gestation pour autrui ...


article de la rubrique droits de l’Homme > bioéthique
date de publication : jeudi 17 juillet 2014
version imprimable : imprimer


La « gestation pour autrui » (GPA) est une méthode de procréation médicalement assistée (PMA). On peut par ce moyen permettre à certains couples qui rencontrent des problèmes pour concevoir un enfant de pallier ces difficultés : on introduit dans l’utérus d’une autre femme — la « mère porteuse » — , un embryon obtenu par fécondation d’un ovocyte de la femme avec du sperme de l’homme. A la naissance le bébé sera remis à ses « parents d’intention » [1].

Plusieurs pays ont légalisé la GPA ; à l’intérieur de l’Union européenne, le Royaume-Uni et la Grèce. Les arguments favorables à la GPA se réfèrent à la neutralité éthique de l’État et à la liberté de disposer de son corps. Mais la GPA est actuellement interdite en France.

En outre, les enfants nés à l’étranger d’une GPA ne peuvent obtenir un état civil français. Cette situation a provoqué la condamnation de la France par la CEDH — au motif que des enfants ne sauraient être victimes de décisions de leurs parents [2]. Cette situation va obliger la France à s’adapter : la ministre de la Justice, Christiane Taubira, a déclaré dès le 26 juin l’intention de reconnaître la filiation des enfants nés de mère porteuse à l’étranger, sans lever l’interdiction de la pratique de la GPA en France.

Après un point sur les conséquences de cet arrêt de la CEDH, nous reprenons une interview dans laquelle Elisabeth Badinter plaide en faveur d’une “GPA éthique”.


GPA, PMA : quel sera l’impact de la décision de la CEDH sur le droit français ?

par Gaëlle Dupont, Le Monde, le 27 juin 2014


La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), a condamné, jeudi 26 juin, la France pour avoir refusé de transcrire à l’état civil les actes de naissance d’enfants nés par mères porteuses aux Etats-Unis.

Vu leurs motivations, ces arrêts devraient avoir des conséquences concrètes sur la pratique des tribunaux en France pour tous les enfants nés d’une gestation par autrui (GPA), voire pour ceux nés par procréation médicalement assistée (PMA) au sein des couples de femmes, et éventuellement sur les choix politiques du pouvoir.

Quelle est la première conséquence de la décision de la CEDH ?

Cette décision concerne au premier chef les deux familles qui ont mené ce combat judiciaire. Les jumelles Mennesson et Juliette Labassee, nées respectivement en 2000 et 2001 aux Etats-Unis, donc citoyennes américaines, verront leur filiation, légalement établie aux Etats-Unis, reconnue par notre pays. Leur nationalité française (qui est de droit quand au moins un des parents est français) sera officialisée.

Pourquoi l’établissement de liens de filiation établis à l’étranger était-elle interdite par la France ?

Jusqu’à présent, la Cour de cassation a interdit toute reconnaissance de liens de filiation établis à l’étranger pour divers motifs, dont le plus récent est la fraude à la loi. Elle estime que lorsque des personnes ont cherché à contourner la loi française en se rendant à l’étranger pour y bénéficier de pratiques qui leur sont interdites dans l’Hexagone, en l’occurrence l’aide médicale à la procréation, aucun effet juridique des actes établis à l’étranger n’est reconnu à leur retour. Cette non-reconnaissance serait le meilleur moyen, selon les juristes favorables à cette interprétation, de dissuader les futurs couples de s’engager dans cette voie.

L’argument de la fraude à la loi a également été utilisé pour justifier le refus d’accorder l’adoption d’enfants nés par PMA au sein de couples de femmes, prononcé par deux tribunaux. Le sujet est désormais porté devant la Cour de cassation. Pour Me Patrice Spinosi, l’avocat des époux Mennesson, couple emblématique du combat sur la GPA :

«  La CEDH renverse le raisonnement. La Cour ne part pas de la pratique des parents, mais des enfants, qu’elle pose comme premiers sujets de droit.  »

La CEDH souligne les incertitudes qui résultent pour eux de la situation des enfants, en matière de filiation, de nationalité et d’héritage. Elle affirme que cette situation «  porte atteinte à leur identité au sein de la société française  » et condamne la France au nom du «  droit au respect de leur vie privée  » et de «  l’intérêt supérieur des enfants  ».

Me Spinosi ajoute :

«  Le raisonnement de la Cour de cassation est battu en brèche. Elle doit revenir sur sa jurisprudence. La décision a été prise à l’unanimité et est parfaitement claire.  »

Combien d’enfants sont concernés ?

