Une centaine de Rroms de nationalité bosniaque originaires de Modrica sont arrivés à Toulon depuis début janvier. Le département du Var n’a pas pu prendre en charge de façon décente ces familles et assurer leur accès aux droits fondamentaux – une situation qui illustre le sous-équipement du département.
Suite au rejet par l’OFPRA de leur demandes d’asile, sept familles, soit 32 personnes dont 18 enfants, se sont retrouvées à la rue le 9 juin, par « décision ahurissante et scandaleuse de la préfecture de Toulon de mettre fin à leur hébergement » (France terre d’asile).
Communiqué de presse de France terre d’asile
Paris, le 9 juin 2010
Le mauvais exemple par Toulon
Sept familles de Roms bosniaques, représentant un nombre total de 32 personnes (dont 18 mineurs) sont sans abri, suite à une décision ahurissante et scandaleuse de la préfecture de Toulon de mettre fin à leur hébergement.
Ces personnes étaient arrivées dans le Var au cours du premier trimestre 2010. Elles ont déposé une demande d’asile, et ont été placées sous procédure prioritaire. Rejetée devant l’OFPRA, leur demande d’asile fera l’objet d’un recours devant la CNDA. Ce recours n’est pas suspensif, rendant légale la mesure d’éloignement en cours de procédure.Le choix des autorités publiques avait été de proposer un hébergement « tournant et croisé », selon les termes de la préfecture, en usage localement, afin d’éviter un prétendu appel d’air, obligeant les familles à changer régulièrement de lieu d’accueil.
Aujourd’hui, ces familles sont à la rue sur décision de la préfecture du Var, avant même d’avoir reçu notification de la décision de rejet de leur demande d’asile par l’OFPRA. Nous nous étonnons de cette décision de la préfecture qui laisse à la rue des familles entières dans une totale méconnaissance de leurs droits et au mépris de leur dignité, bafouant le principe de l’inconditionnalité de l’accueil.
Nous condamnons avec force une telle pratique.
Nous rappelons que, si un Etat a le droit de mettre en place des politiques migratoires, il n’en demeure pas moins que les personnes ont un égal droit à leur dignité, dont le droit à l’hébergement, quels que soient leur origine et leur statut.
Bosniaques : les demandes d’asile rejetées
par Jacqueline Cnobloch, Var-matin le 10 juin 2010
RÉFUGIÉS Une quarantaine de personnes sont concernées à Toulon. Les associations se mobilisent
Nouveau noeud pour les familles Bosniaques qui avaient débarqué à Toulon au cours du premier trimestre 2010 : leurs demandes d’asile sont peu à peu rejetées par l’OFPRA [1].
Face à cette sentence négative – la Bosnie n’étant plus considérée comme un Pays dangereux – l’Etat applique la règle : il ne finance plus les hébergements. « Une politique qu’on estime cohérente », selon Simon Babre. Le directeur de cabinet du préfet mettra en place l’obligation de quitter le territoire français sous un mois. Une quarantaine de personnes (enfants compris) sont concernées. Au terme de ce mois, elles pourront être reconduites d’office à la fruitière. Entre-temps, l’État favorise les retours volontaires.
Possibilité de recours
Du coup hier, trente-deux personnes (dont dix-huit mineurs) se sont retrouvées sans abri [2]. « Nous condamnons avec force une telle pratique » a dénoncé dans la journée, France Terre d’asile Paris dans un communiqué, pointant Toulon comme « le mauvais exemple ». Parallèlement l’évêché – par l’intermédiaire de l’association Sichem – a envoyé un message demandant des dons, un terrain, des caravanes [3]. Une solution de mise à l’abri a été provisoirement trouvée. Parce que ces familles « ont droit à la dignité et à l’hébergement », selon France Terre d’asile. Et surtout, elles ont encore la possibilité de demander un recours auprès de la Cour nationale du droit d’asile et cette procédure est longue. Et sur la décision de classer la Bosnie comme pays non dangereux, le Sichem qui soutient ces familles, va porter plainte auprès du tribunal administratif.
Communiqué commun LDH Toulon et Resf83
Toulon, le 22 mai 2010
REFUGIES A TOULON :
LA FRANCE FACE A SES DEVOIRSUNE CENTAINE DE REFUGIES DE BOSNIE-HERZEGOVINE A TOULON
Ces réfugiés, dont 50 enfants, des Rroms de nationalité bosniaque originaires de Modrica, dans le croissant serbe de Bosnie-Herzégovine, sont arrivés à Toulon depuis début janvier. Pris en charge, au départ, par des organismes publics, ils ont été un temps abandonnés, et ne doivent leur survie qu’à des associations caritatives.
