la plaque du carrefour Salan recouverte clandestinement


article de la rubrique extrême droite > Toulon : la stèle, le carrefour
date de publication : dimanche 30 août 2015
version imprimable : imprimer


En bas du Faron, la plaque commémorative d’un libérateur de Toulon, Raoul Salan, a été comme maquillée — voyez cette page. Le texte qui y figure est celui que l’extrême droite avait écrit ... il y a quinze ans

[Première mise en ligne le 27 août 2015, mise à jour le 30]



La plaque clandestine, photographiée hier matin. Un angle écorné est visible : du plastique a été collé par-dessus le marbre. Une découverte faite par plusieurs membres de la Ligue des Droits de l’Homme. (Photo Matthieu Cotterill)

En passant comme ça, on n’y voit que du feu. Les fausses marbrures, les lettres d’or gravées dans la pierre... Et pour­tant, la plaque accrochée tout en haut du boulevard Sainte-Anne, à Toulon a été recouverte, clandestinement. Rien d’une blague po­tache, puisque la couverture en plastique, solidement vissée sur le marbre, est la copie conforme de la plaque apposée ici en 2001. Elle avait été voulue par la municipa­lité d’alors, d’extrême droite.

C’est justement ce texte que le maire de Toulon Hubert Falco avait retiré en juin 2005, avec l’ap­probation unanime du conseil mu­nicipal - sauf une abstention. Dix ans plus tard, certains veulent ma­nifestement rallumer la contro­verse.
Ce que les deux textes ont en com­mun est de rendre hommage à
Raoul Salan, l’un des libérateurs de Toulon, en 1944.

Mais là où l’extrême droite honore le général Salan, qui fut un général putschiste et chef de l’OAS [1], la municipalité toulonnaise ne garde que le colonel, au moment de la li­bération de la ville.

« Détournement »

La Ligue des droits de l’Homme avait longuement milité pour ce changement de nom. Et au­jourd’hui, découvrant la plaque maquillée, le militant Gérard Es­tragon s’indigne. « C’est un vérita­ble détournement de la plaque de 2005. Salan était un général fac­tieux, c’est le chef de l’OAS qui a porté atteinte à la République. C’est le fait de gens qui veulent faire plier la vérité historique ».
Raoul Salan a pris part au putsch des généraux à Alger, en avril 1961.
Il a été condamné à la détention perpétuelle en 1962, puis amnistié en 1968.

Ayant appris l’apparition de cette fausse plaque, l’historien Jean-Marie Guillon
 [2] souligne que -«  les batailles des noms sont très impor­tantes. Ce sont des symboles. Un nom de rue, c’est un nom qu’on cé­lèbre, c’est un Panthéon.  »-

« Geste honorable »

Au Font national, par contre, on ne se prive pas de soutenir, ou­vertement. «  On m’en a averti et c’est très bien, assure Amaury Na­varranne, conseiller municipal frontiste. Rien ne justifiait d’avoir débaptisé ce carrefour. C’était un af­front ».
Soulignant que le général puts­chiste avait été officiellement réha­bilité, après sa grâce, il «  salue le geste honorable de gens qui en ont pris l’initiative ».

En mai 2014, le sujet avait ressurgi lorsque les élus FN de Toulon avaient refusé de donner le nom de Nelson Mandela au nouveau parvis situé devant la gare. «  Si vous prenez tout le passé de Man­dela, y compris son passé terro­riste, vous devez rebaptiser le car­refour du général Salan. » En vain.

Plaque restaurée

Hasard (ou pas ?), la commémora­tion de la libération de Toulon a lieu demain. Certains, comme les élus FN, seront au rendez-vous. L’association Adimad, qui se pré­sente comme «  la vitrine du juste combat de l’Algérie française » or­ganise une cérémonie au carre­four Salan.

Mais les participants devront se recueillir devant le colonel et non le général. Informé par Var-matin,
le maire a donné des instructions immédiates, hier après-midi, pour que la plaque retrouve son état légitime.

Sur le fond, Hubert Falco fait sa­voir qu’il « ne rentrera pas dans une polémique — qui a été réglée dix ans en arrière ». Par ailleurs, il « prépare la rentrée des petits Tou­lonnais et Toulonnaises  », ce qui lui
« paraît plus important  ».

Trois heures plus tard, la plaque authentique avait été remise au jour et nettoyée.

Le travail de mémoire, lui, sera plus long à accorder.

Sonia Bonnin
Var Matin, le 27 août 2015


_________________________________

Complément

Dans un article posté le dimanche 30 août 2015 à 20h02 qui fait le point sur cette affaire, intitulé « Recouvrement clandestin de la plaque du carrefour Salan à Toulon : l’œuvre de l’extrême droite ? », le site internet de Var-Matin rappelle que :

En mai 2014, le sujet avait resurgi lorsque les élus FN de Toulon avaient refusé de donner le nom de Nelson Mandela au nouveau parvis situé devant la gare.

"Si vous prenez tout le passé de Mandela, y compris son passé terroriste, vous devez rebaptiser le carrefour du général Salan". En vain.

Sonia Bonnin


P.-S.

Le communiqué du 30 août 2015 de la section LDH de Toulon : http://ldh-toulon.net/IMG/pdf/comun... (58 ko, au format PDF).

Notes

[1Organisation clandestine, pour la défense de la présence française en Algérie par tous les moyens, y compris des attentats.

[2Il a consacré un ouvrage à l’étude des noms de rue, La toponymie urbaine, avec Jean-Claude Bouvier.


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP