soutien à Nedim Gürsel


article  communiqué de la LDH  de la rubrique international > Turquie
date de publication : dimanche 27 juillet 2008
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Défendre Nedim Gürsel, c’est défendre la liberté d’écrire, que cela plaise ou non aux intégristes de tous bords.


Communiqué de l’Observatoire de la liberté de création

L’Observatoire de la liberté de création de la LDH soutient Nedim Gürsel

Un procureur d’Istanbul a depuis peu engagé des poursuites contre Nedim Gürsel, auteur de Les filles d’Allah, ouvrage dans lequel l’écrivain revient sur les fondements de la religion musulmane. Motif : « insulte aux valeurs religieuses » et risque de déstabilisation de « l’ordre public », sur la base du nouveau code pénal turc. Nedim Gürsel, grand romancier, est par ailleurs directeur de recherche au CNRS et professeur de littérature turque à la Sorbonne. Il a déjà été poursuivi dans les années 1980 pour deux autres de ses romans et fort heureusement sans suite. Une information a été ouverte la semaine dernière. Le romancier risque une peine de prison de « six mois à un ans ». Une procédure inadmissible pour l’Observatoire de la liberté de création de la LDH qui tient à assurer l’écrivain de son entier soutien.

Paris, le 24 juillet 2008

Un écrivain poursuivi en Turquie

par Ragip Duran, Libération du 24 juillet 2008

Les poursuites ont récemment été ouvertes par un procureur d’Istanbul pour « insulte aux valeurs religieuses » et le romancier Nedim Gürsel, 57 ans, en est encore stupéfait. « La Turquie est une république laïque et non pas une théocratie : je n’ai pas eu l’intention d’insulter la religion dans mon livre, mais nous avons la liberté de la critiquer », soupire l’écrivain qui vit entre Istanbul et Paris, et qui est également directeur de recherche au CNRS et professeur de littérature turque à la Sorbonne.

« Vilipendé ». La semaine dernière, une information a été ouverte suite à une plainte déposée contre son dernier livre, Les Filles d’Allah. Au titre de l’article 216 du nouveau code pénal, adopté il y a trois ans avant le début des négociations d’adhésion avec l’Union européenne, le parquet a estimé que l’auteur a « vilipendé publiquement les valeurs religieuses d’une partie de la population ». Le romancier risque une peine de prison « de six mois à un an » pour risque de déstabilisation de « l’ordre public ».

« Il s’agit d’un roman sur la vie du prophète Mahomet et la naissance de la religion musulmane dans lequel je m’interroge sur la croyance, comme sur la violence dans l’islam, à partir des sources principales et traditionnelles, mais aussi à partir de sources secondaires, d’ennemis de Mahomet qui ne peuvent pas faire l’éloge du prophète », se défend Gürsel soutenu par de nombreux intellectuels. Deux de ses romans lui avaient déjà valu des problèmes avec la justice après le coup d’Etat militaire de 1980. Il fut finalement acquitté. Les avocats de l’écrivain sont optimistes, estimant que leur client « a donné les éclaircissements nécessaires lors de son interrogatoire ». Mais tout reste possible alors que la Turquie est toujours plus polarisée entre les islamo-conservateurs au gouvernement et, de l’autre, le camp laïc, fort du soutien de l’armée.

« Fanatiques ». Le bras de fer se déroule par juges interposés. La Cour constitutionnelle est en train d’examiner une interdiction de l’AKP (Parti de la justice et du développement) du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan. Le procureur d’Istanbul a lancé un acte d’accusation contre 86 ex-officiers et personnalités du camp kémaliste, accusés d’avoir constitué un réseau baptisé Ergenekon afin de créer le chaos et un climat propice à un coup d’Etat. « Les fanatiques restent toujours très dangereux », estime Gürsel, Une grande partie de ses 37 romans, nouvelles et études, publiés en France au Seuil pour l’essentiel, a été traduite en 12 langues. La traduction française des Filles d’Allah devrait paraître à l’automne 2009.

Ragip Duran

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