des mères de soldats russes enregistrées comme « agent de l’étranger »


article de la rubrique international
date de publication : jeudi 4 septembre 2014
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La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) publie une note du 18 août dans laquelle elle s’alarme des graves violations des droits de l’Homme en Ukraine, par les différents acteurs de la guerre qui s’y déroule.

Officiellement, aucun soldat des forces régulières russes ne participe à la soudaine contre-offensive victorieuse des séparatistes dans les régions sud-est de l’Ukraine. Mais des associations de mères de soldats russes lèvent un voile sur cette guerre. « En fait, depuis le début, on peut estimer que jusqu’à 15 000 soldats ont été envoyés là-bas », assure Valentina Melnikova, la présidente du Comité des mères de soldats russes. [1]

Pendant les guerres de Tchétchénie, ces associations avaient dénoncé les mensonges de l’armée russe et du Kremlin. Pour réduire au silence les contestataires, les autorités russes disposent d’un moyen administratif qui consiste à les classer comme « agent de l’étranger » ; c’est ce qui vient d’advenir à l’association de mères de soldats à Saint-Pétersbourg.


Communiqué de la FIDH

Ukraine : Les victimes oubliées
Graves violations des droits humains

Le 18 août 2014

La situation des droits humains en Ukraine est alarmante. Chaque jour, dans le cadre du conflit entre les troupes ukrainiennes et les groupes armés pro-russes principalement à l’est du pays, des civils sont tués ou victimes d’enlèvement, de détentions arbitraires, de tortures, de menaces et aussi de discriminations, en particulier en Crimée.

Les graves violations des droits humains commises entre novembre 2013 et février 2014 dans le cadre de la répression des militants d’Euromaidan ont fait l’objet d’une couverture médiatique mondiale et d’enquêtes approfondies ont été menées ou sont en cours par des instances internationales et nationales, des organisations nationales de la société civile et des ONG.

Le crash du Boeing 777 de la Malaysia Airlines à la suite d’un tir de missile a replacé cette situation au centre de l’actualité alors que la communauté internationale s’était peu à peu démobilisée depuis les événements de Maidan et l’annexion de la Crimée par la Russie et peinait à influer sur la résolution du conflit.

En revanche, la documentation des violations actuelles des droits humains en Crimée et dans le cadre du conflit entre l’armée Ukrainienne et les groupes pro-russes est rendue extrêmement complexe du fait de l’insécurité générale, des difficultés d’accès aux zones de conflit, des entraves au travail des journalistes et ONG, de la peur des victimes de témoigner par crainte de représailles, et de la guerre de l’information menée par les deux camps.

Cette note a pour objectif de mettre en lumière les grandes tendances des graves violations des droits humains commises par les parties en conflit – qui pour certaines pourraient être qualifié de crimes internationaux, d’établir les responsabilités et de formuler des recommandations aux acteurs internationaux et nationaux pour la protection des populations civiles et la lutte contre l’impunité.

Elle se base sur des informations fiables, vérifiées et recoupées recueillies à l’occasion d’une mission internationale de la FIDH en Ukraine en juin 2014, organisée avec son organisation partenaire, Center for Civil Liberties, et les informations relayées par des ONG locales et sources d’information indépendants, les instances internationales travaillant dans le pays comme le Haut commissariat aux droits de l’Homme des Nations unies.

Lire la note de la FIDH : http://www.fidh.org/IMG/pdf/20140818_ukraine_fidh_ccl_fr.pdf

Russie : des mères de soldats déclarées "agents étrangers"

Source : Amnesty International le 31 août 2014


Le 28 août, le ministère russe de la Justice a ajouté l’ONG Mères de soldats de Saint-Pétersbourg à sa liste officielle d’« agents de l’étranger », aux termes d’une loi adoptée en 2012.

Cette décision a été prise après que la dirigeante de l’ONG, Ella Poliakova, a dit publiquement que des soldats russes seraient morts en Ukraine dans des combats contre les forces ukrainiennes.

Son organisation a établi une liste d’une centaine de soldats russes qui auraient été tués en Ukraine et d’environ 300 blessés, et a demandé l’ouverture d’une enquête. Le Kremlin nie avoir envoyé des soldats en Ukraine, tout comme il nie toute implication russe directe dans un conflit qu’il affirme être interne à l’Ukraine.

Cette décision, et le moment où elle a été prise, indiquent que le Kremlin est décidé à faire taire les voix discordantes et à ne laisser passer aucune information qui laisserait entendre que la Russie joue un rôle direct dans le conflit ukrainien, alors que des preuves du contraire apparaissent chaque jour. Le message est clair : si vous osez parler, les conséquences seront graves »,
Sergueï Nikitine, directeur du bureau d’AI à Moscou.


L’organisation Mères de soldats de Saint-Pétersbourg mènera une action en justice contre cette mesure

Ella Poliakova affirme que l’ONG ne bénéficie d’aucun financement de l’étranger, ce qui, selon la loi de 2012, constituerait la caractéristique fondamentale d’un « agent étranger ». L’autre caractéristique nécessaire est la participation à des activités politiques. D’après les autorités, l’ONG a pour activités politiques « l’organisation de réunions publiques » et la « constitution d’une opinion publique ».

Une autre ONG, l’Institut pour le développement de la liberté d’information, elle aussi connue pour l’indépendance de ses prises de position et ses critiques, a été ajoutée le même jour au « registre des agents étrangers ».

Adopté en juin 2012, le texte législatif appelé « loi sur les agents étrangers » est entré en vigueur en novembre de la même année. Des modifications apportées en 2014 ont attribué de nouveaux pouvoirs au ministère de la Justice, qui peut désormais ajouter des ONG sur le registre sans le consentement de celles-ci et sans qu’il soit nécessaire de passer par de longues audiences au tribunal comme c’était le cas jusqu’à tout récemment.

Lire aussi : Russie, l’étau se resserre sur 5 ONG


Des centaines d’ONG en Russie ont fait les frais d’« inspections » surprise par les autorités depuis la promulgation de la loi ; plusieurs ont été condamnées à de lourdes amendes pour avoir refusé de se qualifier elles-mêmes d’« agents étrangers », et certaines ont été forcées de fermer. Douze ONG indépendantes ont maintenant été ajoutées à la liste contre leur volonté, en l’espace de moins de trois mois.

Notes

[1Source : Le Monde du 4 septembre 2014.


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