La secrétaire d’Etat chargée de la famille, Laurence Rossignol, a affirmé vendredi 27 juin, à l’Assemblée nationale, que la France ne contesterait pas l’arrêt. Une fois le délai d’appel de trois mois écoulé, de nombreuses familles concernées devraient donc effectuer la demande de retranscription à l’état civil. 2 000 enfants sont concernés, selon les évaluations des associations.

Quelles sont désormais les différentes possibilités pour le gouvernement français ?

Le gouvernement peut choisir de laisser les tribunaux juger et mettre la France en conformité avec la décision européenne.

Il pourrait aussi agir plus rapidement, par le biais d’une circulaire aux consulats français à l’étranger, en expliquant qu’une suspicion de GPA ne doit plus empêcher la retranscription à l’état civil. C’est ce que demande l’Association des familles homoparentales (ADFH), qui regroupe de nombreux couples d’hommes ayant eu recours à la GPA.

Enfin, le gouvernement peut légiférer, mais rouvrir un débat public sur ce thème, alors qu’il souhaite que les projecteurs restent braqués sur les sujets économiques, représente un risque. Des députés socialistes poussent pourtant en ce sens. Ils voulaient introduire la mesure dans la loi sur le mariage pour tous, puis dans la loi famille, abandonnée par le gouvernement. Le député PS Erwann Binet, ancien rapporteur de la loi sur le mariage, envisage de déposer une proposition de loi qui dispose que «  le mode de conception, ou la nature des filiations de l’enfant, ne peut faire obstacle à l’exercice de ses droits fondamentaux  ».

La garde des sceaux, Christiane Taubira, n’a pas donné d’indication, jeudi 26 juin, pour dire si elle soutiendrait un tel texte, se bornant à rappeler «  l’interdiction absolue  » de la GPA en France. «  Par contre, nous sommes attentifs à la situation des enfants  », a-t-elle ajouté. «  Le gouvernement tirera les conséquences de ces deux arrêts en droit interne  », a ajouté Mme Rossignol.

Jusqu’à présent, le pouvoir a joué la prudence, de crainte d’être accusé d’encourager les familles à recourir à la GPA, voire d’ouvrir une brèche en faveur de l’autorisation des mères porteuses.

Quelles sont les craintes des opposants à la GPA ?

«  En donnant la priorité à la régularisation administrative des enfants, la CEDH a omis de prendre en compte l’intérêt de la femme et de l’enfant, réagit La Manif pour tous. Car si rien n’est fait pour renforcer l’interdiction de la GPA et les sanctions auxquelles s’exposent ceux qui y ont recours, cette décision contribuera à l’évidence à favoriser le développement de la pratique des mères porteuses.  »

«  Cette décision est consternante. Elle cautionne, de façon implicite, le recours aux mères porteuses, a réagi Philippe Gosselin, député UMP, membre de L’Entente parlementaire pour la famille, un collectif de députés et sénateurs UMP ou UDI. En statuant de la sorte, la CEDH porte atteinte, également, à une forme de souveraineté de la France dans un domaine très sensible, celui de l’éthique. (...) Toute inaction du gouvernement dans ce cadre ne pourrait traduire que sa volonté, au final, de reconnaître la GPA en France.  »

Pour M. Mennesson en revanche, cette crainte est infondée : «  Les pays qui ont reconnu les enfants nés par GPA, tout en interdisant cette pratique, n’ont pas vu d’explosion du nombre de couples y ayant recours.  »


Elisabeth Badinter : « Je suis pour une GPA éthique »

[Interview donnée au magazine Elle, le 8 mars 2013]


Plus sensible encore que le mariage pour tous, le débat sur les mères porteuses divise profondément. Pour la féministe Elisabeth Badinter, la gestation pour autrui est acceptable si elle est encadrée. Rencontre avec une philosophe engagée.

Alors que 60% des Français sont opposés à la légalisation de la gestation pour autrui (GPA), Elisabeth Badinter est une des rares féministes à faire entendre une voix différente. Favorable au mariage pour tous, la philosophe et historienne prône l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) pour tous, mais aussi à la GPA pour les hétérosexuels comme pour les homosexuels. Sa conviction est qu’il est possible de mettre en place une « GPA éthique », loin des dérives dénoncées par ses opposants : marchandisation du corps, exploitation des plus vulnérables par les plus riches, instrumentalisation des femmes par les hommes… Persuadée que toute réflexion sur ce sujet délicat demande du temps, Elisabeth Badinter souhaite que la question de la gestation pour autrui ne soit pas abordée dans le cadre de la loi sur la famille, qui devrait être présentée avant la fin de l’année, mais lors d’un débat à part. Afin que tous les arguments soient mis sur la table, y compris celui d’une GPA encadrée.

