les inondations dans le Var ne sont pas une catastrophe naturelle


article de la rubrique Toulon, le Var
date de publication : samedi 29 novembre 2014
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C’est la [quatrième] inondation en quatre ans : 2010, 2011, janvier et maintenant novembre 2014. Ce ne sont pas des surprises : les zones inondables semblent bien répertoriées comme on peut le constater en consultant l’atlas des zones inondables du Département sur le site du SIG Var. Elles sont tellement bien connues que ce sont des zones où on a tendance à reléguer les aires d’accueil pour les gens du voyage.

Comme l’écrit Hervé Kempf dans l’article ci-dessous, repris du site Reporterre – merci de nous y avoir autorisé ! – , c’est la "soif de l’argent" qui est la cause de ces inondations [1].

[Mis en ligne le 21 janvier 2014, mis à jour le 29 novembre]



Les inondations dans le Var ne sont pas une catastrophe naturelle

Cet article a été écrit début 20014. Dix mois plus tard, alors que les inondations affectent de nouveau le département du Var, il reste hélas d’actualité.

Les inondations dans le Var s’expliquent par la bétonisation incontrôlée des terres. Si l’on ne veut plus d’inondations catastrophiques, il faut arrêter le gaspillage des terres et l’étalement urbain.

Inondations dans le Var, alerte rouge, des disparus, des morts… et le Premier ministre qui se précipite avec le ministre de l’Intérieur et le ministre de l’Ecologie, ce lundi, dans la région sinistrée, et déclare l’état de "catastrophe naturelle".

Sauf que ce n’est pas la pluie diluvienne qui crée tant de dommages, mais les conditions dans lesquelles l’eau s’écoule ou est absorbée par le sol. Et comme le Var est un département où l’artificialisation des sols se poursuit à une vitesse incontrôlée, les sols y sont de plus en plus imperméables : "L’imperméabilisation de la surface des sols a de nombreuses conséquences environnementales, écrit le Commissariat général au développement durable. Elle favorise le ruissellement de l’eau le long des pentes au détriment de son infiltration, l’érosion des sols, les coulées d’eau boueuse et le risque d’inondation."

Le phénomène est très bien connu des instances régionales, et c’est sur le site internet du département que l’on apprend que "la forte pression foncière alliée à une forte attractivité touristique conduit à une augmentation régulière des surfaces artificialisées (14,7 % sur la seule période 1993-2002, enquête Teruti). Cette imperméabilisation croissante des bassins versants accentue le caractère torrentiel des écoulements. Ces effets sont aggravés par la constitution des sols, peu favorables à l’infiltration des eaux. Les cours d’eau, qui peuvent charrier nombre de matériaux solides, sont également fortement artificialisés".

Certes, la population du département a beaucoup augmenté depuis trente ans : de 708 000 habitants en 1982 à 1 013 000 en 2011 (soit + 43 %), ce qui a entraîné une explosion de l’urbanisation. Mais cette urbanisation s’est réalisée sans souci d’économiser l’espace et, comme l’a relevé le sénateur Pierre-Yves Collombat dans un rapport publié en 2012, "sans aucune prise en compte du risque inondation : des terrains inondables sont lotis, de vastes surfaces sont imperméabilisées de manière artificielle, les cours d’eau traversant les villages sont couverts, parfois a minima".

Le secret des inondations : la "soif de l’argent"

Le constat du sénateur est clair : "Les autorisations de construire ont été délivrées sans véritable prise en considération du risque inondation ou, plus exactement, avec une prise en compte à éclipse bien incapable de contenir ’la soif de construire’ locale, pour reprendre l’expression de la Cour des comptes. Le manque de moyens des services de l’État et des services municipaux, s’agissant des petites collectivités territoriales, face à la ténacité et à l’ingéniosité des promoteurs et à la pression des propriétaires fonciers est un élément d’explication. La mise en place, autrefois d’un plan d’occupation des sols (POS), aujourd’hui d’un PLU, est l’exercice de politique locale le plus à risque dans le Var, comme partout où la pression foncière est forte."

