Cesare Battisti : dire la vérité, respecter les droits


article communiqué de la LDH  de la rubrique justice - police > justice
date de publication : lundi 19 mars 2007
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Tout homme, quand il est accusé, a droit à un procès en sa présence.


COMMUNIQUÉ LDH

Paris, le 19 mars 2007

Cesare Battisti : dire la vérité, respecter les droits

Cesare Battisti a été arrêté au Brésil. Condamné à perpétuité sans avoir été entendu par la justice italienne, il finira ses jours en prison, s’il est extradé, sans avoir pu se défendre et faire valoir ses droits.

Par la voix du Président Mitterrand, la France avait donné sa parole que ceux qui avaient rompu avec la violence ne seraient pas extradés. Cesare Battisti a cessé toute action illégale depuis vingt-neuf ans et a toujours vécu paisiblement dans notre pays. Mais la France de Messieurs Sarkozy et Perben a renié sa parole, elle a voulu livrer ceux qu’elle avait accueillis.

Le ministre de l’Intérieur, qui vient de faire préfacer son dernier livre par le leader de l’extrême droite italienne, prétend aujourd’hui que le gouvernement français n’aurait fait qu’appliquer les règles d’Interpol en donnant au Brésil les informations nécessaires. La vérité, c’est que Cesare Battisti, qui n’a jamais menacé l’ordre public français, a été arrêté à des milliers de kilomètres de notre pays par des policiers français qui lui ont tendu un piège avec leurs collègues brésiliens dans une rue de Rio de Janeiro. C’est bien plus que ce qu’exigent les règles d’Interpol. Le ministre de l’Intérieur le sait. Pourquoi le candidat gouvernemental ne le dit-il pas ?

Quant à la justice, la LDH rappelle que Cesare Battisti n’a été condamné – sans aucune preuve matérielle ‑ que sur la base de deux témoignages de « repentis », qui ont acheté par leurs accusations d’importantes remises de peine pour les crimes qu’ils avaient commis. Et cela suffit à un gouvernement français pour aider à envoyer cet homme finir sa vie derrière les barreaux « sans autre forme de procès » ? La Cour européenne des droits de l’Homme, elle, a déjà répondu que refuser un vrai procès à un condamné par contumace, c’est violer la Convention européenne des droits de l’Homme.

Messieurs Perben en 2004 et Sarkozy en 2007 ont fait cela en notre nom : trahir la parole donnée, refuser le droit au procès équitable en violation du droit européen des droits de l’Homme. La LDH milite pour une autre image du politique. Elle appelle les citoyens à exiger demain que les gouvernants s’attachent à dire la vérité et à respecter les droits.

« Le gouvernement français n’a fait aucun cas des droits de Battisti »

par Michel Tubiana, avocat et
président d’honneur de la Ligue des droits de l’Homme
  • Que pensez-vous de l’attitude de la France dans cette arrestation ?

La police française a fait son travail, elle recherchait un homme et a tout fait pour le trouver. Quant au gouvernement, il est cohérent avec lui-même : il a toujours piétiné la doctrine Mitterrand, il n’a fait aucun cas des droits de Cesare Battisti, ni de la manière dont il a été jugé en Italie.

  • Etes vous optimiste sur l’issue de cette arrestation ?

Je ne suis ni pessimiste, ni optimiste : je sais juste qu’il ne faut pas que Battisti soit extradé vers l’Italie et sa fuite au Brésil n’y change rien.

  • Est-ce qu’il doit être rejugé ?

Il devrait être rejugé en Italie, car les conditions dans lesquelles il a été jugé là-bas dans les années 70 ne sont pas acceptables : la décision a été rendue par contumace en première instance sur la base de témoignages de repentis. Il n’a pas pu se défendre ni faire appel. Malheureusement, il ne sera jamais rejugé là-bas, et c’est pourquoi nous avons tellement milité contre son extradition.

[Propos recueillis pour le Nouvel Observateur par Anne-Gaëlle Besse (le dimanche 18 mars 2007)]

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Les soutiens de Battisti dénoncent une "arrestation électoraliste"

LEMONDE.FR avec AFP

L’écrivain Gilles Perrault, qui s’était mobilisé en 2004 contre l’extradition de Cesare Battisti, a qualifié dimanche 18 mars, d’"électorale et même électoraliste" l’arrestation au Brésil de l’ex-activiste italien, à un mois de l’élection présidentielle en France. "C’est une arrestation électorale et même électoraliste. Un triste événement, alors que la police a tant de tâches plus urgentes que d’aller chercher quelqu’un très loin pour une très vieille histoire", a-t-il déclaréà l’AFP. "C’est une arrestation sarkozienne, tout à fait dans la manière de notre ministre de l’intérieur et candidat. C’est le ministre de l’immigration et de l’identité nationale qui a agi", a-t-il ajouté.

Eric Turcon, avocat de Cesare Battisti, est allé dans le même sens. Dans un entretien au site Internet du Nouvel Observateur, il raconte quil a appris l’arrestation "par la presse". "Des policiers français étaient présents lors de son arrestation, ce qui prouve une collaboration de la police et du ministère de l’Intérieur français", déclare-t-il. Il qualifie la date de l’opération de police d’"étonnante" : "d’autant plus qu’un article du Canard enchaîné évoquait, il y a quinze jours, une relance de l’enquête. Comment se fait-il que l’arrestation survienne aujourd’hui ? C’est très curieux."

Irène Terrel, avocate qui assurait la défense de Battisti dès 1991, interrogée sur France Info, s’est dite moins étonnée par l’arrestation elle-même que par "le moment où cette arrestation intervient : en pleine campagne présidentielle".

François Bayrou.
Le candidat de l’UDF a estimé, à propos du cas de Cesare Battisti, que "Le plus important, c’est le droit de tout homme, quand il est accusé, à avoir un procès en sa présence". "Quelle que soit l’horreur que m’inspire cette période, l’horreur que m’inspirent ces actes, dont je ne sais pas s’il est coupable ou pas, notre droit français, européen, occidental, c’est qu’un homme a droit à un procès en sa présence", a déclaré M. Bayrou à la presse au terme de sa visite au salon de l’Etudiant à Paris.


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