liberté pour les militants des droits de l’Homme emprisonnés en Chine !


article communiqué commun dont la LDH est signataire  de la rubrique international > Chine
date de publication : mercredi 3 novembre 2010
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A l’occasion de la visite officielle en France de Hu Jintao, président de la République populaire de Chine, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et ses organisations membres, Human Rights in China (HRIC), International Campaign for Tibet (ICT) et la Ligue française des droits de l’homme (LDH) demandent notamment à Nicolas Sarkozy d’appeler les autorités chinoises au respect des droits fondamentaux des militants des droits de l’Homme et à ceux des minorités ethniques.


Communiqué de presse (FIDH, HRIC, ICT, LDH)

Visite officielle de M. Hu Jintao en France : les droits humains doivent enfin être abordés !

Paris - Bruxelles-New York 3 Novembre 2010


Alors que M. Hu Jintao, Président de la République populaire de Chine et secrétaire général du Parti communiste de Chine est en visite officielle en France, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et ses organisations membres, Human Rights in China (HRIC), International Campaign for Tibet (ICT) et la Ligue française des droits de l’homme (LDH) demandent au président français, M. Sarkozy de mettre les droits humains au sommet de l’ordre du jour des réunions bilatérales.

Nos organisations ont exprimé leur profonde préoccupation concernant la détérioration des droits de l’homme en Chine, dans la foulée des Jeux olympiques et de l’Exposition universelle de Shanghai. Selon Human Rights in China près de 40 personnes ont été mise en résidence surveillée en Chine dans les semaines suivant la remise du prix Nobel de la paix à 2010 à Liu Xiaobo. Un militant des droits nationaux a fait remarquer que l’intensité et la portée de cette répression est supérieure à celles qui a sévi lors des Jeux olympiques de Beijing 2008, de la signature de la Charte 08, et du 60e anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine en 2009. D’autres observateurs prédisent que la répression va se poursuivre et que davantage de personnes seront probablement placées en résidence surveillée.

Outre le harcèlement continu et l’intimidation exercé à l’encontre de la société civile chinoise et des défenseurs des droits humains, les autorités continuent de violer les droits fondamentaux des personnes appartenant à des minorités ethniques. Selon l’International Campaign for Tibet, plusieurs manifestations ont eu lieu il y a deux semaines à l’initiative d ’écoles et collèges tibétains alors que de nouvelles mesures ont été prise mettant l’accent sur le chinois comme langue principale d’enseignement et faisant du tibétain un simple cours de langue avec moins de temps attribué dans les programmes. Les protestations se sont propagées dans plusieurs zones du Qinghai à Beijing, impliquant des milliers d’étudiants tibétains. L’ampleur de ces protestations à travers le Tibet reflète la force des sentiments des Tibétains au sujet de la marginalisation et de l’érosion de leur langue, et du fondement de l’identité tibétaine, la religion et la culture. Plus de 300 enseignants et étudiants du Qinghai ont signé une pétition en faveur de la langue tibétaine. Alors que la sécurité a été renforcée dans les lieux de protestation, des sources ont confirmé l ’arrestation et la détention de plus de 20 élèves d’une école tibétaine en Chabcha le 22 Octobre. La FIDH, HRIC, ICT et la LDH notent que les membres de la minorité ouïgoure ont également longtemps souffert de l’érosion de leurs droits linguistiques dans toutes les écoles du Xinjiang.

Alors que la communauté internationale concentre son attention sur ses liens économiques avec la Chine, plusieurs sujets de préoccupation demeurent sans réponse adéquate de la part de la communauté internationale. Les déficiences graves et chroniques du système judiciaire chinois, en particulier l’insuffisance des garanties de procédure, la procédure pénale, bien documentées par le groupe droits de l’homme, et la fameuse législation sur les secrets d’Etat ont créé des conditions favorables à l’impunité. Les garanties fondamentales inscrites par les normes internationales des droits de l’homme et par la Constitution chinoise ne sont pas remplies, malgré les déclarations contraires des autorités chinoises.

La FIDH, HRIC, ICT et la LDH, appellent M. Sarkozy à aborder ces questions cruciales lors de sa rencontre avec la délégation chinoise et à exercer des pressions sur la Chine afin qu’elle prenne des mesures immédiates en vue de l’amélioration concrète de son bilan des droits de l’homme. La France doit exiger la libération immédiate du lauréat du prix Nobel de la paix 2010, Liu Xiaobo et de tous les autres défenseurs des droits humains et militants en emprisonnés. En outre, la France doit demander la publication des statistiques et autres informations pertinentes concernant l’application de la peine capitale en Chine. La France et l’Union européenne, dans le cadre du dialogue bilatéral UE/Chine sur les droits de l’homme, doit s’assurer que les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, ainsi que les droits des personnes appartenant à des minorités soient respectées par les autorités chinoises.

Alors que la Chine va de l’avant comme une grande puissance au niveau international, la communauté internationale doit envoyer un message fort selon lequel ce rôle porte également la responsabilité de protéger les principes universels des droits humains. Nos organisations membres regrettent que ce message n’ai pas été effectivement porté aux autorités chinoises dans le passé. Nous espérons sincèrement que cette occasion ne sera pas perdu.

Contacts Presse :

FIDH : Karine Appy/Fabien Maitre + 33 1 43 55 14 12 / + 33 1 43 55 90 19
ICT : Vincent Metten, Directeur Européen +32(0)26094410
HRIC : Mi Ling Tsui, Communications and Media Director, 001 212-239-4495
LDH : Elisabeth Allès, Experte sur la Chine +33 (0)6 19 21 39 60

Le groupe de travail « Chine » de la LDH édite un bulletin qui constitue une source d’information et de réflexion – les numéros parus sont disponibles en ligne à partir de cette page. Ci-dessous, l’éditorial du dernier bulletin, celui d’octobre 2010.

Séisme politique et camouflage d’informations autour du prix Nobel

Les réactions des autorités chinoises à l’octroi du prix Nobel de la Paix au prisonnier Liu Xiaobo éclairent sur le fonctionnement du régime, sur sa force et sur ses faiblesses. Le 8 octobre, il n’était pas question de parler du prix Nobel : cinq minutes à peine après l’annonce norvégienne, l’information est sortie des réseaux ; même les grands hôtels et les bâtiments diplomatiques autorisés à recevoir les chaînes étrangères n’avaient plus accès à la B.B.C. ou à C.N.N. Certes, lors d’une conférence de presse le lendemain, la question ne pouvait être éludée, mais la protestation indignée du ministère des Affaires étrangères fut reportée vers les rubriques de moindre importance.

Comme il fallait parler le moins possible de ce sujet brûlant, c’est l’ensemble des palmarès Nobel 2010 - scientifiques y compris - qui a disparu des portails Sohu, Ten Cent, Sina, Net ease. Il s’agissait donc, au risque du ridicule, de cacher aux Chinois ce que savait le monde entier. Un grand nombre de militants ont été interrogés, éloignés, détenus, menacés s’ils persistaient à répandre la nouvelle. Simultanément, les sites étrangers chinois qui relayaient l’information et s’en réjouissaient - Penclub indépendant, New Century News, Boxun, Charter 08, Canyu notamment - ont été attaqués par des virus informatiques, sans d’ailleurs grands résultats.

Les officiels chinois se sont efforcés ensuite de discréditer le prix ou plutôt le jury qui l’avait décerné. Ce dernier, manipulé par l’Occident dans un relent de guerre froide, cherchait à imposer à la Chine ses conceptions de la démocratie ; en récompensant un criminel, il montrait son dédain pour le système judiciaire national ; ce n’était d’ailleurs pas la première fois et de citer les réactions acerbes de la presse soviétique lors de l’octroi du prix à Sakharov (1975). À coup sûr, une référence convaincante…

La presse chinoise s’est trouvée quelques alliés : elle a rapporté des éditoriaux de journaux pakistanais et d’Arabie Saoudite ainsi que de l’agence russe Novosti pour affirmer que le Nobel de la Paix a perdu toute signification et dignité et qu’il est redevenu un instrument de la guerre froide. Elle a même trouvé un militaire norvégien pour qui le prix aurait dû revenir au gouvernement chinois en raison des multiples bienfaits qu’il dispense à la population.

Ces manipulations de l’appareil d’information sont à la fois dramatiquement efficaces et dérisoires. D’un côté, la grande majorité de la population chinoise ne sait rien et ne veut rien savoir du prix Nobel de la Paix et de son lauréat ; elle ignore ou a oublié les centaines de morts de 1989, en plein centre de la capitale. Cette tragique ignorance organisée par le pouvoir explique une grande part de la passivité d’un peuple cantonné dans un rôle de figurant. Mais le pouvoir ne parvient pas à tout contrôler. Les reportages étrangers diffusés sur Arte montrent que les étudiants de Beijing étaient parfaitement informés et qu’ils disposaient donc des moyens de contourner la censure des médias. Au sein même du P.C.C., un ancien secrétaire de Mao Zedong, Li Rui, signataire d’une pétition de cadres retraités du parti en faveur de l’abolition de la censure, estime que l’octroi du prix aura des effets positifs car il éveillera les esprits à la nécessité des réformes.

Mais l’octroi du Nobel de la Paix à Liu Xiaobo porte aussi à s’interroger sur les réactions extérieures et sur leur extrême modération pour ne pas dire leur indigence, s’agissant des capitales occidentales. L’Europe, son opinion publique et ses gouvernements, ne parviennent pas à se mobiliser comme ils avaient fait avec succès en faveur des dissidents de l’Union soviétique. Ils ne voient pas que le mépris et la répression des dissidents nationaux s’accompagnent naturellement de mépris et d’une expansion agressive sur la scène internationale. Visiblement irrité par les critiques étrangères et les demandes de libération du lauréat, le Quotidien du peuple affirmait tout de go le 12 octobre : « Peu importent les craintes et les suspicions, l’expansion de la Chine ne peut être arrêtée et l’hégémonie occidentale va vers sa fin ».

Peut-être faudrait-il s’inquiéter quand un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies traite de criminels deux de ses prix Nobel de la paix (Liu Xiaobo et le dalai lama) et qu’il contraint à l’exil le futur prix Nobel de littérature, Gao Xinjian. Peut-être ne faudrait-il pas se contenter de rappeler l’importance des droits de l’homme comme ont fait les gouvernements européens et en particulier le gouvernement français. Le peuple chinois mérite mieux que cette compassion hypocrite et indulgente.


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