RNCPS et article 4 de la loi Warsmann : vers de nouveaux rapprochements de fichiers administratifs


article de la rubrique Big Brother > l’administration et les données personnelles
date de publication : mercredi 18 mai 2011
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Le Répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), vaste filet social destiné à recenser pour chaque individu, grâce à des interconnexions utilisant son “numéro de sécurité sociale” (NIR), toutes les prestations sociales dont il bénéficie (sécurité sociale, prestations familiales, retraites, chômage...), continue à se mettre en place : l’arrêté listant les prestations et leurs organismes de gestion vient d’être publié.
L’un des objectifs essentiels de ce répertoire est « une efficacité accrue pour [...] la lutte contre les fraudes ».

D’autre part, l’article 4 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit – c’est l’article 2 de la proposition de loi de Jean-Luc Warsmann – ouvre la possibilité d’organiser par décret l’interconnexion de tous les fichiers de toutes les administrations

[Mis en ligne le 9 mai 2011, mis à jour le 18]



© Alan L. Bauer / www.alanbauer.com

Répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS)

Créé par l’article 138 de la loi 2006-1640 du 21 décembre 2006 qui a introduit l’article L. 114-12-1 du Code de la sécurité sociale
 [1], le Répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) a pour vocation de regrouper, sur la base du NIR, des données sur :

  • l’identification des bénéficiaires,
  • l’affiliation (rattachement administratif aux organismes),
  • la nature des risques couverts, des avantages servis et des adresses déclarées pour les percevoir.

Les objectifs essentiels de ce répertoire sont [2] :

  • une qualité de service renforcée, se traduisant notamment par la simplification des démarches et des procédures,
  • une productivité accrue pour les différents régimes,
  • une efficacité accrue pour le contrôle du versement des prestations et la lutte contre les fraudes.

Ce répertoire est [2] :

  • commun aux organismes chargés d’un régime obligatoire de base, aux caisses assurant le service des congés payés et aux organismes servant des prestations chômage,
  • ouvert aux organismes de la branche recouvrement dans le cadre de l’exercice de leurs missions, particulièrement celles touchant à la lutte contre le travail illégal,
  • ouvert aux collectivités territoriales ainsi qu’aux centres communaux d’action sociale dans le cadre de l’exercice de leurs compétences relatives à l’aide sociale,
  • ouvert au Centre de liaisons européennes et internationales de sécurité sociale dans le cadre de l’exercice de ses missions [1].

L’ensemble du projet est conduit par la Direction de la sécurité sociale en partenariat avec les organismes de protections sociale concernés.

Le décret n° 2009-1577 du 16 décembre 2009
 [3] qui encadre la mise en place du RNCPS indique que :

  • le RNCPS sera mis en oeuvre par la CNAV (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse),
  • deux listes d’informations fixées par arrêté interministériel seront publiées sur le portique de la SS : celle des « risques, droits et prestations » et celle des « organismes qui les gèrent »,
  • les collectivités territoriales et les centre communaux d’action sociale accèderont au RNCPS par l’intermédiaire du système d’information de la Caisse des dépôts et consignations.

L’arrêté du 21 mars 2011

L’arrêté fixant la liste des risques, droits et prestations pouvant figurer au RNCPS, et la liste des organismes qui les gèrent a été publié le 21 mars 2011 [4] :

  1. la liste des prestations pouvant figurer au RNCPS (maladie, maternité, accident du travail, invalidité, retraite, prestations familiales et RSA, congés payés et allocations chômage...) : http://www.securite-sociale.fr/comm...,
  2. la liste des organismes qui ont accès aux données du RNCPS : http://www.securite-sociale.fr/comm....

La loi Warsmann ...

La proposition de loi Warsmann est devenue la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.

Parmi d’autres « dispositions tendant à améliorer la qualité des normes
et des relations des citoyens avec les administrations
 », l’article 4 (ex-article 2 de la proposition de loi) ouvre la possibilité d’organiser par décret l’interconnexion de tous les fichiers de toutes les administrations.

Cet article ajoute « au début du chapitre Ier du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations [...] un article 16 A ainsi rédigé :

« Art. 16 A. – I. – Les autorités administratives [5] échangent entre elles toutes informations ou données strictement nécessaires pour traiter les demandes présentées par un usager.

« Une autorité administrative chargée d’instruire une demande présentée par un usager fait connaître à celui-ci les informations ou données qui sont nécessaires à l’instruction de sa demande et celles qu’elle se procure directement auprès d’autres autorités administratives françaises, dont elles émanent ou qui les détiennent en vertu de leur mission.

« L’usager est informé du droit d’accès et de rectification dont il dispose sur ces informations ou données.

« Les échanges d’informations ou de données entre autorités administratives s’effectuent selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui fixe les domaines et les procédures concernés par les échanges d’informations ou de données, la liste des autorités administratives auprès desquelles la demande de communication s’effectue en fonction du type d’informations ou de données et les critères de sécurité et de confidentialité nécessaires pour garantir la qualité et la fiabilité des échanges. Ce décret précise également les informations ou données qui, en raison de leur nature, notamment parce qu’elles touchent au secret médical et au secret de la défense nationale, ne peuvent faire l’objet de cette communication directe.

« II. – Un usager présentant une demande dans le cadre d’une procédure entrant dans le champ du dernier alinéa du I ne peut être tenu de produire des informations ou données qu’il a déjà produites auprès de la même autorité ou d’une autre autorité administrative participant au même système d’échanges de données. Il informe par tout moyen l’autorité administrative du lieu et de la période de la première production du document. Le délai de conservation des informations et données applicable à chaque système d’échange est fixé par décret en Conseil d’État.

« III. – Lorsque les informations ou données nécessaires pour traiter la demande ne peuvent être obtenues directement auprès d’une autre autorité administrative dans les conditions prévues aux I ou II, l’usager les communique à l’autorité administrative. »

On aura compris que l’intention affichée de simplifier les relations des citoyens avec les administrations et d’améliorer leur qualité dissimule en fait la volonté de faciliter les échanges de données entre administrations.

Notes

[1Art. L. 114-12-1 du Code de la sécurité sociale : http://www.legifrance.gouv.fr/affic....

[3Le décret n° 2009-1577 du 16 décembre 2009 relatif au RNCPS, http://www.legifrance.gouv.fr/affic...,
l’avis correspondant de la CNIL : http://www.legifrance.gouv.fr/affic....

[4L’arrêté du 21 mars 2011 : http://www.legifrance.gouv.fr/affic....

[5La loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations donne la définition des "autorités administratives" :

"Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi
les administrations de l’Etat,
les collectivités territoriales,
les établissements publics à caractère administratif,
les organismes de sécurité sociale
et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif."


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