sept communes varoises sanctionnées par la préfecture


article de la rubrique droits sociaux > logement
date de publication : lundi 4 décembre 2006
version imprimable : imprimer


En matière de logement social, après avoir longuement froncé les sourcils, le préfet du Var tape désormais du poing sur la table. Récemment, Pierre Dartout a décidé de pénaliser sept communes varoises, lesquelles ont singulièrement délaissé le volet habitat de la loi de solidarité et de renouvellement urbains [1] et n’ont quasiment produit aucune HLM ces dernières années.

Un dossier de Lilian Renard, publié dans Var-Matin, mardi 28 novembre 2006

Pénalités doublées

Ces villes, considérées comme réfractaires aux efforts exigés pour atteindre 20 % de HLM sur leur territoire, sont Sanary, La Cadière, Le Castellet, Solliès-Pont, Solliès-Toucas, Saint-Mandrier et Puget-sur-Argens.

Les pénalités qu’elles acquittent sur chaque logement manquant seront considérablement majorées. Le conseil régional de l’habitat doit donner un avis définitif sur la question le 5 décembre. Car initialement basé sur un doublement pur et simple de l’amende, de 152 à 304 euros pour chaque HLM faisant défaut, le texte intègre désormais le potentiel fiscal des communes.

Aussi, « dans la plupart des cas, ce sera moins qu’un doublement de la pénalité » explique Pierre Dartout, « mais pour une des sept communes, ce sera plus que le double ». Le préfet du Var n’a pas tenu, hier, à en dire plus, souhaitant attendre la séance du conseil régional de l’habitat pour s’exprimer.

Quatre sur 334 en trois ans

En tout cas, même si elle irrite nombre des maires concernés, cette décision ne les prend pas au dépourvu. Le préfet du Var avait en effet haussé le ton dès mars 2005, après un premier bilan du plan triennal (2002-2004) qui fixait des objectifs à chacune des 22 villes varoises concernées par la loi SRU. Or ces sept communes n’avaient produit que quatre HLM sur les 334 qui leur étaient demandées en trois ans. Surtout, elles n’avaient pas entrepris de programme significatif, ni su justifier ce manque d’investissement dans le logement social. A l’inverse, certaines communes comme Ollioules, initialement dans le viseur, ont pu échapper à la sanction, parvenant à expliquer leur retard ou à démontrer leur mobilisation sur le sujet. Aux autres communes, le préfet du Var a donc écrit une ultime lettre en juillet dernier, pour les informer qu’il s’apprêtait à dresser un « constat de carence ». Seules quatre avaient répondu...

Réactions de maires : « Le contraire de ce qu’il faut faire »

La nouvelle a été accueillie froideur par des élus qui invoquent la rareté et le coût des terrains, des plans d’urbanisme trop restrictifs, ou leurs récents irrvestissements en la matière.

A Sanary, Ferdinand Bernhard (UDF) fait ainsi remarquer que sa ville vient « d’acheter 51 logements » et que le futur plan local d’urbanisme (PLU) imposera un quota de 20 % de HLM dans tout nouveau
programme immobilier, « une première en France » selon lui. Sa ville acquitte déjà une amende annuelle de 230 000 €. « La majorer, alors qu’aujourd’hui on fait des efforts, c’est le contraire de ce qu’il faut pour nous encourager » tempête l’édile. Pour le maire de Solliès-Toucas, le discours est sensiblement le même. « C’est facile d’augmenter une taxe, ce qui l’est moins c’est de nous dire où construire des HLM et avec quel soutien financier », fustige Guy Menut (PS), qui pointe le prix des terrains et la faible maîtrise foncière des petites communes. « Nous payons 80 000 € d’amende. Si cela double, on sera obligé d’augmenter les impôts ou de supprimer des crédits. Ou de mettre la clef sous la porte. » Ancien député PS, Guy Menut assure qu’il était déjà opposé à cette loi au moment de son vote par la gauche en 2000.

