l’affaire Cotor 1997-2000


article de la rubrique justice - police > justice
date de publication : février 2000
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Deux policiers sont sanctionnés pour avoir maltraité un jeune réfugié roumain.
"On a fait ça parce que nos chefs sont extrémistes."


Cristian COTOR est un jeune réfugié roumain qui s’était plaint d’avoir été mal traité par des policiers toulonnais, en juillet 1997. A l’occasion d’un contrôle, le jeune homme avait été interpellé et conduit au commissariat pour vérification d’identité. Dans l’intervalle, la photo de son passeport avait été maquillée par des gribouillages et un récépissé de demande d’asile avait disparu (ce papier équivalait à un titre provisoire de séjour).

Les deux policiers toulonnais ont été révoqués pour ces faits, en avril 98.

L’affaire est passée le 19 février 1998 devant le tribunal d’instance de Toulon, saisi pour " détérioration et destruction de documents administratifs " ; vous trouverez ci-dessous un compte-rendu de cette audience. Le 26 mars 1998, le tribunal s’est déclaré incompétent ; jugement aussitôt frappé d’appel par le ministère public comme par la partie civile, représentée par Me Christine Ravaz à la demande de la Ligue des droits de l’homme, et Me Marc Rivolet, avocat d’un des policiers.

Le 26 juillet 99, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a annulé le jugement de première instance et ordonné la comparution de témoins absents à l’audience à Toulon, avant de se prononcer sur le fond du dossier

La cour d’appel d’Aix en Provence s’est penchée sur cette affaire, en décembre 99 ; les magistrats avaient décidé d’entendre plus d’une dizaine de témoins, principalement des policiers du commissariat de Toulon ainsi que deux fonctionnaires de l’IGPN.

La cour a rendu son arrêt le 28 janvier 2000 : l’ex-gardien de la paix B.G. a été condamné à six mois de prison avec sursis et l’ancien brigadier J.R. à trois mois avec sursis. Les magistrats de la cour d’appel les ont considérés coupables tous les deux de la détérioration du passeport de Christian Cotor ; la destruction du récépissé de l’OFRA, par lequel ce jeune étranger demandait l’asile politique, a été retenue contre B.G..

Voici le compte rendu de l’audience du 19 février 1998,
paru dans le journal Cuverville (n°23 - mars 98) [1].

Le 19 février dernier, comparaissaient au tribunal correctionnel, deux policiers (dont un brigadier), accusés d’avoir barbouillé et détruit les pièces d’identité d’un individu qu’ils avaient arrêté arbitrairement, avant de le baffer un petit peu pour lui montrer c’est qui qui commande.

Le jeune homme, Cristian Cotor, un roumain ayant fui le régime d’Iliescu et demandant (de façon parfaitement légale) l’asile politique dans notre beau pays a pu, malheureusement pour l’hospitalité policière, contacter la Ligue des droits de l’homme. Celle-ci a aussitôt proposé de se porter partie civile, en le soutenant par la voix de l’avocate Christine Ravaz.


Le procès a permis : de constater qu’on peut être représentant de la République et agir en négation complète de ces principes ; d’entendre les contradictions (c’est le moins que l’on puisse dire) des prévenus qui se renvoient la responsabilité après avoir nié catégoriquement les faits à l’IGPN [2](un policier interrogé par l’Inspection Générale à son retour de vacances ayant lâché le morceau, le brigadier responsable a bien été obligé de changer son témoignage initial...) ; de constater qu’on préfère toujours laver son linge sale en famille et que des procédures visant des sanctions internes ont été engagées. ici devrait s’afficher un dessin, paru dans Cuverville, représentant des protagonistes du procès Cotor

Trois heures de procès

G., policier prévenu : "on a fait ça parce que nos chefs sont extrémistes". Le président Boulanger s’emporte quand Maître Ravaz lui demande de reprendre ces propos pour obtenir des précisions.

Maître Guisano défend le brigadier R. en signalant qu’on ne peut le suspecter de racisme puisqu’il aurait trouvé les documents concernant le récent démantèlement du réseau néo-nazi du coin !

Les avocates Ravaz et Balenci (du MRAP) voudraient requalifier l’infraction :

- Faux en écriture publique. Les policiers n’ont pas mentionné que Cotor avait un titre de séjour.

- Atteinte à la liberté individuelle. Ils ne lui ont pas notifié ses droits, comme par exemple l’heure de la fin de la garde à vue : elle ne peut pas excéder 4 heures pour un contrôle d’identité. (Et combien de calottes par heure ?)

H.P. + G.S.

Notes

[1L’ancêtre du webzine bien connu.

[2La "police des polices".


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