la LDH refuse que Toulon devienne un laboratoire pour la politique de Brice Hortefeux


article de la rubrique extrême droite
date de publication : mercredi 12 mars 2008
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Décidément, Toulon est un lieu de prédilection pour Nicolas Sarkozy. C’est à Toulon, en février 2004, qu’il avait déclaré son intention de racoler l’électorat Front national, et c’est encore à Toulon, le 7 février 2007, qu’il a commencé à développer ce qui est devenu l’un de ses thèmes de prédilection : la réhabilitation de la colonisation.

Hier, Nicolas Sarkozy est venu à Toulon faire la promotion de sa “politique d’immigration maîtrisée”. Mais comment peut-il sans cynisme se féliciter d’être un artisan de la « réduction de l’influence de l’extrême droite », alors qu’il en reprend une partie de la thématique xénophobe ?

Dans le communiqué qu’elle a diffusé à cette occasion, la section locale de la LDH a condamné cette politique. Après avoir refusé que Toulon soit un laboratoire du Front national, nous refusons qu’elle devienne « un laboratoire pour la politique de Brice Hortefeux » !


Var-Matin, le 12 mars 2008, page 2.

Communiqué de la Fédération des Bouches du Rhône de la LDH

MM Sarkozy et Hortefeux sont aujourd’hui dans notre région à Toulon pour parler "immigration".

Il est rare que le Ministre "de l’immigration et de l’identité nationale" accompagne le Président de la République dans ses déplacements en province.
Ce choix politique et ce choix géographique ne doivent rien au hasard.

La mission de B. Hortefeux est, en effet, de continuer à fixer les voix du FN , notamment dans notre région et à Marseille pour qu’elle se portent au 2ème tour sur les listes UMP en difficulté.

La Ligue des droits de l’Homme dénonce cette intrusion du Président de la République dans le débat électoral local.

Sur le sens profond de cette visite la Ligue des droits de l’Homme pose une fois de plus la question : comment serait-il possible de poursuivre cette instrumentalisation du thème de l’immigration sans qu’elle apporte avec elle, au sein de l’appareil d’Etat, sa redoutable contamination de négation des droits de l’Homme, de violences et de xénophobie.

Marseille le 11 mars 2008

Nicolas Sarkozy défend à Toulon sa “politique d’immigration maîtrisée”

AFP - le 11 mars 2008 - 16 h

Nicolas Sarkozy a défendu mardi à Toulon, à cinq jours du deuxième tour des élections municipales, sa “politique d’immigration maîtrisée”, l’une de ses thématiques fétiches de la campagne présidentielle.

« Il faut une politique d’immigration maîtrisée pour bien recevoir ceux qu’on reçoit », a déclaré le président de la République au cours d’une table ronde avec des Français d’origine étrangère qui ont présenté leur parcours d’intégration.

« Je dénie le droit à un certain nombre de donneurs de leçons de dire que, parce qu’on dit “politique d’immigration maîtrisée”, on serait raciste. Ce procès-là, il est inadmissible », a-t-il lancé.

M. Sarkozy, accompagné du ministre de l’Immigration Brice Hortefeux, a rappelé sa volonté que se tienne chaque année « un débat au Parlement » au cours duquel le gouvernement présenterait ses « objectifs en matière d’immigration », notamment sur « des quotas annuels ». « Il n’est pas anormal que la société française fasse venir ceux et celles dont elle a besoin », a estimé le chef de l’Etat, plaidant à nouveau pour des « quotas par métier et par zone géographique », une idée controversée actuellement examinée par une commission présidée par Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel.

Le président de la République a également dit son souhait de mettre en place une « législation sur les droits des étrangers » et de réprimer davantage ceux qui « emploient des clandestins ». « La France ne peut pas accueillir tout le monde », mais « la France doit accueillir ceux qui sont persécutés à travers le monde », a martelé le chef de l’Etat, défendant le principe de « l’identité nationale » qui « n’est pas une pathologie ».

M. Sarkozy s’est aussi félicité d’avoir été l’un des artisans de la « réduction de l’influence de l’extrême droite » qui « a empoisonné le débat politique pendant des années », prenant en exemple la ville de Toulon qui fut dirigée par le FN de 1995 à 2001 avant d’être conquise par Hubert Falco (UMP), réélu dimanche.

Les experts électoraux du parti du président sont formels. Les résultats du 9 mars s’expliquent en partie par l’abstention des électeurs du FN ralliés à M. Sarkozy lors de la présidentielle. Un conseiller du chef de l’Etat ne cachait pas qu’en remettant l’immigration au premier plan, Nicolas Sarkozy leur adresse un signal. Afin de se prémunir de toute accusation "d’instrumentalisation", le président a estimé qu’il avait plus fait pour affaiblir l’extrême droite que "les défileurs de pancartes".

Philippe Ridet, Le Monde du 13 mars 08

« s'il fait un pas vers nous, nous devons lui tendre la main »

La main tendue de Nicolas Sarkozy à l’extrême-droite française

par Jurisconsult, le 11 mars 2008 [1]

Ainsi, Nicolas Sarkozy s’est rendu, aujourd’hui, à Toulon pour parler... d’immigration. Déplacement sans rapport aucun avec les élections [locales], avait prévenu le service de presse du Palais de l’Élysée. Fort malheureusement, cette assurance n’était qu’un leurre, puisque la moitié de l’intervention faite lors d’une « cérémonie de remise de décrets de naturalisation » concernait ce sujet.

Une intervention [2] d’une médiocrité et d’une vacuité assez révélatrice d’une méthode : l’annonce d’un discours (« le président de la République Nicolas Sarkozy se rendra à Toulon pour intervenir sur l’immigration afin de rassurer les électeurs de l’extrême-droite sur son volontarisme en la matière ») étant finalement bien plus importante que le contenu du discours lui-même.

Une intervention dans laquelle le président de la République s’est cependant livré à un exercice (toujours périlleux) : établir la liste des « principes fondamentaux de la Nation » : « l’égalité des droits, l’égalité absolue entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations, l’obligation scolaire, la valeur du travail, le respect des biens et de la personne d’autrui, la tolérance, le respect de l’environnement ».

Voilà. c’est tout. Pas de principe de laïcité, pas de principe de liberté, pas de principe de décentralisation, pas de principe de solidarité entre les personnes riches et les personnes pauvres, etc. Beaucoup d’oublis qui inquiètent, à priori. Et, malheureusement, ces inquiétudes sont largement confortées par un autre passage du discours présidentiel.

En effet, citant, les « bâtisseurs célèbres de notre Nation », Nicolas Sarkozy a entrepris la constitution d’une nouvelle liste limitative. Ainsi, les « bâtisseurs » de la Nation seraient « Clovis, Philippe-Auguste, Jeanne d’Arc, Henri IV, Bonaparte, Charles de Gaulle ».

Les révolutionnaires ? Ils n’ont pas existé, ou tout du moins, ils ne méritent pas la considération présidentielle. Le front populaire ? N’en parlons pas. Des résistants non plus. Montesquieu, l’un des théoriciens du principe de séparation des pouvoirs (violé, sans cesse, à vrai dire, par le président) est lui aussi ignoré, tout comme la Commune, et, finalement, les Républiques successives.

Ainsi, hormis Charles de Gaulle, les seuls français « bâtisseurs » de la Nation seraient des défenseurs d’un pouvoir absolu et despotique. Mais surtout des symboles très anciens de l’extrême-droite française. Et le gage donné est, certes symbolique, mais important.

En déplacement hier à Toulon accompagné du ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, le Président ressort ses thèmes de campagne de 2007

par Antoine Guiral, Libération, mercredi 12 mars 2008

Des bains de foule, des sujets clivants, une voix plus basse qu’à l’accoutumée et l’œil rivé en toutes circonstances sur ses SMS : à Toulon hier, Nicolas Sarkozy s’est offert un revival de sa campagne présidentielle. Objectif du jour : mobiliser les classes populaires. Selon l’Elysée, elles ont boudé les urnes dimanche... mais avaient constitué de précieuses légions électorales pour le candidat Sarkozy en mai. C’est donc ici que se situent les réserves de voix.

