Bruno Gollnisch reconnaît devant ses juges l’existence des chambres à gaz


article de la rubrique extrême droite
date de publication : septembre 2007
version imprimable : imprimer


Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné, jeudi 18 janvier, Bruno Gollnisch à trois mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende, pour « contestation de l’existence de crime contre l’humanité », pour des propos qu’il avait tenus, le 11 octobre 2004, à Lyon lors d’une conférence de presse.

Au cours de l’audience du 7 novembre 2006, Me Alain Jakubowicz, avocat de la Licra, est parvenu à faire reconnaître par le responsable frontiste que « la Shoah est un crime contre l’humanité incontestable ».

[Mise en ligne le 22 nov. 06, mise à jour en sept. 07]

La sixième chambre correctionnelle de Lyon devait le juger pour des propos ambigus tenus sur les chambres à gaz le 11 octobre 2004 lors d’une conférence de presse à Lyon. Il avait ainsi déclaré : "Il n’y a aucun historien sérieux qui adhère intégralement aux conclusions du procès de Nuremberg, je pense que sur le drame concentrationnaire la discussion doit rester libre. L’existence des chambres à gaz, c’est aux historiens d’en discuter".
 [1]

M. Gollnisch reconnaît devant ses juges l’existence des chambres à gaz

par Richard Schittly, Le Monde daté du 9 novembre 2006

Un avocat de partie civile qui se désiste pour obtenir une déclaration d’un prévenu face au tribunal correctionnel. La scène s’est produite mardi soir, 7 novembre, à Lyon. A la barre, Bruno Gollnisch, 56 ans, député européen et conseiller régional Rhône-Alpes (Front national), comparaît pour "contestation de l’existence de crimes contre l’humanité" à la suite de propos tenus lors d’une conférence de presse, le 11 octobre 2004.

Selon les formules rapportées à l’époque par plusieurs journalistes, cités comme témoins au procès, M. Gollnisch avait notamment déclaré : "L’existence des chambres à gaz, c’est aux historiens d’en discuter." Ou encore : "Moi, je ne nie pas les chambres à gaz homicides mais la discussion doit rester libre."

Durant des heures, l’élu frontiste réfute tout négationnisme. Il estime que ses propos ont été "tronqués" ou "mal retranscrits par les journalistes". Tout en continuant à entretenir l’ambiguïté d’un discours bien rodé. "Je reconnais ces drames, ces millions de morts", assure-t-il, avant de préciser : "Mais sur les modalités particulières, je ne suis pas un spécialiste."

A 18 heures, Me Alain Jakubowicz, avocat de la Licra et de l’Union des étudiants juifs de France, ne se satisfait pas des réponses à double détente du prévenu qui renvoie sans cesse la réalité de la Shoah aux études historiques ou aux archives du procès de Nuremberg, sans jamais livrer le fond de sa pensée. Le dialogue tourne au duel, entre deux Lyonnais qui s’affrontent depuis des années.

DILEMME

Alain Jakubowicz demande solennellement au "responsable politique national" de se prononcer clairement face "à un tribunal de la République". Soudainement, profitant d’un silence hésitant, l’avocat propose de quitter le banc des parties civiles contre une déclaration explicite du numéro deux du FN. Le président du tribunal, Fernand Schir, fait noter cette tractation inédite : "Me Jakubowicz propose de se désister si M. Gollnisch reconnaît que l’extermination organisée des juifs d’Europe par le régime nazi pendant la seconde guerre mondiale constitue un crime contre l’humanité non contestable perpétré notamment par l’utilisation des chambres à gaz."

Surpris, Bruno Gollnisch semble soupeser un dilemme entre positionnement politique et intérêt judiciaire. Encore éluder, camper le personnage qui joue à l’extrême sur les mots, incarner une frange dure de son mouvement ? Ou lâcher du lest face à une accusation juridiquement très discutée ? Le prévenu répond : "Tout à fait, monsieur le président." Le magistrat veut s’assurer qu’il reconnaît bien la déclaration. M. Gollnisch répète : "Ma réponse est affirmative."

Dès l’interruption de séance qui suit, Alain Jakubowicz estime avoir obtenu "une victoire" dans le procès : "Pour la première fois les Français vont entendre un haut responsable du Front national admettre que la Shoah est un crime contre l’humanité incontestable." "Je ne vois là rien de nouveau, je suis étonné qu’il faille deux ans pour enfoncer des portes ouvertes", déclare Bruno Gollnisch au seuil du prétoire.

Richard Schittly

____________________________

Le procureur ne requiert pas de prison contre Bruno Gollnisch

LEMONDE.FR avec AFP | 09.11.06 | 09h55

Alors que le numéro 2 du Front national encourt jusqu’à un an de prison ferme pour "contestation de crime contre l’humanité", le procureur de la République a requis, mercredi 8 novembre, une peine de 10 000 euros d’amende. Mardi, devant le tribunal correctionnel de Lyon, Bruno Gollnisch a reconnu explicitement l’existence des chambres à gaz, ce qui a joué en sa faveur. Son avocat, Me Wallerand de Saint-Just, a plaidé la relaxe.

"Je crois que M. Gollnisch a passé la ligne jaune : tout en jonglant sur le terrain nauséabond [de l’antisémitisme], il a commis la faute, et il a dérapé", a affirmé le procureur. "On retrouve bien là les vieux démons de la droite antisémite française", a-t-il ajouté, évoquant la "mauvaise foi caractérisée" du prévenu. Le magistrat a également requis la publication du jugement "dans les médias des journalistes présents lors de la conférence de presse" d’octobre 2004, à l’origine des poursuites contre l’élu frontiste.

"MA RÉPONSE EST AFFIRMATIVE"

Toutefois, le procureur de la République a également souhaité que le"revirement" de M. Gollnisch à la barre, lors de la première journée d’audience, soit pris en compte. Mardi, pressé par l’avocat de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) et de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) de reconnaître la Shoah comme un "crime contre l’humanité incontestable", le délégué général du FN a lancé :"Ma réponse est affirmative." Me Jakubowicz, estimant avoir "gagné ce procès", s’est alors retiré de la procédure.

Mercredi, les avocats des autres parties civiles ont insisté, dans leurs plaidoieries, sur les liens historiques entre M. Gollnisch et le négationnisme. "Les cadres du FN, MM. Le Pen et Gollnisch au premier rang, ont régulièrement défendu des révisionnistes", a affirmé Me Bertrand Sayn, avocat du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP).

"DÉSINFORMATION"

Le numéro 2 du FN est poursuivi pour "délit de contestation de l’existence de crime contre l’humanité par paroles", pour des propos tenus le 11 octobre 2004. Lors d’une conférence de presse à Lyon, il avait déclaré"ne pas remettre en cause les déportations" ni "les millions de morts" des camps nazis, avant d’ajouter : "Quant à savoir la façon dont les gens sont morts, ce débat doit avoir lieu." Interrogé plus spécifiquement sur les chambres à gaz, il avait répondu : "Je ne nie pas les chambres à gaz homicides. Mais je ne suis pas spécialiste de cette question et je pense qu’il faut laisser les historiens en discuter. Et cette discussion devrait être libre."

Devant le tribunal, M. Gollnisch a rejeté toute culpabilité et dénoncé un procès "scandaleux". Son avocat a déploré la "désinformation" à partir de laquelle son client "est devenu un chien à abattre". "Ce qui compte, ce n’est pas la vérité nue mais la vérité médiatique", a-t-il estimé. Le jugement a été mis en délibéré au 18 janvier.

Bruno Gollnisch (FN) condamné pour ses « insinuations » sur les chambres à gaz

[Le Monde du 20 janvier 2007]

Le tribunal correctionnel de Lyon a condamné, jeudi 18 janvier, Bruno Gollnisch à trois mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende, pour « contestation de l’existence de crime contre l’humanité », pour des propos qu’il avait tenus, le 11 octobre 2004, à Lyon lors d’une conférence de presse. Il devra en outre payer 55 000 euros de dommages et intérêts aux parties civiles.

Le délégué général du FN avait notamment demandé que « la discussion soit libre » sur « le drame concentrationnaire » et sur « l’existence des chambres à gaz ». Cette décision intervient après deux ans de procédure et plusieurs renvois, liés à la tentative du député européen de faire jouer son immunité parlementaire.

« PROCÉDÉ DE DISSIMULATION »

Le jugement va au-delà des réquisitions du procureur, qui avait réclamé, le 8 novembre 2006, une simple amende de 10 000 euros. Les attendus précisent que la démarche de M. Gollnisch est « plus feutrée et subtile » que certains négationnistes, mais poursuit « par la voie de l’insinua tion les mêmes fins de contestation de crimes contre l’humanité ». Il estime que les précautions oratoires de M. Gollnisch, qui avait pris soin de préciser que lui-même ne « niait » pas les chambres à gaz avant de demander que les historiens puissent en discuter librement, relèvent d’un « procédé de dissimulation ». « Il s’agit là, écrit le magistrat, du procédé type de l’insinuation du doute, ce poison de l’esprit. Ce que les négationnistes avérés et patentés comme Faurisson ou Garaudy écrivent ou proclament ouvertement, Bruno Gollnisch l’insinue. »

M. Gollnisch a annoncé qu’il allait faire appel du jugement, qualifié de « viol catégorique de la liberté d’expression ». Professeur de droit, il a été exclu, pour cinq ans de l’université Lyon-III.

Par ailleurs, le tribunal a débouté M. Gollnisch, qui poursuivait pour « diffamation publique envers un particulier » le président socialiste du conseil régional Jean-Jack Queyranne et les présidents de groupe de cette assemblée qui avaient, à la suite de ses déclarations sur les chambres à gaz, lu un texte condamnant vivement ces propos.

Notes

[1Après la levée, le 13 décembre 2005, de l’immunité parlementaire du député européen, l’affaire Gollnisch n’a été qu’une succession de rebondissements.

La complexité de l’affaire réside dans le fait que Bruno Gollnisch est poursuivi pour les mêmes faits dans deux procédures différentes. La poursuite jugée mardi résulte d’une citation directe du parquet. L’autre, initiée par l’instance nationale du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), avait fait l’objet le 14 mars d’un
non-lieu. Ce qui avait à l’époque remis en cause l’ouverture d’un procès.

Mais, le 13 juin, la chambre de l’instruction a rendu un arrêt infirmant ce non-lieu ouvrant ainsi à nouveau la voie à la tenue d’un procès. Un complément d’information visant à la mise en examen de Bruno Gollnisch dans le cadre de cette plainte du MRAP n’a cependant toujours pas été rendu.


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP