l’extrême droite cherche l’incident lors d’un cercle du silence à Toulon


article de la rubrique démocratie > les cercles de silence
date de publication : mardi 3 février 2009
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Comme chaque mois, un cercle de silence a été organisé à Toulon, Place de la Liberté, le vendredi 30 janvier de midi à 13 heures.

Après avoir tenté, en vain, de perturber notre cercle du 30 novembre, l’extrême droite, dans une volonté évidente de provocation, est revenue nous agresser.

[Mise en ligne le 30 janvier 2009, complétée le 3 février]

Cercle de silence à Toulon, le 30 janvier 2009 (DR).

« Le Parti populiste n’est pas venu pour défendre ses idées mais pour nous empêcher de nous exprimer. »

Alex Massari
président de la section de Toulon de la LDH

Notre rassemblement pacifique avait été, comme les précédents, déclaré à la préfecture du Var.

Apprenant que la préfecture avait reçu une déclaration de manifestation émanant de l’extrême droite, pour le même jour, à la même heure, au même endroit, nous avons diffusé le message suivant à nos militants dans la matinée du 30 janvier :

Le parti populiste (une annexe du FN) a déclaré en préfecture une manifestation à la même heure et au même endroit que nous :

« Le Parti Populiste P.A.C.A a donc décider de soutenir et de participer au rassemblement unitaire des nationaux et des patriotes pour dire non aux complices de l’immigration clandestine et de l’invasion migratoire, le vendredi 30 janvier 2009 à 12 h - Place de la Liberté à Toulon, à l’initiative de la coordination des forces nationales du var. »

Il est clair que nous ne défendons pas les mêmes valeurs.
La Place de la Liberté est suffisamment vaste pour pouvoir contenir deux rassemblements sans qu’ils se mêlent.
Nous nous abstiendrons de toute réaction, en geste ou en parole.

Le conseiller général Bruno Maranzana, témoin du harcèlement dont nous avons été l’objet de la part de quelques dizaines de personnes venues dans l’intention de provoquer un incident, a adressé la lettre suivante au préfet du Var.
 [1]

Grâce au sang-froid de tous ceux qui avaient répondu à notre appel – nous étions une petite centaine – il n’y a pas eu d’incident.

Mais nous avons été pour le moins étonnés que la demi-douzaine de policiers qui ont assisté à cette provocation n’aient pas eu la moindre réaction devant cette agression.

Toulon, le 30 janvier 2009

Réf. : BM/SF

Monsieur le Préfet,

Ce jour, à 12 heures, place de la Liberté, j’étais aux côtés de l’association de la Ligue des Droits de l’Homme, pour être présent à leur initiative : Les Cercles du Silence.

Cette manifestation a pour objectif de rappeler à l’ensemble des pouvoirs publics, l’indignation et l’inquiétude de nombre de citoyens français sur le sort réservé aux sans papiers.

Sauf erreur de ma part, cette manifestation était connue et validée par vos services. Il s’agissait donc d’un rassemblement autorisé. La présence des forces de l’ordre, pour encadrer ce rassemblement, démontrait l’aspect légal et officiel de cette manifestation.

Or, ce même jour, une trentaine de militants du parti populiste sont venus sur le même lieu dans une volonté manifeste de provocation et de trouble à l’ordre public. A plusieurs reprises, à l’aide d’un mégaphone, de pancartes insultantes et de propos violents à l’encontre des militants de la Ligue des Droits de l’Homme, les militants populistes ont souhaité l’affrontement.

J’ai été étonné, qu’à aucun moment, les militants extrémistes, dont certains s’apparentaient plus à des skinneds dignes du Kop de Boulogne, tristement célèbres dans les travées du PSG, n’aient été rappelés par les forces de l’ordre public à un peu plus de respect.

Fort heureusement, Monsieur le Préfet, cette manifestation, comme vos rapports vous le confirmeront, s’est terminée sans heurt. Toutefois, je reste pour l’avenir très inquiet si les pratiques du Parti Populiste ne devaient être contenus.

Ne doutant pas du souci que vous portez, en votre qualité de Préfet, au maintien de l’ordre public, j’espère que, si une manifestation de ce type devait se reproduire, vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir afin d’éviter des débordements qui pourraient s’avérer déplorables.

Je vous prie de croire, Monsieur le Préfet, en l’expression de mes respectueuses salutations.

Bruno Maranzana

Le compte-rendu paru le lendemain matin dans Var Matin :

Le cercle de silence encore perturbé

par S. H., Var-Matin, le 31 janvier 2009

Formé pour la quatrième fois afin de « dire non à l’enfermement des étrangers et à leur expulsion », le cercle de silence mensuel a fait du bruit, hier midi, sur la place de la Liberté. Le rassemblement a été perturbé par une trentaine de militants de Convergences nationales, du Parti populiste et du Rassemblement des étudiants de droite qui, comme lors de la prise de parole de leurs représentants, ont vertement manifesté leur désaccord avec ce soutien aux sans papiers. Les quelque 80 personnes réunies ont répondu par... le silence : « Nous voulons le respect pour tous ceux qui sont sur le territoire français. Et nous respectons même ceux qui ne sont pas de notre avis », résume Alex Massari, président de la section de Toulon de la Ligue des droits de l’Homme, à l’initiative de ce rendez-vous toulonnais et rejointe depuis par l’Association de défense, assistance juridique et éducative des travailleurs immigrés (ADAJETI), le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) et le Réseau éducation sans frontières (RESF83).