Pot-pourri. Pour les appâter dans ce sud de la France où son ami Jean-Claude Gaudin est en danger à Marseille, mais où, à Toulon, l’UMP Hubert Falco a été réélu dès le premier tour, le chef de l’Etat a choisi de ressortir ses thèmes à succès : immigration, intégration, identité nationale. Pour ce pot-pourri du jour, son ami et ministre préposé à ces sujets, Brice Hortefeux, l’accompagne. Avant d’entrer dans le vif du sujet, voilà Nicolas Sarkozy à la préfecture du Var, pour une « cérémonie de remise de décrets de naturalisation », qui livre sa lecture du scrutin. D’emblée, il précise que « le président de la République n’a pas à s’impliquer dans les élections municipales ». Comme François Fillon, il indique qu’il « ne s’agira pas dimanche prochain de décider de la politique de la Nation mais pour chacun de choisir la meilleure équipe pour gérer sa commune ».

Pour enfoncer le clou, il rabaisse ces municipales à de simples « questions de la vie quotidienne, de la proximité, du voisinage ». S’ensuit une vague de satisfecit pour tous ses ministres élus au premier tour, un petit coup de pouce à Xavier Darcos (ministre de l’Education nationale) en difficulté à Périgueux (lire page 4) et l’annonce qu’il accepte le choix de Christian Estrosi (ministre de l’Outre-Mer) de quitter le gouvernement pour s’occuper exclusivement de Nice s’il est élu maire dimanche. « Je ne peux me satisfaire qu’au premier tour la participation ait été la plus faible [65,7 %, ndlr] jamais enregistrée à des élections municipales », assure aussi le président de la République. Et de lancer un curieux appel pour que chacun, « quels que soient ses choix, ses croyances, ses opinions », aille voter en fin de semaine. Foin des convictions politiques d’antan. Encore plus surprenant, il assure vouloir « tirer les leçons de ces élections ».
« Le peuple aura parlé. Je tiendrai naturellement compte de ce qu’il aura exprimé. » Comment ? Un conseiller joue les acrobates : « C’est un scrutin local qui ne change pas le contrat passé avec les Français pour cinq ans, mais de petits réajustements sont possibles. »

Pour l’heure direction une maison de quartier de la ville. « Tu salis mon quartier », lance un homme en attendant le Président, en référence à l’épisode du « pauv’con » du Salon de l’agriculture. Mais l’accueil est chaleureux. Sarkozy happe les mains à coups de « merci… merci bien… hein, merci… » La visite d’un atelier consacré à « l’autorité parentale » donne lieu à cet échange avec une travailleuse sociale : « Les familles viennent d’où ? - Du quartier. - Mais… l’origine, insiste Sarkozy. - On n’a pas vraiment de statistiques… » Il tourne les talons.

Quotas. Au palais des congrès, la table ronde a pour thème « immigration maîtrisée, immigration réussie ». Nicolas Sarkozy se fait accusateur : « Ceux qui font prospérer le racisme et la xénophobie sont ceux qui refusent le débat. » Il se prononce pour des quotas annuels « par métier, par zone géographique ». Brice Hortefeux est sommé d’atteindre le taux de 50 % d’immigration économique qui serait selon lui de 3 % aujourd’hui (le reste étant d’ordre familial). Mise en garde au passage à tous ceux qui n’ont pas de papiers et ont vocation à « être reconduits chez eux ». Parents d’enfants scolarisés inclus « pour ne pas ouvrir de nouvelles filières d’immigration clandestine ». Enfin, retour en force sur l’identité nationale : « Si la France n’est pas capable de l’assumer, qu’est-ce que vous demandez à ceux qui la rejoignent de partager, hein… Le vide ? »

Antoine Guiral

Alors que l’on parle d’intégration, le protocole du président interdit à la LDH de s’exprimer

par Guy Mouisse, La Marseillaise, le 12 mars 2008

A l’occasion de cette visite bien préparée, où tout doit être clean, la population d’un côté, et les officiels de l’autre, il n’y avait pas non plus la place pour une quelconque manifestation. La Ligue des droits de l’Homme avait l’intention de développer sa banderole place Besagne face au Palais Neptune : mal lui en prit, la police le lui a interdit et l’a confisqué.

Dans le même le temps, Gérard Estragon, connu pour son engagement sur ces valeurs humanistes, a été évacué manu militari par des policiers en civil car il criait en direction d’Hubert Falco : « Toulon ne deviendra pas le laboratoire de la politique de Brice Hortefeux ».

On l’a bien compris avec Sarko la contestation ne passera pas !

Guy Mouisse

Notes

[2L’intervention de Nicolas Sarkozy à Toulon figure sur le site de l’Elysée : http://www.elysee.fr/download/?mode....


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