Après avoir été simultanément ministre & maire & président d’une communauté d’agglomération, Hubert Falco n’est plus que sénateur & maire de Toulon & président de la communauté d’agglomération TPM [1].
Sic transit ...
Secrétaire d’État aux personnes âgées dans le gouvernement Raffarin 2 (17 juin 2002), puis ministre délégué aux personnes âgées dans le gouvernement Raffarin 3 (31 mars 2004), Hubert Falco a longtemps bénéficié, en ce qui concerne la règle du cumul [2], d’une tolérance gagnée par sa victoire sur le FN aux municipales de 2001.
Dans le gouvernement Raffarin 3, la règle devait s’appliquer à tous, sans exception. Matignon se voulait aussi intransigeant que certains ministres étaient peu pressés d’obtempérer : le directeur de cabinet de Jean-Pierre Raffarin leur a adressé une lettre leur enjoignant de régulariser leur situation avant le 15 juillet. Hubert Falco, invoquant d’autres urgences, semblait n’avoir aucune envie de démissionner.
« S’il faut se mettre en conformité, je me mettrai en conformité. Je ne serai pas le mauvais élève, ni celui qui ira à l’encontre des décisions du Premier ministre. [...] Ce n’est pas ma principale préoccupation aujourd’hui, ni ma priorité. Je dois avant tout faire adopter la loi solidarité et autonomie, mettre en place un plan de veille et d’alerte et préparer l’été. Il est hors de question que nous revivions en août 2004 ce que nous avons vécu en août 2003 [3] L’urgence est là. Si, en septembre, on exige que je prenne une décision pour ma mairie, je le ferai. Mais je pense que ce serait une aberration. » [4]
« Le ministre fera ce qu’on lui dira de faire », promet depuis des semaines son entourage. Mais lorsqu’on téléphone au cabinet du maire à Toulon, la réponse fuse : « Il a toujours dit qu’il n’abandonnerait pas ! » [5]
Voilà plus de deux ans qu’il reste à la tête de la mairie de Toulon. Au départ, il avait obtenu une dérogation de la part du chef de l’Etat, faisant valoir qu’ayant pris sa ville au Front national il ne pouvait la quitter à peine élu. Ce traitement de faveur a pris fin lors de la formation du Raffarin 3. Le Premier ministre lui a demandé de choisir. [...] Mais Falco persiste à faire la sourde oreille. Il attend qu’« on lui signifie expressément qu’il doit démissionner de son mandat de maire », explique son entourage. Le ministre, qui n’a pas l’intention de lâcher sa mairie, prévient qu’il quittera le gouvernement. Mais le plus tard possible : il aimerait réussir à tenir jusqu’aux sénatoriales de septembre, auxquelles il compte se présenter. [6]
Résumons-nous : au début de l’été 2004, Hubert Falco est ministre délégué aux Personnes âgées, maire de Toulon, et président de la communauté d’agglomération Toulon-Provence-Méditerranée.
Mais la rumeur finit par gagner Toulon : le ministre ne passerait pas l’été !
Candidat aux sénatoriales, Hubert Falco pourrait quitter le gouvernement avant la fin de l’été
[Var-Matin, 9 juillet 2004]
Après deux ans passés au gouvernement, le maire de Toulon, Hubert Falco, pourrait prochainement mettre entre parenthèses son expérience ministérielle et rejoindre les bords de la rade.
C’est en tout cas l’hypothèse qu’accrédite tout un faisceau d’éléments : la règle du non cumul entre un ministère et un exécutif local rappelé au matin de Raffarin III, la candidature annoncée d’Hubert Falco aux sénatoriales ou encore une récente confession devant les employés communaux toulonnais sur son probable retour à temps plein en mairie.
N’était une décision anticipée, qui « appartient au Premier ministre » rappelle son entourage, le retour d’Hubert Falco interviendrait en septembre. En fait, au moment de son élection au palais du Luxembourg, puisque la loi interdit le cumul de fonctions parlementaires et gouvernementales.
En septembre 2004, le Var désigne ses quatre sénateurs [7]. Et advint ce qui devait arriver : le 16 octobre 2004, Hubert Falco annonce son départ imminent du gouvernement dans une interview exclusive au quotidien Var-Matin.
"Personne ne voulait me voir partir"
La décision de quitter le gouvernement, où il a bénéficié d’une dérogation à la règle du non cumul, entre un exécutif local et un ministère, a été « prise avec beaucoup de regret », poursuit Hubert Falco dans Var-Matin. « Quand vous êtes assis à la table de la République, à vous occuper des affaires de votre pays, c’est difficile de se dire : “voilà, ça va s’arrêter”. »
« A l’Elysée et au gouvernement, personne ne voulait me voir partir, j’avais des assurances sur mon avenir, une place m’aurait été réservée lors du prochain remaniement, déclare-t-il, n’excluant pas de revenir peut-être un jour. »
« Mais j’ai pris un engagement moral avec les Toulonnais, pas question que je les trahisse. Cette ville est sinistrée, son redressement prendra du temps », ajoute Hubert Falco.
Le 27 octobre 2004, Hubert Falco, ministre délégué aux Personnes
âgées, assistait à son dernier Conseil des ministres, un moment qu’il a qualifié d’“émouvant” dans la cour de l’Elysée.
« J’ai fait le choix de ma ville », a expliqué le sénateur-maire de Toulon, contraint de renoncer à son portefeuille ministériel pour conserver sa mairie et son siège de sénateur. « Il fallait aujourd’hui que je fasse un choix, parce que la dérogation qui m’a été accordée ne l’était plus et la règle s’appliquait à tous ».
Cet ultime Conseil des ministres était « émouvant pour moi », a expliqué Hubert Falco. Le président Jacques Chirac « m’a écrit des mots très affectueux que je garde pour moi », a-t-il ajouté.
Hubert Falco a été élu sénateur du Var le 26 septembre 2004. La loi interdit le cumul entre le mandat de sénateur et la fonction de membre du gouvernement. Il disposait d’un délai d’un mois pour choisir entre le gouvernement et son mandat parlementaire.[AP - mercredi 27 octobre 2004]
"Il est important que les ministres aient les pieds sur terre"
Propos recueillis par Vanessa SCHNEIDER, [Libération, le 7 juin 2005.]
Hubert Falco, ancien secrétaire d’Etat aux Personnes âgées, avait été contraint de quitter le gouvernement Raffarin, après avoir obtenu une longue dérogation, pour garder la mairie de Toulon.
- L’interdiction du cumul entre portefeuille ministériel et exécutif local est remise en cause. Qu’en pensez-vous ?
Cette règle n’est pas une bonne chose. On ne peut pas dire qu’il faut écouter le terrain et demander à ceux qui sont sur le terrain de le quitter. Lorsque je redescendais à Toulon le week-end, j’entendais les Français. Il est important que les ministres aient les pieds sur terre. Il faut être confronté au quotidien, rester en contact avec ses électeurs pour comprendre ce qui se passe et faire remonter les vrais messages à Paris. Ce n’est pas en enfermant les membres du gouvernement dans des tours d’ivoire qu’on résoudra le décalage entre le peuple et les élites, au contraire. On est en train de fabriquer une élite complètement coupée du terrain. Les grands responsables politiques de droite ou de gauche comme Pierre Mauroy ont toujours gardé un ancrage local. Je pense qu’il faut avoir le courage de revenir sur cette règle. Ce n’est pas parce que Lionel Jospin a dit que c’était une bonne idée qu’il nous faut persister dans l’erreur. Je comprends en tout cas que les nouveaux membres du gouvernement veuillent garder leurs exécutifs.
- Vous avez dû quitter le gouvernement Raffarin après avoir cumulé pendant deux ans. D’autres, plus chanceux que vous, ont pu rester jusqu’au bout maires et ministres. Cela vous a-t-il contrarié ?
Un beau jour, Jean-Pierre Raffarin m’a vraiment demandé de me mettre en conformité. J’ai fait mon choix : je ne voulais pas quitter Toulon. Ensuite je me suis aperçu qu’on n’avait pas demandé la même chose à d’autres, Léon Bertrand ou Marie-José Roig notamment. J’ai eu un peu de rancoeur car je me plaisais et je me sentais utile dans mon ministère. Même si je suis contre, si une règle existe, soit elle s’applique à tout le monde, soit elle ne s’applique pas.
Dès le lendemain de son départ du gouvernement, Hubert Falco, un peu triste, reprenait le collier en présidant le conseil municipal du 29 octobre 2004.
Et si vous voulez, voici des compléments sur la carrière d’Hubert Falco...
[1] Cet article reprend les contenus de quatre brèves publiées à l’époque des faits.
[2] C’est Jacques Chirac qui, au lendemain de la présidentielle de 2002, a fixé la règle : on ne peut pas être à la fois ministre et maire, ni ministre et président de conseil général, ni ministre et président de conseil régional. A l’exception de Hubert Falco, les membres des gouvernements Raffarin 1 et 2 se sont pliés à l’oukase présidentiel.
[3] Allusion à la canicule.
[4] Le Point, n°1655, 3 juin 2004
[5] Le Monde, 8 juillet 2004.
[6] Libération, sous le titre « Hubert Falco, ministre délégué aux Personnes âgées, est devenu un pro en matière [de cumul] », 9 juillet 2004.
[7] Les quatre élus sont : Hubert Falco (UMP), Pierre-Yves Collombat (PS), Christiane Hummel (UMP), François Trucy ("UMP" sortant).