Prochain cercle samedi 28 février.

[*] Présent hier midi, le conseiller général PS Bruno Maranzana a écrit au Préfet Jacques Lainé pour s’étonner de la « contre manifestation »

Les militants des droits de l’Homme sont restés stoïques malgré les multiples provocations (Bruno Isolda).

L’extrême droite brise le « cercle du silence »

par Agnès Massei, La Marseillaise du 3 février 2009


L’incident auquel ont été confrontés vendredi les participants au « cercle du silence » n’est pas inédit : il s’était déjà produit le 30 novembre dernier. A deux reprises donc, ceux-ci se sont vu importunés par des militants d’extrême droite.

Le 30 de chaque mois, la section toulonnaise de la Ligue des droits de l’Homme, rejointe par l’Association de défense, assistance juridique et éducative des travailleurs immigrés (ADAJETI), le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD), la FCPE et le Réseau éducation sans frontières (RESF 83), organise sur la place de la Liberté à Toulon « un cercle du silence ».

L’initiative, destinée à dénoncer la politique gouvernementale en matière d’immigration, dure une heure au cours de laquelle les militants forment un cercle. Immobiles, ils observent le plus grand mutisme considérant que, de toute façon, on ne les entend pas quant au sort réservé aux étrangers et aux conditions des centres de rétention .

Quelques jours avant le 30 janvier, les associations ont eu connaissance des intentions du Parti populiste. Averties que celui-ci avait déposé en préfecture une déclaration de manifestation à la même heure et au même lieu, elles ont tout de même décidé de maintenir le quatrième « cercle ». Tout en prenant soin d’appeler dans leurs rangs à la sérénité. « Il est clair que nous ne défendons pas les mêmes valeurs », constataient-elles. Estimant que « la place de la Liberté est suffisamment vaste pour pouvoir contenir deux rassemblements sans qu’ils se mêlent », elles invitaient à « s’abstenir de toute réaction, en geste ou en parole ».

Ce qui fut fait malgré les multiples provocations relayées par mégaphone ou encore sur des pancartes brandies sous le nez des militants silencieux.

« Pas de réaction des forces de l’ordre »

Du côté des perturbateurs, on observait la présence de plusieurs organisations telles que Convergences nationales, le Rassemblement des étudiants de droite et le Parti populiste. Pas franchement avare en termes de communication, ce dernier égrène dans un communiqué un argumentaire qui ne fait l’économie d’aucun lieu commun : « [...] comme si notre pays se devait d’abolir ses frontières et de recevoir toute la misère du monde » ; « [...] les droits des Français qui sont prioritaires dans leur pays » ou encore « Réclamer leur régularisation, c’est [...] participer de fait à la pompe aspirante qui augmentera fatalement la proportion de travailleurs immigrés au détriment de la proportion de, chômeurs ». Aversion de l’étranger, exacerbation de la peur, politique de l’immigration jugée trop timorée et trop laxiste... bref, que du déjà-vu mais qui trouve toujours hélas oreille attentive. Rien, en somme, pour étonner les militants des droits de l’Homme. Plus surprenant en revanche, à leurs yeux, l’attitude des forces de l’ordre : « La demi-douzaine de policiers qui ont assisté à cette provocation n’ont pas eu la moindre réaction devant cette agression ». On peut en outre s’interroger sur l’opportunité d’accorder l’autorisation de manifester au Parti populiste simultanément à la tenue du « cercle du silence ».

Témoin des faits, le conseiller général Bruno Maranzana a d’ailleurs immédiatement rédigé un courrier à l’adresse du préfet (lire ci- dessus). L’élu y invite notamment le représentant de l’Etat à faire en sorte que de telles perturbations ne deviennent récurrentes.

Quoi qu’il en soit le prochain « cercle du silence » se tiendra le 28 février

Agnès Massei

Notes

[1Le président de la section toulonnaise de la LDH a également écrit au préfet :

« [... ] dans l’esprit de respect des droits fondamentaux qui nous anime, nous avions pris, soin de n’occuper que la partie gauche de la place, leurs laissant largement la place de faire leur rassemblement. Or, pour la seconde fois, nous avons été cernés par une horde de manifestants qui n’étaient visiblement pas venus dans un but pacifique, leur tenue et leurs propos en témoignant.

« Sachant que nous nous refusons à utiliser la violence, ils viennent en toute tranquillité perturber le bon déroulement d’une expression démocratique. Ils viennent nous narguer, nous insulter, nous photographier de façon ostensible [...]. »


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