pour une généralisation de l’égalité entre les filles et les garçons


article communiqué de la LDH  de la rubrique discriminations > femmes
date de publication : jeudi 3 juillet 2014
version imprimable : imprimer


Les ABCD de l’égalité offraient aux enseignant-e-s des outils et des ressources pour aider à la prise de conscience des stéréotypes de sexe, dans et hors la classe, et transmettre une culture de l’égalité entre les sexes [1]. Ces outils étaient fondamentaux, car c’est dès le plus jeune âge que l’on construit une culture de l’égalité entre femmes et hommes.
L’expérimentation des ABCD a été la cible d’une intense campagne de diffamation de la part de lobbys traditionalistes qui ont semé la confusion dans les écoles en faisant croire qu’il s’agissait de l’enseignement d’une prétendue « théorie du genre ».

Le gouvernement a choisi de remplacer les ABCD de l’égalité par un « plan d’action pour l’égalité entre les filles et les garçons » qui sera généralisé dès la rentrée prochaine. Le collectif « Pour un avenir solidaire », dont la Ligue des droits de l’Homme fait partie, réagit ci-dessous.

[Mis en ligne le 30 juin 2014, mis à jour et complété le 3 juillet]



Communiqué du collectif « Pour un avenir solidaire »

Paris, le 1er juillet 2014

Pour une généralisation de l’égalité entre les filles et les garçons !

Oui, l’égalité s’apprend à l’école !

Nous, militant-e-s associatifs, syndicalistes, étudiant-e-s, lycéen-ne-s prenons acte aujourd’hui du « plan d’action pour l’égalité entre les filles et les garçons » présenté par le ministre de l’Education nationale qui annonce sa généralisation dès la rentrée scolaire 2014-2015. Cette annonce intervient après des mois de rumeurs, d’intimidations et de campagnes de désinformation à peine déguisées

Le collectif « Pour un avenir solidaire » note avec intérêt la volonté du gouvernement d’ancrer l’égalité filles-garçons dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture qui s’intègre dans l’ensemble du parcours scolaire des élèves, notamment en l’ouvrant résolument aux collégiens, et en demandant que cette thématique figure dans tous les projets d’écoles et d’établissements. Il juge très positif que l’égalité entre les filles et les garçons fasse désormais partie du quotidien professionnel de tous les enseignant-e-s, personnels d’encadrement de l’Education nationale (IA, IEN, IPR), en se félicitant qu’elle ait une place centrale dans leur formation initiale (ESPE) et continue. Le collectif « Pour un avenir solidaire » prend acte de la volonté de densifier les outillages pédagogiques en les étendant à tous les enseignants.

Cependant, le collectif « Pour un avenir solidaire » constate que le plan d’action proposé comporte quelques incertitudes. D’une part, le plan est centré sur « l’égalité des droits entre les filles et les garçons », ce qui pourrait avoir pour conséquence de renvoyer ces thématiques à une vision formelle et juridique. Or, ce sont bien les pratiques quotidiennes et les représentations minées par les stéréotypes de genre (termes qui semblent avoir disparu comme par magie) qui sont au cœur des enjeux de progrès réels de l’égalité. En les écartant, le gouvernement risque de renoncer à ce qui faisait l’originalité de ce dispositif : sa méthodologie, basée sur une approche par le genre. D’autre part, il juge la partie « implication et relation avec les familles » assez frileuse, les écoles et les EPLE étant seulement « invités à évoquer » le sujet dans les instances des établissements, laissant l’information aux parents à une possibilité ouverte lors de la seule réunion de rentrée. Enfin, le collectif « Pour un avenir solidaire » regrette que les acteurs-ices des associations éducatives partenaires de l’école ne soient pas mobilisées dans ce nouveau plan d’action, car il n’y pas de progrès dans la promotion réelle de l’égalité entre les filles et les garçons sans une mobilisation de toutes les forces vives de l’éducation.

Si le collectif « Pour un avenir solidaire » regrette que la dénomination « ABCD de l’égalité » ait été abandonnée, il souligne d’autant plus l’importance d’une mise en œuvre effective de ce nouveau plan d’action dès la rentrée scolaire prochaine. En effet, rien ne serait pire que de fragiliser un projet si ambitieux à cause de quelques ultraréactionnaires, qui tiennent des propos mensongers pour manipuler les parents et leurs enfants et nourrir leurs représentations rétrogrades.

Car, oui, c’est en transmettant une culture de l’égalité dès la petite enfance que l’on favorise la parité dans toute la société. C’est en brisant les stéréotypes liés à l’orientation professionnelle que l’on lutte contre les inégalités salariales. C’est en prévenant les propos sexistes que l’on combat les discriminations, les violences et il reste encore du chemin à faire. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de ce statu quo dans une démocratie où l’égalité des sexes et des droits est invoquée comme un principe constitutionnel.

Aujourd’hui en France, seule une politique volontariste, qui se donne pour ambition d’agir en profondeur sur les représentations sociales et les mentalités, pourra venir à bout des inégalités femmes-hommes.

C’est pourquoi nous entendons poursuivre nos efforts pour la promotion et la généralisation réelle de l’éducation à l’égalité entre les filles et les garçons, au nom des valeurs qui nous rassemblent et qui sont inscrites sur le fronton de nos écoles : Liberté, Egalité, Fraternité.

Communiqué LDH

Paris, le 30 juin 2014

ABCD de l’égalité : le gouvernement doit confirmer sa généralisation dès la rentrée 2014

L’annonce du gouvernement d’abandonner la généralisation des enseignements à partir des ABCD de l’égalité, après son expérimentation positive en 2013, signe une capitulation honteuse pour lui, un recul inquiétant pour la démocratie, dramatique pour cette pierre de touche républicaine qu’est l’égalité, inacceptable pour ceux qui sont du côté des droits de l’Homme...

Alors que l’égalité femmes-hommes est un objectif sociétal central depuis des décennies, le gouvernement cède face à une offensive des plus minoritaires, ouvertement patriarcale, dont les relais se recrutent au sein des franges les plus radicales de l’extrême droite et d’activistes fondamentalistes. L’usage de la « novlangue » ne permettra pas de transformer en subtilité tactique ce qui apparaît clairement comme une débandade. Ainsi, les promesses de la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem et de Benoît Hamon, expliquant que les ABCD de l’égalité contre les stéréotypes filles-garçons à l’école ont un bilan positif et qu’on ne les abandonne qu’au profit d’un programme « très ambitieux », sonnent comme autant d’arguties pitoyables. En choisissant de faire le dos rond, en plaidant pour qu’ « on remette un peu de calme, qu’on arrête d’en faire une bataille politicienne », le gouvernement crée les conditions au mieux de l’immobilisme, au pire de la régression.

Les femmes, les enseignants, la jeunesse et tous les démocrates attachés au respect des droits et de l’égalité attendaient sur cette question, ô combien majeure, une position ferme. Généraliser l’utilisation des ABCD de l’égalité dans tous les établissements scolaires, c’était d’abord affirmer que l’enseignement de l’égalité entre les filles et les garçons est bel et bien un sujet en soi. Ensuite, qu’il s’inscrivait de façon forte et naturelle dans les missions élémentaires de l’école publique. C’était enfin, en tenant compte des émois d’une partie de la population troublée par des tombereaux de rumeurs et de calomnies déversées contre l’école laïque, faire le choix de la pédagogie citoyenne et de la fermeté des principes.

En choisissant de reculer devant une minorité refusant l’égalité femmes-hommes, le gouvernement envoie le plus négatif des messages quant à la mission qu’ont les enseignants d’éclairer les enjeux majeurs de la réalité sociale à partir de leur compétence professionnelle.

Il s’illusionne totalement sur la perspective d’un quelconque apaisement du débat public car les forces qu’il légitime, en satisfaisant à leurs campagnes mensongères, ne s’en arrêteront pas là dans leurs exigences d’instauration d’un ordre traditionnaliste.

La Ligue des droits de l’Homme, dont le combat tout entier est tourné vers la défense et la promotion de l’égalité, singulièrement entre les femmes et les hommes, demande solennellement au gouvernement de reconsidérer sa décision. Elle encourage toutes les femmes et les hommes, enseignants et parents d’élèves, toutes celles et ceux qui ont à cœur l’égalité, à manifester leur réprobation vis-à-vis d’une décision aussi dangereuse qu’incompréhensible. Elle entend poursuivre ses efforts pour la promotion de l’égalité femmes-hommes au sein de l’Education nationale, et contre la progression des idées d’extrême droite.


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP