“quand j’ai dessiné Mandela, on m’a dit que c’était un terroriste”


article communiqué de l'Aica et de la LDH  de la rubrique libertés > censure
date de publication : mercredi 20 janvier 2016
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Le journal Libération et l’organisation Reporters sans frontières (RSF) ont décidé de renoncer à un projet de vente caritative d’une quarantaine de "Unes" du journal revisitées par des artistes après l’intervention, réussie, de l’ambassade d’Israël à Paris demandant à la maison Artcurial, de censurer une œuvre de l’artiste Ernest Pignon-Ernest.

La Ligue des droits de l’Homme se joint à l’Association internationale des critiques d’art (Aica France) pour dénoncer l’annulation d’une exposition suite au retrait obtenue par l’ambassade d’Israel d’une oeuvre d’Ernest Pignon-Ernest

[Mis en ligne le 15 janvier 2016, mis à jour le 20]



L’Aica France soutient Ernest Pignon-Ernest, Libération et RSF

L’Aica France condamne vigoureusement l’attitude inadmissible de l’ambassade d’Israël à Paris qui a fait pression auprès d’Artcurial pour retirer de la vente, prévue au bénéfice de la liberté d’expression de la presse et des artistes, l’œuvre d’Ernest Pignon-Ernest. Il est honteux qu’Artcurial cède à cette demande illégitime.

L’AICA France soutient l’artiste, Libération et Reporters sans frontières et rappelle qu’en France la liberté d’expression est un droit garanti par de nombreux textes et qu’elle est également garantie par la Convention européenne des droits de l’Homme. L’article 10 regroupe « la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière ».

Avec le soutien de :

  • Cipac
  • Ligue des droits de l’Homme

Libé et RSF refusent les pressions d’Israël pour censurer une œuvre évoquant Marwan Barghouti

Rédaction du HuffPost Algérie, le 15 janvier 2016


La maison Artcurial où devait se dérouler la manifestation le 27 janvier prochain a trouvé "normale" la demande de l’ambassade d’Israël qui a vu dans l’oeuvre une apologie du terrorisme. Elle a décidé de retirer l’œuvre en invoquant le "contexte des récents attentats et de la prorogation de l’état d’urgence" qui ferait de maintien de la vente une "source potentielle de trouble à l’ordre public".

Francois Tajan, président délégué d’Artcurial, a donc décidé que "cette œuvre ne sera pas présentée à la vente" en précisant que ce retrait ne portait "aucun jugement sur l’œuvre elle-même". Libération et RSF ont refusé de céder à la demande de censure. Ils ont décidé d’annuler la manifestation et de chercher une autre maison de vente.
Le Keffieh de Arafat à Barghouti

L’œuvre d’Ernest Pichon qui a suscité l’ire de l’ambassade d’Israël est une reprise de la Une de Libération publiée le jour de l’enterrement de Arafat en 2004 qui montrait un Keffieh accroché avec pour titre "Et maintenant" ?

L’artiste a repris cette une en dessinant sous le Keffieh, le portrait de Marwan Barghouti, dirigeant du Fatah, emprisonné depuis 2002 en ajoutant cette phrase : " En 1980, quand j’ai dessiné Mandela, on m’a dit que c’était un terroriste."

Dans une déclaration au journal Le Monde, l’artiste souligne que ce qu’il a écrit à côté du portrait de Barghouti est vrai et qu’à l’image de Mandela " il n’est pas exclu qu’un jour, Marwan Barghouti soit élu président de la Palestine".

Niant vouloir faire dans la provocation, il a estimé, toujours au journal Le Monde, "qu’on ne parle pas assez de la misère et du désespoir du peuple palestinien. Je suis allé à Ramallah, et la vie sur place m’a fait penser au régime de l’apartheid. J’ai vu la violence faite au peuple palestinien. Les centaines de résolutions de l’ONU qui condamnent l’attitude d’Israël ne sont pas appliquées."

Dans une déclaration au journal Libération, Ernest Pignon-Ernest s’étonne qu’une "ambassade étrangère puisse décider de ce que l’on expose ou pas. Et qu’une maison de ventes cède aux pressions...".

"Cette œuvre n’est en aucune façon une apologie du terrorisme, et elle appartient légitimement au projet d’“Artistes à la une”. Nous avons donc pris la décision de faire la vente ailleurs afin de rester fidèles à nos principes" a déclaré au Monde Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF.

Né en 1942 à Nice, figure de l’art urbain, Ernest Pignon-Ernest, est connu pour ses silhouettes dessinées et collées à même les murs des rues. Les habitants d’Alger se souviennent du travail qu’il avait effectué dans plusieurs quartiers de la ville autour de la silhouette de Maurice Audin, militant communiste, arrêté le 11 juin 1957 puis torturé par les paras français et dont le corps a disparu.

Ernest Pignon-Ernest a effectué un travail similaire en Cisjordanie autour de portaits du grand poète palestinien Mahmoud Darwich.

A gauche, la une originale de Libération du 12 novembre 2004, jour de l’enterrement du leader palestinien Yasser Arafat. A droite, le détournement d’Ernest Pignon-Ernest, mettant en scène Marwan Barghouti, un activiste palestinien emprisonné en Israël, sous le célèbre keffieh. DR


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