  • Comment êtes-vous arrivée à l’idée qu’une « GPA éthique » était possible ?

Il y a six ou sept ans, une ancienne élève de Polytechnique est venue me trouver pour m’expliquer l’intérêt des mères porteuses dans le cas des femmes privées d’utérus. Je n’en avais alors entendu parler qu’à travers les journaux. Par la suite, je me suis intéressée de très près à la législation anglaise, mise en place dès 1985. Et cela m’a convaincue de la possibilité d’une GPA éthique si elle est strictement encadrée, tant pour les parents demandeurs que pour la mère qui porte l’enfant. Je ne suis pas la seule d’ailleurs, puisqu’un groupe de travail au Sénat, présidé par Michèle André, s’est rendu en Angleterre en 2008 et en est revenu favorable à la gestation pour autrui encadrée.

  • Que voulez-vous dire par « encadrée » ?

Elle serait décidée et surveillée par des juges et des psychologues. Seuls les couples qui en ont besoin pourraient en bénéficier. Et la femme qui se proposerait pour porter l’enfant devrait remplir un certain nombre de conditions : avoir moins de 35 ans, avoir déjà eu des enfants, être en bonne santé, ne porter qu’une fois un enfant pour quelqu’un d’autre et avoir un niveau de vie convenable, afin qu’elle ne soit pas contrainte financièrement de le faire.

  • Serait-elle rétribuée ?

Non, tout le processus serait bénévole. Ses frais de santé, le suivi de la grossesse, son arrêt de travail seraient pris en charge, mais elle n’en tirerait aucun bénéfice financier. En Angleterre, par exemple, le dédommagement ne peut dépasser l’équivalent de 10 000 €. Les juges sont très stricts à ce sujet.

  • Qui paie ? Les parents demandeurs ?

Les parents, en effet. Les associations chargées de les mettre en relation avec la mère gestatrice seraient bénévoles et fonctionneraient comme les organismes servant d’intermédiaires dans le cadre d’une adoption. Elles proposeraient plusieurs dossiers, et c’est la mère gestatrice qui choisirait les parents. Celle-ci aurait jusqu’à six semaines après la naissance pour se rétracter et décider de garder l’enfant. Les parents n’auraient alors aucun recours. Mais, si l’on se fie au cas de l’Angleterre, c’est très rare. Cela arrive moins d’une fois par an. En général, la gestatrice confie l’enfant à la naissance et l’adoption se fait dans les six mois.

  • Tous ces garde-fous, c’est pour s’assurer qu’elle le fait de sa propre volonté ?

Et pour s’assurer qu’elle le fait dans une logique de don. Les Anglais ont d’ailleurs introduit une autre évolution que je trouve bénéfique : la gestatrice ne peut plus être la mère génétique, l’ovocyte doit venir d’une autre donneuse. Pourquoi ? Pour qu’il n’y ait pas de confusion : elle n’est pas la mère de l’enfant, et cela rend sûrement les choses plus faciles pour elle psychologiquement. Elle est « nounou » pendant neuf mois et l’enfant n’est pas le sien.

  • Le fait que l’on préfère que l’ovocyte ne soit pas le sien prouve bien que l’on craint qu’elle ne s’attache à l’enfant…

Ce n’est pas son enfant, et elle le sait. Avant d’aller plus avant, il faut préciser que je suis bien consciente que tout ce que je vous dis est absolument impensable et inaudible pour toutes les personnes – et elles sont nombreuses – persuadées que les femmes ont un instinct maternel. Si l’on est convaincu que toutes les femmes aiment l’enfant qu’elles portent dès qu’elles se savent enceintes, que cet attachement est viscéral et que c’est une loi universelle, alors on ne peut entendre ce que je dis sur la GPA.

  • N’est-ce pas ce que pense l’écrasante majorité des femmes ?

Je ne sais pas si c’est l’écrasante majorité. Parlez avec des mères, vous verrez que toutes n’ont pas aimé leur enfant dès qu’il a bougé dans leur ventre, loin de là. Mais je veux bien croire que cela représente une minorité. Et encore plus aujourd’hui, où l’on fait des enfants parce qu’on désire en avoir. Je pense que, effectivement, la majorité des femmes ne pourrait porter un enfant pour quelqu’un d’autre. Mais je pense aussi que certaines peuvent et veulent bien le faire et que, pour elles, c’est un don et quelque chose d’important dans leur vie. C’est ce qu’elles disent, en tout cas. Néanmoins, si vous ne croyez pas possible que l’on puisse faire cela sans contrepartie, alors il faut retirer le mot altruisme du dictionnaire de la langue française.

  • Notre société croit au don, c’est le principe de nos lois de bioéthique : don de sperme, don d’ovocytes, don d’organes… Mais porter un enfant pendant neuf mois, n’est-ce pas autre chose ?

C’est effectivement différent de passer une heure dans un centre pour donner du sperme et de porter un enfant pendant neuf mois. Il se passe beaucoup de choses dans le corps pendant la grossesse, ce n’est pas anodin de porter un enfant. Malgré tout, je pense que certaines femmes seront prêtes à le faire par altruisme. Elles seront peu nombreuses, c’est évident. En Angleterre, elles ne sont que 250 à 300 par an, pas plus. Or, il y a trois fois plus de parents demandeurs. C’est pour cela, d’ailleurs, qu’ils vont en Ukraine.

  • N’est-ce pas idéaliste de penser que, juste par altruisme, des femmes vont y consacrer un an de leur vie, avec tout ce que cela implique professionnellement et pour la santé ? Ne vont-elles pas plutôt le faire en échange d’une rémunération, qu’on appelle cela un dédommagement ou un salaire…

Prendre leurs frais en charge, ce n’est pas leur payer un salaire. Elles ne « gagnent » pas 10 000 €. C’est ce que coûtent une grossesse et un accouchement si l’on n’est pas remboursée par la Sécurité sociale. Quant à la question de l’idéalisme, des femmes altruistes existent et peuvent aider des couples qui en ont besoin. Même si cela ne concerne que 300 personnes, pourquoi le leur refuserait-on ? Il faut aussi tenir compte d’un aspect pragmatique : la GPA existe ailleurs, elle ne va pas s’arrêter parce qu’on la refuse.

  • Les opposants à la GPA répondent que ce n’est pas parce qu’elle existe ailleurs qu’on doit l’autoriser. On peut réfléchir à ce que cela implique pour la famille, la société…

C’est un grand bouleversement parce qu’il peut y avoir trois mères : la donneuse d’ovocyte, la mère porteuse, la mère éleveuse.

  • Qui est LA mère ?

Je suis culturaliste, alors je vous réponds sans hésiter : la mère éleveuse. C’est elle qui a le projet d’enfant, qui l’accueille, qui l’aime, qui l’éduque. Tout comme la mère est celle qui adopte un enfant et l’élève. Mais on ne pourra plus dire dans le code civil que la mère est celle qui accouche.

  • Mettons que ces femmes généreuses existent. Elles ne seront pas nombreuses, il y aura de longs délais d’attente… N’y a-t-il pas un risque de voir se développer des réseaux parallèles où, en payant, on trouvera une mère porteuse plus rapidement ?

Ces réseaux seront illégaux et on pourra les poursuivre… Oui, il y aura des détournements, il y aura des gens pressés qui iront à l’étranger, mais ce n’est pas une raison valable pour interdire cette pratique et en priver ceux qui en ont besoin. Je ne vois aucune raison morale ou philosophique d’interdire la GPA si elle est encadrée. Au contraire.

  • On vous oppose souvent que la gestation pour autrui revient à considérer le corps comme une marchandise. Pourquoi cet argument vous semble-t-il hors de propos ?

Je pense qu’une femme est libre de décider ce qu’elle fait de son corps. Je ne vois pas pourquoi on dirait à une femme adulte qui décide de porter un enfant pour quelqu’un d’autre : « Madame, taisez-vous, c’est mal. » On retrouve le même discours sur la prostitution. Les abolitionnistes font valoir que seules 15 ou 20 % des prostituées s’y adonnent parce qu’elles l’ont décidé elles-mêmes, sans y être contraintes par un tiers, et que donc il faut l’interdire pour toutes. Je ne suis pas d’accord. La question de principe est essentielle : une femme a-t-elle le droit de disposer de son corps dès lors qu’elle a toute sa raison ? Pour moi, oui.

  • Poussons la logique jusqu’au bout. Si toute femme a le droit de disposer de son corps, pourquoi ne se ferait-elle pas rémunérer pour être une mère porteuse ? Après tout, cela peut faire débat...

Cela peut faire débat. Mais porter un enfant pendant neuf mois, ce n’est pas exactement la même chose que faire une passe. Il y a des risques pour la santé.

  • Justement, ce pourrait être un argument en faveur d’une rémunération…

Je pense très franchement que les Français ne sont pas prêts à entendre cela. Moi-même, je ne franchis pas ce pas… Dès lors qu’il y a de l’argent en jeu, le danger est grand de voir intervenir des tiers : des mafieux ou même, comme on le voit en Inde, des maris qui forcent leur femme à être mère porteuse. La pire des choses, ce serait qu’une femme y soit forcée, le fasse contre sa volonté. Ce serait insupportable.

  • Le Comité consultatif national d’éthique a rendu un avis défavorable à la GPA en 2010, en s’appuyant sur des études montrant que les mères porteuses sont d’un niveau socio-économique inférieur aux couples demandeurs. C’est une autre forme d’exploitation…

C’est ce qui gêne le plus les consciences et je le comprends. Mais, à partir du moment où il n’y a pas de rémunération, on n’est pas dans cette situation. Dans la GPA éthique, tout repose sur le désir de celle qui souhaite porter l’enfant. Cela me semble très important car il y a effectivement un risque de dérives. Je trouve, pour ma part, choquant que des stars américaines, qui pourraient porter un enfant, fassent appel à une mère porteuse pour ne pas subir une grossesse…

  • Si l’instinct maternel n’existe pas comme vous le dites, on peut comprendre qu’une femme n’ait pas envie de porter un enfant. Pourquoi n’aurait-elle pas droit à une mère porteuse ?

Il y a très peu de mères porteuses, réservons-les à ceux qui en ont vraiment besoin.

  • Les couples homosexuels en ont-ils vraiment besoin ?

Mais oui ! Je ne vois pas en quoi ils seraient différents des couples hétérosexuels. Parce qu’ils sont homosexuels, ils ignoreraient le désir de paternité ?

  • Alors, où posez-vous la limite ? Une femme célibataire pourrait-elle avoir accès à la GPA ?

Moralement, je suis pour. Tout comme je suis pour que les célibataires aient accès à la procréation médicalement assistée. Mais je crois qu’il faudrait dissocier les deux débats. Pour la PMA, les enjeux ne sont pas aussi lourds que pour la GPA.

  • Pas de limite d’âge non plus ? Bientôt, on pourra congeler ses ovocytes. La question de savoir jusqu’à quel âge on pourra les réimplanter va se poser…

Je trouve très bien que, jeune, on puisse congeler ses propres ovocytes pour plus tard, vu les difficultés qu’ont les femmes à avoir des enfants après 35 ans. Mais, à mes yeux, ce serait irresponsable de le faire après la ménopause. Vous imaginez un enfant de 20 ans avec une mère de 70 ans atteinte d’Alzheimer ? On ne peut imposer cela à un enfant. Ma limite, c’est l’intérêt de l’enfant.

  • On voit bien qu’il est de plus en plus difficile de poser des limites dans une société où, en outre, on se base sur l’égalité. Pourquoi ne pas dire oui à tout le monde ?

Ce serait oublier la prise en compte de l’intérêt de l’enfant. Je n’ai trouvé légitime l’homoparentalité que quand j’ai lu les premières études publiées en 1988, concernant les enfants de couples homos. Quand je me suis rendu compte que ces enfants ne sont ni plus heureux ni plus malheureux que les enfants d’hétérosexuels, j’ai forgé ma conviction profonde que ce sont des familles comme les autres. Il faut arrêter de penser que la famille naturelle, parce qu’elle est naturelle, est le modèle.

  • Certaines féministes voient dans l’ouverture de la GPA aux couples d’hommes une façon d’évincer les femmes de la filiation. Que répondez-vous ?

Cet argument de l’utilisation du corps des femmes pour le plaisir des hommes me paraît dépassé. Il sent la haine des hommes, qui, à cause de leur genre, seront toujours vus comme des oppresseurs. Pour moi, cela n’a pas de sens : les femmes qui feront cela, si la GPA est encadrée, n’y seront forcées par quiconque. Elles feront un don à des parents.

Notes

[1La naissance par GPA n’a été évoquée dans cette page que pour des couples hétérosexuels, mais elle pourrait être également envisagée pour des couples homosexuels.

[2L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme : http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra...

Le communiqué de presse : http://hudoc.echr.coe.int/webservic...


Suivre la vie du site  RSS 2.0 | le site national de la LDH | SPIP