LES RROMS SONT VICTIMES DE DISCRIMINATIONS EN BOSNIE-HERZEGOVINE
Ces familles ont fui leur pays pour trouver asile chez nous. Elles y ont été contraintes car victimes de graves discriminations dans leur pays : l’UNICEF, Amnesty International, la Cour européenne des droits de l’Homme ont condamné à cet égard la Bosnie-Herzégovine. Pourtant, la France, du fait qu’elle considère à tort la Bosnie-Herzégovine comme un pays sûr, les prive de la possibilité de demander l’asile et limite donc arbitrairement leurs droits ils n’ont ainsi pas accès au CADA (Centre d’Accueil pour les Demandeurs d’Asile), ils ne bénéficient pas de l’Allocation Temporaire d’Attente (ATA).
CES REGUGIES ONT DES DROITS
Les pouvoirs publics ont l’obligation de prendre en charge ces populations et d’assurer l’accès aux droits fondamentaux que sont la santé, le logement, l’éducation. L’Etat ne l’assure pas. Les réfugiés ne peuvent actuellement toujours pas bénéficier d’un hébergement durable. Ils ont même passé une nuit dehors, le 1 er avril. La scolarisation des enfants est de ce fait rendue impossible.
NOTRE DEPARTEMENT EST SOUS-EQUIPE POUR ASSURER LES DROITS FONDAMENTAUX DES REFUGIES
Dans l’urgence, les familles n’ont pas été prises en charge de manière décente. "Nous nous trouvons c’est vrai dans une situation de crise", a dit la sous-préfète du Var chargée de la cohésion sociale. Cela devrait inciter les autorités du département à penser et à financer une politique d’accueil ambitieuse en amont des arrivées. Le manque de moyens alloués à l’hébergement d’urgence, spécifique ou non aux demandeurs d’asile, dans notre Département est par exemple préjudiciable.
Devant l’urgence, nous avons saisi le Préfet du Var.
Cette situation est à l’image de la politique d’asile de la France : en grave crise. Comme le comité de l’ONU contre la torture vient de le dénoncer récemment, la France contrevient aux engagements internationaux qu’elle a pris pour l’accueil des réfugiés.
Extrait du rapport du Comité contre la torture [4]
17. Depuis ses dernières observations et recommandations, le Comité demeure préoccupé par les dispositions de la loi du 10 décembre 2003 introduisant des notions d’ « asile interne » et de « pays d’origine sûrs », qui ne garantissent pas une protection absolue contre le risque de renvoi d’une personne vers un État où elle risquerait d’être soumise à la torture. Ceci est corroboré par l’absence d’information précise quant aux sources documentaires retenues pour l’établissement d’une liste de pays d’origine « sûrs », et aux échéances de révision d’une telle liste. Par ailleurs, il est intéressant d’observer que selon l’OFPRA, le taux de reconnaissance
de la qualité de réfugié, ou l’octroi de la protection subsidiaire pour des personnes originaires de dits « pays d’origine sûrs » avoisinait les 35% en 2008. (Article 3)
Le Comité réitère sa recommandation, à l’effet que l’État partie prenne les mesures idoines pour s’assurer que les demandes d’asile de personnes provenant d’États auxquels s’appliquent les notions d’ « asile interne » ou de « pays d’origine sûrs » soient examinées en tenant compte de la situation personnelle du demandeur et en pleine conformité avec les dispositions de l’article 3 de la Convention.
18. Le Comité déplore le fait qu’il ait été saisi de plusieurs allégations documentées relatives au renvoi d’individus vers des pays ou ils risquaient d’être soumis à des actes de torture, peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que de personnes renvoyées vers leur pays d’origine ayant fait part de leur arrestation et de mauvais traitements subis à leur arrivée, ce parfois en dépit de mesures provisoires de protection du Comité ou de la Cour européenne des droits de l’homme. (Article 3)
Le Comité réitère sa recommandation que l’État partie prenne les mesures nécessaires afin de garantir en tout temps qu’aucune expulsion ne soit exécutée à l’encontre de quiconque risquerait d’être soumis à la torture en cas de renvoi vers un Etat tiers.
[1] Office français de protection des réfugiés et apatrides, organisme indépendant chargé d’accorder ou non, le statut de réfugié.
[2] Depuis début avril, des solutions d’hébergement avaient été assurées à Sanary, aux Adrets, à Solliès-Pont, à Pierrefeu.
[3] Association Sichem, tél. :06.82.85.16.64.
[4] Comité contre la torture de l’ONU. Quarante-quatrième session. 26 avril - 14 mai 2010. Observations finales concernant la France :
http://www2.ohchr.org/english/bodie....