La Garde : les nouveaux professionnels de la haine


article de la rubrique Toulon, le Var > villes du Var
date de publication : mercredi 12 janvier 2005
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Un "colloque", une exposition ...

[première mise en ligne le 17 décembre 2004
dernière mise à jour le 12 janvier 2005.]


La Garde, paisible cité de l’agglomération toulonnaise, a longtemps été réputée pour la priorité dont y bénéficiait la culture.
Tout naturellement, en novembre 1996, c’est La Garde qui accueillit la Fête du livre de Toulon après que Jean-Marie Le Chevallier eut tenté d’imposer ses choix idéologiques aux libraires [1].

Pendant plus de quarante ans, la ville de La Garde a été gérée par une municipalité de gauche conduite par un maire communiste : tout d’abord Maurice Delplace, de 1958 à 1997, puis Yvon Robert de 1997 à 2001.

Les élections municipales de 2001 voient la victoire de Jean-Louis Masson [2] à la tête d’une liste UMP-UDF.
Philippe Granarolo, adjoint aux sports de Jean-Louis Masson, a immortalisé l’événement dans un ouvrage au sous-titre évocateur Une citadelle communiste qui s’effondre [3].

Le 28 mars 2004, nouveau succès pour Jean-Louis Masson qui emporte l’élection cantonale, avec 52,3% des voix au second tour, devant Yvon Robert, conseiller général sortant.

Politiquement, Jean-Louis Masson se situe dans la “droite dure”, tantôt à l’UMP (le conseiller général), tantôt à l’UDF (il a participé à la campagne de François Bayrou pour les élections présidentielles du printemps 2002 [4]), tantôt ailleurs (il est catalogué divers droite lors des municipales de 2001).

Le 14 mai 2002, il reçoit le Comte de Paris, au golf de Valgarde. Mais ses activités ne sont pas toutes aussi pacifiques ; on se rappelle la plainte qu’il a déposée fin mars 2004 contre quelques facétieux collégiens gardéens.

Ces derniers temps, Jean-Louis Masson semble atteint d’une forte poussée de fièvre anticommuniste obsidionale.
Prenant prétexte du quinzième anniversaire de la chute du mur de Berlin, la municipalité de La Garde a organisé, du 10 au 14 novembre 2004, une série de manifestations sur le thème "NON aux totalitarismes". De nazisme il ne fut pas question, car il s’agissait en réalité d’un festival de l’anticommunisme.

Jean-Louis Masson par Dominique Hasselmann

“Historique” ?

Les 13 et 14 novembre, La Garde a abrité un colloque national
avec la participation « d’illustres historiens, économistes, philosophes (...), du rédacteur en chef adjoint du Figaro Magazine », et de Pascal Gauchon, un ancien dirigeant du Parti des forces nouvelles (PFN). [5]

Les participants ont pu y entendre les fines analyses de Vladimir Volkoff :
« le péril international de la pensée communiste n’a pas totalement disparu ».
 [6]

Le panel des intervenants était équilibré puisque à côté de Pascal Gauchon qui s’était égaré à l’extrême droite - erreur de jeunesse ? - se trouvait un ex-membre d’un mouvement d’extrême-gauche [7]

Pour l’occasion, Philippe Granarolo a conçu une exposition sur le thème "L’autre barbarie du vingtième siècle : LE COMMUNISME". Deux panneaux bruns retiennent tout particulièrement l’attention :

- l’un, intitulé "Professionnels de la Haine - La haine comme raison de vivre", dénonce de façon haineuse Louis Aragon, Jean-Paul Sartre [8] et Simone de Beauvoir,

- l’autre s’en prend à Francis Jeanson et au manifeste des 121 [9],

- tous les panneaux exposés.

L’exposition n’ayant peut-être pas eu le succès attendu, la municipalité a décidé de l’installer dans le hall d’accès à la médiathèque, jusqu’à la fin de l’année. Mais, Jean-Louis Masson l’a bien dit , “ce n’est pas de la propagande”.

Ensemble

Des enseignants du collège Jean-Yves Cousteau ont protesté ; le conseil d’administration du collège a décidé de ne plus envoyer d’élève à la médiathèque tant que les panneaux contestés resteront en place. Ils ont appelé à un rassemblement devant la médiathèque Aragon, mercredi 15 décembre 2004 à 18 heures, pour une lecture de poèmes d’Aragon et de textes de Sartre, afin que « revienne le temps des cerises ... »

250 personnes ont répondu à l’appel.

Devant la médiathèque Louis Aragon de La Garde, mercredi 15 décembre 2004

Pour donner un nouvel élan politique et promouvoir les valeurs républicaines de gauche, une association, indépendante des partis politiques, s’est créée à La Garde : "Agir ensemble pour La Garde demain".

Association ENSEMBLE
72, impasse des Alpilles
83130 LA GARDE

P.-S.

mise à jour du 12 janvier 2005 :

Dans une récente interview (publiée dans Var-Matin le 7 janvier 2004), Jean-Louis Masson, tout en présentant au journaliste sa carte de membre de la LDH, a déclaré être "particulièrement sensible à la question des droits de l’homme".

Cherchez l’erreur !

Notes

[1Le maire frontiste de Toulon avait jugé "non opportun" l’hommage qui devait être rendu à Marek Halter, préférant honorer Maître Trémollet de Villers, avocat de Paul Touvier.

[2Jean-Louis Masson, né le 5 février 1954 à La Garde, est un ancien colonel de Gendarmerie.

[3En campagne à la Garde de Philippe Granarolo, éd. les Presses du Midi.

[4Chargé du secteur " Justice et sécurité ", il était parvenu à la conclusion "que la meilleure solution serait de créer un ministère de la sécurité".

[5Cette manifestation était soutenue par le Conseil général du Var.

[6Après la déclaration de M. Volkoff « j’ai été tout à fait partisan du jeu que les Américains ont joué au Vietnam ; il fallait arrêter le communisme, tant pis pour les Vietnamiens », on peut se poser la question “tant pis pour les Gardéens ?”

[7Renseignement pris, son engagement marxiste-léniniste a pris fin il y a 34 ans (Var Matin des 19 et 26 novembre). Depuis lors sa pensée a gagné en profondeur : il a déclaré au cours du colloque que « le marxisme pourrait être une punition divine des peuples pour n’avoir pas respecté l’année jubilaire ».

[8Jean-Paul Sartre avait l’habitude d’être injurié : lors du congrès de la Paix à Vienne en 1952, un certain Fadeev l’avait traité de " hyène dactylographe ".

[9Quarante ans plus tard, Ahmed Ben Bella devait écrire dans Le Monde Diplomatique de septembre 2000 :
"L’appel des 121 a retenti comme un coup de tonnerre pour nous, dirigeants de la révolution algérienne, comme pour beaucoup d’Algériens. Cette prise de position nous a prémunis, il faut le reconnaître, contre des sentiments pas très beaux, contre la haine."

Le texte du manifeste des 121.


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