une famille n’est pas le résultat de tests ADN


article communiqué de la FIDH  de la rubrique Big Brother > tests ADN pour contrôler l’immigration
date de publication : samedi 15 septembre 2007
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Imposer aux étrangers, un test ADN, c’est admettre que les étrangers et leurs familles n’ont pas les mêmes droits fondamentaux que les Français. Venant après de multiples mesures restrictives et vexatoires, après les propos insultants tenus à Dakar par le président de la République française, l’amendement de la majorité des députés français est ressenti comme une injure faite à notre identité humaine.


Voir en ligne : les étrangers sont-ils des êtres humains de seconde zone ?

Communiqué commun FIDH/LDH

Avec les organisations membres de la FIDH signataires ci-dessous

Une famille, ce n’est pas le résultat de tests ADN

Paris, le 14 septembre 2007 - Le Parlement français examine un nouveau projet de loi destinée à restreindre encore une fois le regroupement familial. Après l’obligation de l’apprentissage du français, voici que des députés prétendent « proposer » des tests ADN pour s’assurer de la filiation des enfants. Chacun sait qu’en fait, ces tests seront imposés.

La volonté de pallier l’absence de documents d’état civil ou la fraude travestit la réalité quotidienne que les étrangers candidats au regroupement familial vivent. Dans les faits, les consulats vérifient quotidiennement les documents qui leurs sont produits, n’hésitent pas à les remettre en cause, à en demander de supplémentaires voire à prendre prétexte d’une perte pour les solliciter à nouveau. C’est ainsi que certaines personnes attendent depuis des années des visas qu’ils sont en droit d’obtenir sous couvert d’un arbitraire de plus en plus systématique.

Imposer aux étrangers, ayant le droit de s’établir en France pour tout simplement vivre une vie de famille normale, un test ADN, c’est non seulement renforcer l’arbitraire (et le coût déjà exorbitant des formalités) mais c’est admettre que les étrangers et leurs familles n’ont pas les mêmes droits fondamentaux que les Français.

La France interdit, en effet, hors décision de justice ou besoins médicaux, de procéder à de tels tests tout simplement parce qu’elle considère, à juste titre, que la définition de la famille ne se borne pas au lien biologique.

Réduire la filiation au seul lien biologique, c’est non seulement appliquer un traitement discriminatoire aux étrangers mais c’est aussi nier qu’une famille, ce sont des liens d’une autre nature que ceux du sang.

En décidant d’imposer un tel test aux étrangers, le législateur français nie l’histoire personnelle de chacun.

C’est l’humanité d’hommes, de femmes et d’enfants qui est déniée en la réduisant à une chaîne de molécules.

Nous voulons affirmer solennellement que, venant après de multiples mesures restrictives et vexatoires, après les propos insultants tenus à Dakar par le président de la République française, nous ressentons cet amendement de la majorité des députés français comme une injure faite à notre identité humaine.

Nous n’acceptons pas que la France institue ainsi une xénophobie d’Etat.

Organisations membres de la FIDH signataires (liste non exhaustive)
Organisation Marocaine des droits humains (OMDH)
Ligue Tunisienne des droits de l’Homme (LTDH)
Association Nigérienne des droits de l’Homme (Niger)
Association Tchadienne pour la Promotion et la Défense des droits de l’Homme (Tchad)
Ligue Tchadienne des droits de l’Homme (Tchad)
Association Malienne des droits de l’Homme (Mali)
Union Interafricaine des droits de l’Homme
Association Mauritanienne des droits de l’Homme (mauritanie)
Mouvement Ivoirien des droits de l’Homme (Côte d’ivoire)
Ligue Ivoirienne de défense des droits de l’Homme (Côte d’ivoire)
Organisation Guinéenne des droits de l’Homme (Guinée)
Organisation Nationale des droits de l’Homme (Sénégal)
Rassemblement Africain pour la défense des droits de l’Homme (Sénégal)
Ligue des Electeur (RDC)
Groupe Lotus (RDC)
ASADHO (RDC)
Maison des droits de l’Homme (Cameroun)

Tests ADN pour contrôler « les fraudes »

par Nadjia Bouzeghrane, El Watan, le 15 septembre 2007

Dernière trouvaille pour contrôler encore plus l’immigration et faire le tri parmi les candidats à une installation en France, c’est le recours aux tests ADN lors de la délivrance des visas de regroupement familial.

La proposition vient du député UMP, Thierry Mariani, rapporteur UMP du projet de loi sur la « maîtrise de l’immigration, l’intégration et l’asile ». Plus inquiétant, ce projet d’amendement a été validé par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Il sera soumis mardi et mercredi aux députés en séance plénière. Selon cet amendement, « les agents diplomatiques ou consulaires peuvent, en cas de doute sérieux sur l’authenticité de l’acte d’état civil, proposer au demandeur d’un visa pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois d’exercer, à ses frais, la faculté de solliciter la comparaison de ses empreintes génétiques aux fins de vérification d’une filiation biologique déclarée ».

Dans l’exposé des motifs, le député Thierry Mariani invoque « la fraude documentaire » relevée par un rapport publié en juillet du sénateur Adrien Gouteyron selon lequel « dans certains pays, comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, les deux Congo, le Togo, Madagascar ou les Comores, de 30% à 80% des actes d’état civil sont frauduleux ». M. Mariani avance aussi le fait que cette procédure « est utilisée par onze de nos partenaires européens ».

L’amendement Mariani fait, depuis, des vagues, soulevant un tollé. « Je suis scandalisé que ce type d’amendement soit adopté en commission des lois alors qu’il s’agit d’un changement si profond et qui touche directement l’éthique même de la façon dont on aborde l’accueil des familles », a déclaré à l’AFP le secrétaire général de la Cimade (service œcuménique d’entraide). « Sur le fond, c’est tout à fait inadmissible. » Pour la Ligue des droits de l’homme (LDH), cet amendement « apporte une nouvelle pierre à l’édifice de la rupture avec le droit commun et avec les principes de la République ». La LDH rappelle que l’article 16 du code civil interdit formellement toute étude génétique des caractéristiques d’une personne sauf à « des fins médicales ou de recherche scientifique ». « Seul un magistrat peut ordonner le recours aux empreintes génétiques pour établir une filiation », remarque la LDH qui ajoute : « Ce qui est bon pour les Européens ne l’est plus pour certaines catégories d’étrangers qui relèvent apparemment d’une immigration que la majorité parlementaire ne veut plus ’subir’. » La loi française encadre en effet très strictement la pratique des tests ADN. Le recours aux empreintes génétiques n’est possible que sur décision judiciaire, avec le consentement de l’intéressé, et dans un cadre médical, pénal ou scientifique.

« C’est un amendement discriminatoire et à caractère raciste », estime le député-maire (UMP) Etienne Pinte, qui s’est opposé, avec François Goulard, à ce texte à la commission des lois. Pour leur part, les députés socialistes présents à la commission des lois ont refusé d’adopter cet amendement. Selon le ministre chargé de l’Immigration, Brice Hortefeux, il n’y a pas de sujet tabou.

Nadjia Bouzeghrane

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