le logement social dans le Var


article de la rubrique droits sociaux > logement
date de publication : mercredi 23 novembre 2005
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Un problème aigu.
De nombreuses communes préfèrent payer des amendes,
plutôt que de construire des logements sociaux. [1].

Des études chiffrées confirment les conclusions de cet article : bilan d’étape de l’application de la loi SRU dans le Var .

[Première publication le 13 octobre 2005,
dernière mise à jour le 23 novembre 2005.]


L’un des objectifs de la loi "relative à la solidarité et au renouvellement urbains" (SRU) du 13 décembre 2000 est de mieux répartir les logements sociaux. Pour y parvenir, la loi impose aux communes de province, qui comptent plus de 3 500 habitants, et qui sont situées dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants, d’atteindre en vingt ans le quota de 20 % de logements sociaux (HLM, logements conventionnés, etc.).

Actuellement, les services de l’Etat font une évaluation des efforts accomplis en quatre ans par les municipalités concernées. Il est prévu des sanctions financières pour celles qui n’auraient pas rempli leurs obligations : un prélèvement d’environ 152 euros par habitation manquante (les dépenses engagées par la ville pour réaliser des logements sociaux sont déduites du prélèvement). Les préfets ont un rôle essentiel à jouer : à eux d’établir un "état des lieux" et, le cas échéant, de mettre en application les sanctions prévues par les textes.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, région très concernée par la crise du logement, « 60% des communes soumises à la loi n’ont construit aucun logement social » [2]. Certains maires, en phase avec leurs électeurs, assument ce choix. Ils préfèrent payer une amende. La Fondation abbé Pierre réclame le triplement des amendes pour faire bouger les récalcitrants.

Le Var

Le département du Var a un gros retard en ce domaine. Pour le rattraper, il faudrait construire 1 500 logements sociaux chaque année pendant dix ans.

Quatre communes seulement ont rempli leur contrat et deux ont approché l’objectif ; en revanche, seize villes essentiellement résidentielles et/ou balnéaires, sont loin, parfois très loin, du compte.

Toulon, ville du sénateur-maire UMP Hubert Falco, a 13% de logements sociaux, et elle n’a réalisé que 45% de l’objectif fixé pour 2001-2004 (366 logements effectivement réalisés alors que l’objectif fixé par la loi était 812).

La Garde et La Seyne (villes anciennement gérées par des municipalités de gauche à majorité communiste) sont déjà au niveau des 20 % de HLM requis, mais on compte beaucoup de mauvais élèves parmi les 25 communes varoises soumises à ces obligations.

Des réfractaires

Les raisons invoquées sont souvent la cherté et la rareté du foncier ainsi que l’envolée des coûts de la construction. Mais pour Pierre Dartout, préfet du Var, « le foncier n’est peut-être pas toujours la bonne explication ». « Il y a des villes pour lesquelles j’entrevois une volonté insuffisante » : certains maires s’abritant derrière « le sentiment de leur population » ne veulent tout bonnement pas entendre parler de logement social.

A Carqueiranne, « 600 appartements HLM, c’est non ! »

Le maire de Carqueiranne, Marc Giraud, n’apprécie guère la loi SRU. De fait, sa commune ne fait pas partie des villes prêtes à satisfaire les objectifs assignés par la préfecture. Il assume : « 600 logements sociaux, c’est non ! » tranche l’élu, « alors nous payons, c’est un choix politique » : entre 60 000 euros et 75 000 euros d’amende par an qui sont reversés à la communauté d’agglomération.

« Quand on m’impose ce chiffre, je dis simplement que c’est impossible » poursuit-il, « cette loi a été faite sans penser aux contextes locaux. Chez nous, le prix des terrains n’est pas le même qu’en Ardèche ou dans le Cantal  ». Sa municipalité devrait tout de même livrer prochainement 50 logements sociaux. [3]


Pour l’heure, le préfet ne souhaite pas livrer sa « liste noire », préférant entamer une « dernière tentative de pédagogie ». Mais, si les explications ne sont pas satisfaisantes, il menace de doubler l’amende infligée aux communes.

A Sanary, « il y a assez peu de demandes de logements sociaux ».

Ferdinand Bernhard, maire de Sanary, a fait un « choix » : limiter autant que possible le nombre de « logements en général ». Depuis qu’il a été élu en 1989, il n’a « pas déclassé un mètre carré de terrain pour le rendre constructible ». Il prétend même avoir « diminué les droits à construire ». Les mises en chantier ont été moins nombreuses durant ses seize ans de mandat qu’entre 1985 et 1989.

Néanmoins, deux opérations sont programmées ou à l’étude : l’une d’une dizaine de logements sociaux, l’autre qui donnera la « priorité aux jeunes », explique M. Bernhard. Mais il ne souhaite pas aller plus loin. « Il y a assez peu de demandes de logements sociaux » [4], soutient-il. « Si on urbanise trop vite, on court à la catastrophe. Augmentation de la population, accroissement des besoins en équipements publics, demandes de services en hausse... Une politique du logement dynamique nécessite de nouveaux investissements, que la municipalité ne peut pas financer, » selon M. Bernhard. « Sanary a 17 000 habitants. Je ne serais pas plus heureux avec 20 000 ou 25 000 », confie-t-il [5].

... chez nous le HLM ne pousse pas (Pessin, Le Monde du 13 octobre 2005)


Un problème qui concerne l’agglomération

Au début de l’été, le maire UMP de La Garde, qui a conquis en 2001 une ville abondamment pourvue en HLM, a pris la plume, pour se plaindre à mots couverts de certains de ses collègues. Dans un courrier adressé au directeur général des services de TPM, Jean-Louis Masson, chargé de la politique de l’habitat au sein de la communauté d’agglomération Toulon-Provence-Méditerranée (TPM), déplorait « le faible engagement des communes [...] pour la création de logements sociaux ».

Dans l’agglomération toulonnaise, où neuf demandes de HLM sur dix ne peuvent être satisfaites, l’objectif de construire 800 logements sociaux par an nécessite un effort important, et Hubert Falco, président de TPM [6], entend désormais « faire pression sur toutes les communes notamment celles qui ont du foncier. »

Notes

[1Deux sources d’information ont été utilisées pour rédiger ce survol rapide : un article de Lilian Renard publié dans Var-Matin le 27 septembre 2005, et une série d’articles de Bertrand Bissuel sur la loi SRU, publiés dans Le Monde daté du 13 octobre 2005.

[2D’après Libération, mardi 30 août 2005.

[3Var-Matin du 14 octobre 2005 précise que, pour ce qui concerne les années 2002, 2003 et 2004, la commune de Carqueiranne a réalisé à 48% les objectifs qui lui étaient assignés par la loi SRU.

[4C’est du moins ce qu’il déclare au journal Le Monde daté du 13 octobre 2005.
Si, au cours des derniers mois, M. Ferdinand Bernhard s’était rendu au Domaine du Val d’Aran il aurait pu y rencontrer des dizaines de familles qui, faute de pouvoir être relogées à Sanary, ont dû partir pour La Seyne, Toulon ...

[5Le quotidien Var-Matin nous apprend dans son édition de vendredi 14 octobre que, au cours des trois années 2002-2004, il ne s’est pas construit un seul logement social sur la commune de Sanary !
Ce n’est pas une surprise ... Ferdinand Bernhard l’avait annoncé dès 1988, dans un programme intitulé : faire du tourisme de qualité.
Les logements sociaux feraient sans doute tache à Sanary-sur-mer !

[6La commune de Sanary ne fait pas partie de TPM.


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