Des efforts inégaux

L’État avait donné trois ans
(de 2002 à 2004) aux maires pour satisfaire à des objectifs chiffrés de construction et démontrer une réelle volonté de rattraper ce retard, parmi les plus importants en France. Lors du bilan de ce plan, trois catégories de communes avaient alors émergé, à commencer par les mauvais élèves où figurent les sept villes aujourd’hui sanctionnées.

Pour un autre groupe : Bandol, Le Beausset, Carqueiranne, La Farlède, Hyères, Le Pradet, le taux de réalisation plafonnait à 40 % des objectifs fixés par l’État. Hyères, par exemple, avait alors construit 103 logements sur les 305 requis. A l’époque, le Var comptait tout de même des élèves appliqués, qui avaient réalisé quelque 2200 HLM : La Crau, Fréjus, Saint-Cyr, Saint-Raphaël, la Seyne-sur-Mer, Six-Fours, Toulon et La Valette.

Certes, certaines communes ont aujourd’hui lancé des programmes d’habitat social qui n’étaient alors pas pris en compte dans ce bilan. À l’inverse, d’autres sont flattées par les statistiques... mais partaient de très loin. Par exemple, Saint-Raphaël a réalisé 262 logements sur les 319 exigés. Mais la commune affiche toujours un taux de 6,5 % de HLM sur son territoire. De même, Six-Fours avait construit 188 HLM sur les 388 demandées, mais plafonne à un taux de 5,5 %.

Aujourd’hui, c’est donc plus la volonté et les efforts des communes qui sont pris en compte que le résultat global.
Car à ce titre, seules trois villes sont dans les clous : La Garde, qui dépasse les 20 %, La Seyne-sur-Mer à qui il ne manque que quelques logements [2], et Toulon dont la situation sociale et urbaine lui vaut de pouvoir se limiter à 15% de HLM.

Lilian Renard

Il y a un an ...

Gérard Gantier, vice-président de la fondation Abbé Pierre, déclarait : « Les politiques sont trop frileux ».

Pour, ce militant associatif, il y a urgence : trop de jeunes et de personnes en difficulté n’ont pas accès à un logement digne.

  • Quels sont les besoins en PACA ?

« Il manque 90 000 logements sociaux. Le projet de construction présenté par le gouvernement est de 1 500 logements nouveaux par an, ce qui est largement insuffisant. »

  • Manque de moyens ?

« Il y a de l’argent. Le préfet de région a rappelé que 35 millions d’euros sont disponibles. Cet argent provient des pénalités payées par les agglomérations et villes qui ne respectent pas la loi de solidarité et de renouvellement urbain. »

  • Pourquoi ne pas L’utiliser ?

« Il y a un double problème dans la région. C’est d’abord le manque de foncier, mais le plus gros obstacle, c’est l’inertie. »

  • C’est-à-dire ?

« Les élus sont encore trop frileux. Des maires que nous rencontrons nous font comprendre qu’ils préfèrent payer des pénalités, plutôt que d’être en conformité avec la loi et d’accueillir un certain nombre de logements sociaux. C’est terrible et inacceptable. »

  • Construire des logements sociaux, c’est dévalorisant ?

« A tort, l’image de ces habitations est encore mauvaise. Il ne s’agit pourtant plus des grandes barres en béton. Les programmes actuels concernent de petites maisons, avec 15 à 30 logements et toujours bien intégrées à la ville. »

Propos recueillis par F. D., publiés dans Var-Matin le 25 oct. 05

Notes

[1La loi SRU (« loi de solidarité et de renouvellement urbains) prévoit (article 55) l’obligation pour les communes situées au coeur ou à proximité d’une agglomération de posséder au moins 20 % de logements sociaux. Sur les 22 communes varoises concernées, la proportion ne s’élève qu’à... 7 % !

[2Le bon classement des communes de La Garde et de La Seyne dans le domaine du logement social est à mettre au crédit des municipalités communistes qui s’y sont succédées pendant plusieurs dizaines d’années. [Note de LDH-Toulon]


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP