photo politiquement incorrecte à la Fnac de Nice : deux licenciements


article de la rubrique libertés > censure
date de publication : dimanche 4 juillet 2010
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La Fnac a engagé des procédures de licenciement à l’encontre de deux salariés, une chargée de communication à Nice et un cadre du service culturel basé à Paris. Elle reproche aux deux lampistes d’avoir « mêlé son nom » au scandale provoqué par une photographie montrant un homme s’essuyant les fesses avec le drapeau français qui avait été primée lors d’un concours organisé en mars dernier par la Fnac de Nice sur le thème du politiquement incorrect.

L’événement a également provoqué le dépôt d’un projet de décret visant à sanctionner la « dégradation ou l’utilisation indécente du drapeau français », histoire de ne pas laisser passer une occasion de caresser une certaine frange de l’électorat dans le sens du poil...


« Ce qu’on appelle liberté, dans le langage politique,
c’est le droit de faire des lois, c’est-à-dire d’enchaîner la liberté. »

Auguste Vermorel


La Fnac licencie deux salariés

[AFP - ‎2 juillet 2010‎]


L’enseigne de distribution Fnac (groupe PPR) a engagé deux procédures de licenciement à l’encontre de salariés à qui elle reproche d’avoir "mêlé son nom" à une photographie qui lui a attiré les foudres d’élus UMP et du gouvernement, a-t-on appris vendredi de source syndicale.

La photo incriminée, montrant un homme s’essuyant le postérieur avec un drapeau français, a été sélectionnée par le jury d’un concours organisée par la Fnac à Nice, et publiée dans la presse locale en mars. Elle a provoqué un tollé à droite, et conduit la Chancellerie à saisir le Conseil d’Etat d’un projet de décret sanctionnant la diffusion de telles images.

Une procédure de licenciement pour faute grave a été engagée dans un premier temps contre la directrice de la communication de la FNAC de Nice.
"On lui reproche d’avoir mêlé le nom de l’entreprise à cette photo, mais elle n’était pas seule à décider et avait informé le siège", a expliqué à l’AFP Hervé Gomis, délégué syndical central CFDT, confirmant une information de "Rue89".

Dans un second temps, les syndicats ayant fait valoir que le siège était informé, un cadre de l’action culturelle a fait l’objet d’une procédure identique, a précisé le syndicaliste. Ce salarié est "totalement étranger à cette affaire" mais "a eu le malheur de répondre au mauvais moment à un mail", selon la CGT.

La FNAC, interrogée par l’AFP, a indiqué qu’elle ne souhaitait faire "aucun commentaire", alors que "les procédures sont en cours avec les salariés".

La CGT a fustigé, dans une communication interne, la réaction "pitoyable" de la direction de l’enseigne. "Fut un temps où la Fnac aurait répondu et pris position de manière claire au nom de la liberté d’expression [...] Deux salariés de la Fnac perdent leur emploi. La lâcheté de nos dirigeants en est responsable", affirme le syndicat.

En mars, la garde des Sceaux Michèle Alliot-Marie avait dénoncé « un acte inadmissible », bientôt suivie par le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux : «  Personne ne peut accepter que la liberté d’expression soit détournée au mépris de l’emblème de notre pays. »

La ministre de justice devait par la suite déposer au Conseil d’État un projet de décret visant à compléter la législation sur le « délit d’outrage au drapeau ou à l’hymne national » en sanctionnant la « dégradation ou utilisation indécente du drapeau français ».

« Ce texte vise à protéger l’emblème national » [1]

Quant aux « suites pénales » appelées de ses vœux par la ministre de la Justice, elles se sont traduites par un projet de décret. Celui-ci complète la législation de 2003 sur le « délit d’outrage au drapeau ou à l’hymne national lors d’une manifestation organisée », puni de 7 500 euros d’amende, assortis de six mois d’emprisonnement lorsqu’il est commis en bande organisée.

Deux cas de figure sont visés par le projet de décret déposé au Conseil d’Etat au début du mois de juin : la « dégradation ou utilisation indécente du drapeau français, dans un lieu public ou ouvert au public », et la « diffusion par tout moyen de ces faits ». Porte-parole de la Chancellerie, Guillaume Didier précise :

« Bien sûr, les personnes qui relaient cette dégradation ou utilisation indécente à titre d’information ne sont pas visées, le devoir d’information n’est pas touché. L’idée est de combler le vide juridique de la loi. »

Quant à la garantie de la liberté artistique, elle ne serait pas bafouée selon lui par ce texte :

« La liberté artistique n’autorise pas que l’on dégrade l’emblème de la nation. Si demain votre voisin va taguer votre hall d’immeuble ou votre voiture au nom de la liberté artistique, il tombe sous le coup de la loi pénale.

« La liberté artistique n’autorise pas non plus à prononcer des insultes discriminatoires à l’encontre d’une personne. Ce texte vise à protéger l’emblème national, tel qu’il est décrit dans l’article 2 de la Constitution. »

Le Conseil d’Etat devrait se prononcer prochainement.

Notes

[1Extrait de
La Fnac licencie deux salariés après « l’outrage au drapeau », par Catherine de Coppet, Rue89, le 1er juillet 2010 19H39.


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