il y a 70 ans : la flotte française se sabordait à Toulon


article de la rubrique Toulon, le Var > histoire
date de publication : lundi 26 novembre 2012
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Le 27 novembre 1942, la flotte de Toulon se sabordait pour ne pas tomber aux mains des troupes nazies qui venaient d’envahir le sud de la France suite au débarquement des troupes Alliées en Afrique du Nord.

Ce sabordage est un acte d’impuissance, un constat de faillite. Ce n’est pas un acte de résistance. C’est au contraire, le refus de la résistance qui a conduit au suicide. Cette analyse est celle de de Gaulle et d’une grande partie des hommes et des femmes engagés dans la clandestinité pour qui la responsabilité des chefs de la marine est écrasante. À lire : l’exposé de Jean-Marie Guillon professeur d’Histoire contemporaine à l’Université de Provence (Aix-Marseille I).


Contexte historique [1]

Le 11 novembre 1942 au petit matin, en riposte au débarquement anglo-américain qui vient d’avoir lieu en Afrique du Nord, les troupes allemandes franchissent la ligne de démarcation. Le 12 au soir, elles atteignent le littoral méditerranéen. Quelques gestes isolés mis à part, aucune résistance n’est opposée aux envahisseurs. Seul le camp retranché de Toulon reste "libre" moyennant un accord de collaboration militaire défensive contre toute attaque venant de la mer. Or, à Toulon mouille la flotte française de Méditerranée, soit la moitié la plus moderne de la flotte française. Programmée par les Allemands dès le 19 novembre, l’opération "Lila" visant à neutraliser cette flotte ou à l’acculer au suicide est lancée dans la nuit du 26 au 27 novembre. Le 27 à 5h15, l’amiral de Laborde, commandant des Forces de haute mer, donne l’ordre de sabordage après avoir appris que les Allemands ont fait prisonnier l’amiral Marquis, préfet maritime, et parviennent dans l’arsenal. En quelques heures, l’un des rares atouts dont disposait encore la France disparaît. 85 bâtiments (dont 3 cuirassés, 7 croiseurs, 15 contre-torpilleurs, 12 sous-marins) pour un total de 350.000 tonnes sont en effet coulés. 5 sous-marins parviennent malgré tout à quitter la rade, dont 3 choisissent de gagner Alger, 1 se saborde et le dernier gagne l’Espagne. Ce sabordage n’est pas un acte de résistance à proprement parler. Il témoigne seulement du refus de participer à la lutte, que ce soit aux côtés des Allemands ou à ceux des Alliés. Avec l’occupation totale de la France et la dissolution de l’armée d’armistice - qui a lieu également le 27 novembre, le sabordage de la flotte à Toulon apporte une nouvelle preuve de la vanité du pari vichyste et de la faillite du régime fondé par le maréchal Pétain, accélérant au passage le ralliement à la résistance d’un certain nombre d’éléments militaires et policiers.

Le 27 novembre au soir, le général de Gaulle évoque au micro de la BBC le sabordage de "la flotte de Toulon, cette flotte de la France" :


Transcription

« La flotte de Toulon, cette flotte de la France, vient de disparaître. Au moment où nos navires allaient être saisis par l’ennemi, le réflexe national a joué dans les âmes des équipages et des états-majors. En un instant, les chefs, les officiers, les marins ont dû se déchirer le voile atroce que, depuis juin 1940, le mensonge tendait devant leurs yeux. Ils ont compris en un instant à quel aboutissement infâme ils allaient être acculés. Privés, sans doute, de toute autre issue, ces marins français ont, de leurs mains, détruit la flotte française afin que soit, du moins, épargnée à la patrie la honte suprême de voir ces vaisseaux devenir les vaisseaux de l’ennemi. Mais la France a entendu le canon de Toulon, l’éclatement des explosions, les coups de fusil désespérés de l’ultime résistance. Un frisson de douleur, de pitié, de fureur l’a traversée toute entière. Ce malheur qui s’ajoute à tous ces malheurs achève de la dresser et de la rassembler. Oui, de la rassembler dans la volonté unanime d’effacer, par la victoire, toutes les atroces conséquences du désastre et de l’abandon. Vaincre, il n’est pas d’autre voie. Il n’y en a jamais eu d’autre. »


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