Et pour ceux qui ne comprendraient pas tout à fait, le texte enfonce le clou : "Si l’écart entre la politique officielle de fermeté des pouvoirs publics et les moyens qui lui sont affectés explique pour partie que ’la soif de construire’ ait pu aussi facilement trouver à s’étancher dans le Var, il n’explique pas l’origine de cette ’soif’. Que ce soit l’argent est si peu un secret qu’on s’étonne que le boom immobilier ait pu prospérer sans encombre aussi longtemps. Que l’on sache, pas de procès marquant ou de sanction électorale pour fait de ’bétonnage‘ illégal et dangereux."

En fait, les inondations dans le Var (comme récemment en Bretagne, et comme dans de plus en plus d’endroits), résulte du laxisme des politiques foncières, qui encouragent systématiquement l’immobilier. C’est ce qu’explique en termes pondérés le sénateur Collombat : "L’immobilier, dopé par l’endettement, est devenu ces trente dernières années l’un des moteurs essentiels de l’économie occidentale, au point de le mettre aujourd’hui durablement en crise. Limiter l’explication de l’urbanisation, comme le font ses censeurs, à sa dimension morale et psychologique est un peu court. ’Ils feignent’, disait Bossuet, ’de s’affliger des conséquences tout en s’accommodant des causes.‘".

Si l’on ne veut plus d’inondations catastrophiques, il faut arrêter le gaspillage des terres et le bétonnage des sols. De ce point de vue, le déplacement express de M. Ayrault, qui ne songe qu’à bétonner Notre Dame des Landes et affaiblit les procédures réglementaires par un "choc de simplification", est une pantalonnade.

Lei 20 janvier 2014

Hervé Kempf, Reporterre


Communiqué de presse EELV-Var [2]

Inondations dans le Var

Une fois de plus et pour la cinquième fois depuis 2008 , le Var est inondé !
Les ruisseaux côtiers du Gapeau (Hyères), du Pansard et du Maravenne (La Londe-Les-Maures) du Batailler (Bormes et Le Lavandou) mais aussi de l’Argens (Roquebrune S/Argens) et de l’Issole (Flassans et au Luc) ont coûté un lourd tribut aux Varoises et Varois.

Cette fois-ci, comme en 2010, en plus des dégâts matériels catastrophiques, la mort de deux hommes, peut-être plus, est à déplorer.
Si nos pensées et notre soutien vont à leurs familles et à leurs proches, notre colère se tourne vers ces élus qui continuent années après années à mettre en place un aménagement du territoire aberrant, irresponsable et dangereux parce que coûteux économiquement, socialement et écologiquement.

L’aspect répétitif de ces inondations est très inquiétant. Outre la détresse humaine qu’elles engendrent, ces catastrophes ont aussi un coût financier pour la collectivité. Cette fois, plus de 150 personnes ont du être secourues, plus de 4 000 personnes sont privées d’électricité en plein hiver et avec les pieds dans l’eau, des centaines de sapeurs-pompiers, gendarmes et militaires ont été mobilisés ainsi qu’une dizaine d’hélicoptères.
Le danger passé, l’eau retirée, il faut faire le bilan des infrastructures à reconstruire,
des aides à apporter aux agriculteurs, aux entreprises, aux particuliers… Une fois de plus la collectivité sera solidaire.

Combien de millions d’euros faudra-t-il encore dépenser pour comprendre
que cette urbanisation hasardeuse ne sert que les drames que nous rencontrons aujourd’hui ?
Combien de morts faudra t-il pour réaliser le danger de construire en zone inondable ?
Aux sinistrés qui vont devoir reconstruire avec la hantise, hélas fondée, que tout va recommencer dans quelques années ou peut être, dans seulement quelques mois, nous adressons notre soutien le plus compatissant et le plus appuyé.

Nous comprenons aussi la colère de tous ceux qui voient la valeur de leur maison ou de leur terrain considérablement diminuée.

Désormais l’heure est à la prise de conscience par les services de l’état qui doivent faire acte de responsabilité et faire respecter des règles d’urbanisme qui protègent enfin les citoyens.

21 janvier 2014

P.-S.

Le 24 janvier 2014, le FNE PACA (France Nature Environnement PACA),
l’UDVN 83 (Union Départementale Vie et Nature 83) et ses associations adhérentes ont publié un communiqué commun qui va dans le même sens : http://www.fnepaca.fr/images/images....

Notes

[1Source :
Les inondations dans le Var ne sont pas une catastrophe naturelle : http://www.reporterre.net/spip.php?article5287.


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