectronique, conseillait au gouvernement, pour mieux faire accepter la biométrie à la population, de conditionner les plus jeunes et prescrivant une « éducation dès l’école maternelle, pour entrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine [...] ».

Notes

[1L’initiative avait été décriée sur fond de respect des libertés individuelles, mais la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) l’a autorisée en 2002.


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